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Environnement - Santé
En réponse à une question orale des eurodéputés, le commissaire européen à la Santé promet pour l’été 2016 des critères scientifiques pour les perturbateurs endocriniens
02-02-2016


perturbateurs endocriniensLe commissaire européen à la Santé et à la Sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, a répondu le 2 février 2016 au Parlement européen à une question orale des groupes S&D, ADLE, Verts/ALE, GUE/NGL et ELDD concernant la récente condamnation de la Commission européenne par le Tribunal de l'Union européenne (UE) (affaire T-521/14) au sujet des perturbateurs endocriniens. La Commission a en effet été condamnée le 16 décembre 2016 pour ne pas avoir présenté des critères applicables aux perturbateurs endocriniens, substances chimiques qui interfèrent avec le système hormonal pouvant entraîner des effets nocifs sur la santé et l'environnement, alors qu’elle était tenue de le faire avant décembre 2013. Le commissaire à la Santé a assuré que la Commission s’engageait à présenter de tels critères "avant l’été 2016".

Le contexte

Le 16 décembre 2015, le Tribunal de l'UE a dit pour droit que la Commission avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu des règlements concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides (règlement (UE) n° 528/2012) et des produits phytosanitaires (règlement CE 1107/2009), en s'abstenant d'adopter des actes en ce qui concerne la spécification des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien. La Commission avait l'obligation d'adopter ces actes avant décembre 2013 mais avait décidé, en juillet de la même année, de mener au préalable une analyse d'impact des coûts et des avantages socioéconomiques des différentes options envisageables pour ces critères, notamment des diverses options modifiant la législation sectorielle. 

C’est la Suède qui avait introduit en juillet 2014 un recours contre la Commission européenne devant la Cour de Justice de l’UE. Le Conseil de l’UE avait par ailleurs décidé le 29 janvier 2015 par procédure écrite de soutenir la Suède dans son action contre la Commission.

Le Parlement européen avait quant à lui adopté en mars 2013 une résolution appelant la Commission à agir pour réduire l’exposition aux perturbateurs endocriniens, suite à un rapport adopté en janvier 2013.

En juin 2014, la Commission avait finalement publié une feuille de route proposant quatre options en vue d’une définition des perturbateurs endocriniens (EDC en anglais pour Endocrine disrupting chemicals). La Commission avait également lancé une consultation publique sur ces quatre options de définition.

Lors d’un débat en plénière le 9 mars 2015, un groupe d’eurodéputés avait interpellé le commissaire sur le retard pris dans la préparation de critères de définition des perturbateurs endocriniens alors qu’une nouvelle étude venait d’établir que les coûts de maladies causées par ces substances chimiques s’élèverait à 1,23 % du PIB de l’UE.

La question orale

Les auteurs de la question orale ont tout d’abord rappelé que des liens entre ces perturbateurs et des maladies comme le cancer, le diabète ou les problèmes de fertilité avaient été établis par les scientifiques. Ils ont souligné que tous les individus, mais particulièrement les nourrissons et même les embryons, étaient exposés à ces substances que l’on retrouve aussi bien dans les emballages plastiques, les jouets pour enfants, les tickets de caisse, l’eau potable, etc.

Les auteurs ont appelé la Commission qui selon eux "se donne le droit de ne pas suivre la législation européenne", à respecter ses responsabilités, soulignant qu’aucune disposition dans le règlement n’impliquait de réaliser au préalable une étude d’impact.

Certains ont encore mis en avant que les critères étaient pourtant près à l’automne 2013 mais que la Commission n’a rien fait.

Les eurodéputés ont donc demandé au commissaire d’agir instamment pour définir ces critères applicables aux perturbateurs endocriniens.

La réponse du commissaire

En réponse à la question orale, le commissaire Vytenis Andriukaitis a évoqué un malentendu et a réaffirmé la "ferme intention" de la Commission de se conformer au jugement du Tribunal. Il a indiqué être "parfaitement conscient" que la Commission avait dépassé le délai et a assuré qu’elle présenterait d’ici l’été 2016, sur bases de preuves scientifiques, de nouveaux critères scientifiques concernant les perturbateurs endocriniens, garantissant un "haut niveau de protection pour la santé humaine et l’environnement" .  

Les propositions devraient s'articuler autour de deux documents, a indiqué le commissaire, un acte d'exécution concernant les critères s'appliquant aux produits chimiques relevant du règlement sur les produits sanitaires et un acte délégué concernant les critères s'appliquant aux produits relevant du règlement sur les biocides.

Le commissaire Andriukaitis a néanmoins tenu à rappeler que l’étude d’impact restait un "outil utile voire essentiel pour guider la future décision [de la Commission] sur ces critères", se défendant d’effectuer un "travail pionnier".

Le commissaire a rappelé que la science n’était pas unanime quant à la définition des critères scientifiques. Par ailleurs, "nous définissons ces critères dans un contexte juridique et les vues divergent dans le monde entre ceux qui font les lois", s’est-il défendu.

Le débat

Lors du débat, les députés ont été unanimes pour dire que ces critères scientifiques étaient absolument nécessaires et pour condamner la Commission de ne pas avoir agi à temps.

Jens Gieseke (PPE) a souligné le caractère indispensable de ces critères pour "protéger les citoyens européens" et a invité la Commission à ne pas interrompre pour autant son étude d’impact.

Pavel POC (S&D) a rappelé que ce débat était en cours depuis de nombreuses années. Il a parlé d’une "tragédie" du fait que la Commission ne respecte pas l’arrêt du Tribunal.

"Cela fait des années que l’Organisation mondiale de la Santé nous met en garde", a rappelé Stefan ECK (GUE/NGL), soulignant l’augmentation très importante du nombre de cancers. Il a demandé à la Commission pourquoi elle avait laissé passer la date butoir.

Bas EICKHOUT des Verts/ALE a indiqué que les critères scientifiques étaient déjà disponibles en 2013. "Pourquoi attendre alors l’été 2016 ?", a-t-elle demandé, indiquant que c’était "une honte" que la Commission agisse de la sorte. 

Eleonora EVI (ELDD) a pour sa part parlé du "coût social très lourd", indiquant que 60 000 nouveaux nés naissent chaque année avec des problèmes graves dus à ces perturbateurs.