Le 2 mars 2016, la Commission européenne a présenté une évaluation des implications, pour l'UE, du nouvel accord mondial sur le climat adopté en décembre 2015 à Paris lors de la COP21. Cette évaluation s'accompagne d'une proposition de signature de l'Accord par l'UE, qui indique les projets à mettre en place pour atteindre ses objectifs.
La Commission affirme dans l'évaluation que "le passage à une économie à faible intensité de carbone et efficace dans l'utilisation des ressources suppose un véritable tournant au niveau technologique, énergétique, économique et financier et, en fin de compte, de la société tout entière" et que "l'accord de Paris représente une opportunité de transformation économique, de création d'emplois et de croissance." "La transition stimulera l'investissement et l'innovation dans le domaine des énergies renouvelables, ce qui devrait permettre à l'UE de s'imposer comme le chef de file mondial du secteur et favoriser une croissance accrue sur les marchés des biens et services européens, notamment en lien avec l'efficacité énergétique", prédit-elle.
"Nous ferons en sorte de conserver notre avantage de pionniers, notamment dans le domaine des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique. Avec le cadre stratégique pour une Union de l'énergie, nous voulons créer un environnement qui permette aux investisseurs et aux entreprises de saisir pleinement les opportunités nouvelles qui se présentent à eux et, partant, de créer des emplois et de la croissance", a déclaré dans ce contexte, le vice-président de la Commission européenne en charge de l'Union de l'énergie, Maroš Šefčovič.
Le commissaire européen chargé de l'action pour le climat et de l'énergie, Miguel Arias Cañete, a déclaré qu'il fallait " achever sans délai la législation en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030, signer et ratifier l'Accord au plus vite et continuer à jouer un rôle moteur dans la transition mondiale vers un avenir sobre en carbone".
L'accord de Paris prévoit des réexamens périodiques, visant à garantir la réalisation de l'objectif de maintien du réchauffement climatique sous la barre des 2 °C et la poursuite des efforts dans le sens d'une limitation à 1,5 °C. La Commission souligne dans son évaluation que l'UE contribuera aux travaux scientifiques qui seront menés au niveau international, pour mieux saisir les enjeux d'un tel objectif, dans le cadre du mandat donné au Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) d'élaborer un rapport spécial sur la question. Elle participera au premier "dialogue de facilitation", en 2018, pour faire le point des ambitions collectives et des progrès accomplis dans la mise en œuvre des engagements souscrits, ainsi qu'au premier bilan mondial en 2023, lequel constituera "l'occasion d'envisager des actions de plus en plus ambitieuses de toutes les parties après 2030", dit la Commission.
En outre, l'accord de Paris invite tous les pays à communiquer, d'ici à 2020, leurs stratégies de décarbonisation à long terme pour le milieu du siècle. Pour faciliter l'élaboration de la stratégie de l'Union, la Commission préparera une analyse approfondie des mutations intervenues dans le domaine économique et social, en vue d'alimenter les discussions politiques au Parlement européen, au Conseil et avec les parties prenantes.
La mise en œuvre du cadre d'action de l'UE en matière de climat et d'énergie à l'horizon 2030, approuvé par le Conseil en octobre 2014, lequel fixe un objectif de réduction ambitieux d'au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030 pour l'ensemble des secteurs de l'économie européenne, fait figure de "priorité" pour donner suite à l'accord de Paris, souligne le document. Ainsi, les propositions législatives à venir devraient faire l'objet d'un examen accéléré par le Parlement européen et le Conseil. Pour la Commission, l'Union doit aussi renforcer les conditions propices à la transition vers une économie à faible intensité de carbone en s'appuyant sur la panoplie de mesures et d'instruments interconnectés repris dans le cadre stratégique pour une Union de l'énergie résiliente, l'une des dix priorités de la Commission Juncker.
La Commission mise aussi sur l'innovation en s'associant à la "Mission innovation" décidée en marge de la COP21 par vingt États parmi les premières économies mondiales pour relancer l'innovation publique et privée dans les énergies propres, encourager la mise au point et le déploiement de technologies innovantes et diminuer les coûts. La Commission souligne dans ce contexte que le budget de l'UE consacré à la recherche liée aux technologies à faible intensité de carbone au titre du programme Horizon 2020 a déjà été doublé dans les faits pour la période 2014-2020, et que l'UE s'est engagée à investir 35 % au moins des ressources de ce programme dans des actions liées au climat.
"Réorienter et accroître rapidement" les investissements privés serait également essentiel. Les fonds de l'UE, tels le Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS), doivent jouer un rôle décisif dans la mobilisation des marchés. La Commission rappelle le lancement récent du portail européen de projets d'investissement (EIPP), qui doit attirer des investisseurs dans des projets d'investissement viables et sains en Europe. La Commission prévoit également un renforcement de l'assistance à l'élaboration de projet et de l'assistance technique dans le cadre de la plateforme européenne de conseil en investissement (EIAH) mise sur pied par la Commission et la Banque européenne d'investissement.
"Le bon fonctionnement des flux transfrontières de capitaux et l'existence de marchés des capitaux intégrés et durables sont aussi des conditions importantes pour permettre cette transition", poursuit le document de la Commission, en citant l'importance des mesures prises et à adopter dans le cadre de la mise en place d'une Union des marchés des capitaux.
Au chapitre de la tarification du carbone, jugée essentielle pour favoriser des conditions de concurrence équitables à l'échelle mondiale dans le contexte de la transition, "l'Union devrait intensifier ses efforts pour partager avec les pays qui doivent commencer à taxer le carbone ses propres expériences en la matière", dit le document. "Les perspectives en ce qui concerne la tarification du carbone et de l'énergie sont encore compliquées par les bas prix du pétrole actuellement", note aussi la Commission en déclarant le moment opportun de supprimer les subventions en faveur des combustibles fossiles qui, selon l'Agence internationale de l'énergie, s'élevaient à 548 milliards d'USD au niveau mondial en 2013.
Une grande partie des transformations à venir se produiront de facto dans les villes intelligentes et au sein des communautés urbaines, lit-on encore dans l'évaluation. Ainsi, les travaux menés au niveau des métropoles et les politiques urbaines seront intensifiés en 2016, notamment en ce qui concerne le soutien aux actions intégrées et globales mises en place par la Convention des maires et la création d'un "guichet unique" pour les autorités locales.
Enfin, la Commission souligne à la fin de son document l'importance pour l'UE de multiplier ses actions de diplomatie climatique, axées sur trois points convenus par le Conseil en février 2016 à savoir : continuer à faire de la lutte contre le changement climatique une priorité stratégique, soutenir la mise en œuvre de l'accord de Paris et des plans relatifs au climat et accroître les efforts visant à prendre en compte la relation entre le climat, les ressources naturelles, y compris l'eau, la prospérité, la stabilité et les migrations.
Dans une proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de l'UE, de l'accord de Paris, qui accompagne l'évaluation, la Commission européenne énumère les prochaines étapes. Evidemment, la première d'entre elles est la signature et la ratification de l'accord de Paris, ouvert à la signature des États le 22 avril 2016 à New York, et entrera en vigueur quand au moins 55 parties représentant au moins 55 % des émissions mondiales l'auront ratifié.
Au cours des douze prochains mois, la Commission a prévu de présenter les principales propositions législatives restantes pour mettre en œuvre le cadre législatif à l'horizon 2030. Après avoir adopté le 15 juillet 2015 une proposition de directive renforçant le rapport coût-efficacité des réductions d'émissions et favorisant les investissements à faible intensité de carbone, pour ce qui est des secteurs couverts par le système d'échange de quotas d'émission (SEQE), elle entend ainsi une décision sur la répartition de l'effort pour les secteurs non couverts par le SEQE ainsi que sur la manière d'intégrer les émissions et les absorptions dues à l'utilisation des terres, au changement d'affectation des terres et à la foresterie.
Elle prévoit ensuite un acte législatif établissant un mécanisme de gouvernance fiable et transparent en matière de climat et d'énergie pour l'après-2020 et d'autres propositions stratégiques visant à adapter le cadre réglementaire de l'UE "de façon à donner la priorité à l'efficacité énergétique et à soutenir le rôle de l'Union en tant que leader mondial des énergies renouvelables".
Enfin, la Commission parachèvera en 2016 son examen de l'objectif d'une amélioration d'au moins 27 % de l'efficacité énergétique à l'horizon 2030, pour proposer ensuite des mesures en matière d'énergies renouvelables et d'efficacité énergétique, notamment pour les bâtiments.