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Migration et asile - Développement et aide humanitaire - Justice, liberté, sécurité et immigration
Une centaine d’ONG appellent les dirigeants européens à rejeter l’idée de faire de la dissuasion et du retour des migrants l'objectif principal de la relation entre l'UE et les pays tiers
27-06-2016


Des réfugiés sur la route des Balkans - mars 2016 - Source: UNHCR/Daniel EtterLe 27 juin, à la veille d’un Conseil européen qui sera dominé par les conséquences du vote britannique sur le Brexit mais doit aussi aborder la question migratoire et notamment celle la coopération avec les pays tiers d'origine et de transit, une centaine d’ONG ont lancé un appel aux dirigeants européens à rejeter les récentes propositions de la Commission qui visent à réduire le nombre de migrants atteignant le sol européen.

"Si elle ne rejette pas la proposition de la Commission européenne sur les flux migratoires, l'Union européenne  s’apprête à ouvrir un chapitre sombre de son histoire", craignent les 104 organisations humanitaires, médicales, de défense des droits de l'Homme,  de développement ou spécialisées dans la gestion des migrants, qui signent la déclaration. "En inaugurant une politique étrangère dont l'unique objectif serait de contrôler l’arrivée de migrants, l'UE et ses Etats membres risquent de perdre leur crédibilité et leur autorité sur la question de la défense des droits de l'Homme", estiment ces ONG, parmi lesquelles  les organisations humanitaires luxembourgeoises, CARE et Handicap International.

La Commission européenne avait exposé le 7 juin 2016 devant le Parlement européen son projet de nouveau cadre de partenariat, axé sur les résultats, en vue de mobiliser et de concentrer l'action et les ressources de l'UE dans les activités extérieures en matière de gestion des migrations. Elle envisage d'utiliser les instruments d’aide, le commerce et d'autres fonds européens pour réduire le nombre de migrants atteignant le sol européen, résument les ONG qui estiment que cette approche "s’inspire de l'accord passé entre l’UE et la Turquie qui a conduit au blocage de milliers de personnes en Grèce dans des conditions inhumaines et dégradantes" et dans le cadre duquel "les enfants sont particulièrement touchés".

Pour les organisations signataires de cet appel, l’UE "risque de nuire gravement à sa politique étrangère en matière de droits de l'homme et de saper le principe de droit d'asile à l'échelle internationale". "Rien ne garantira que les droits de l’homme, les principes de protection ainsi que les règles et les standards qui prévalent en la matière seront respectés lorsque l’UE négociera avec les gouvernements  les accords qu’elle juge utiles pour stopper l’immigration vers l’Europe", s’inquiètent-elles en effet, ce qui laisse "planer un réel risque de violation du droit international qui interdit le refoulement des personnes vers des destinations où elles sont exposées à des violations de leurs droits". "La responsabilité en matière de violation des droits de l'homme ne s’arrête pas aux frontières de l'Europe", martèlent les organisations.

"Cette proposition ne tient pas compte des preuves montrant que toutes les stratégies de dissuasion visant à juguler les flux migratoires se sont montrées inefficaces", dénoncent encore les ONG qui sont convaincues qu’une telle approche "non seulement ne parviendra pas à "briser le business-modèle" des passeurs, mais augmentera les souffrances des migrants car beaucoup seront obligés de prendre des routes plus dangereuses pour atteindre l'Europe".

Les ONG sont aussi vivement préoccupées du fait que la proposition de la Commission risque de réorienter massivement l'aide au développement de l'Europe vers un unique objectif, à savoir l'arrêt des migrants. "Ceci contredit de manière inacceptable l'engagement de l'UE d’utiliser la coopération pour le développement afin d’éradiquer la pauvreté», regrettent les ONG.

Les ONG signataires sont convaincues que tout accord pour la "gestion des migrants" avec des pays où de graves violations des droits humains sont commises sera contre-productif à long terme.  De tels accords "mettraient en danger les droits de l'Homme dans le monde et contribueront à perpétuer le cycle de la violence et de la répression qui pousse les gens à fuir", mettent-elles  en garde. Elles appellent par conséquent les dirigeants européens à rejeter la proposition de la Commission et à élaborer une stratégie durable pour gérer les flux migratoires.