Le 28 juin 2016, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a fait savoir que l'analyse juridique faite par la Commission européenne considérait l'accord de libre-échange entre le Canada et l'UE (CETA) comme un accord purement européen, et non un accord mixte. Ainsi, les Parlements nationaux n'auraient pas à approuver l'accord qui passerait devant le seul Parlement européen et le Conseil. Le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, s'était aussitôt opposé à une telle issue. Il avait considéré que le CETA devait être un accord mixte et suggéré que le Luxembourg emprunterait les voies juridiques pour contester l'argumentation de la Commission au cas où celle-ci devait maintenir ce point de vue dans la proposition de ratification de l'accord avec le Canada, qu'elle devrait présenter le 5 juillet 2016.
La position du gouvernement luxembourgeois veille aussi à faire respecter les termes de la motion adoptée par la Chambre des députés le 7 juin 2016, favorables à la qualification du CETA comme accord mixte. Le 29 juin 2016, plusieurs partis luxembourgeois ont d'ailleurs réagi avec véhémence contre la décision de la Commission qu'ils jugent notamment à contre-courant des enseignements à tirer du Brexit.
Au micro de RTL radio, le député CSV, Claude Wiseler, a tenu à souligner qu'il s'agissait d'une décision du Collège des Commissaires, non de son seul président. Il a néanmoins considéré "logique" que le CETA soit classé comme un accord mixte.
Sur Facebook, le député LSAP, Alex Bodry a déclaré que Jean-Claude Juncker et sa commission n'avaient "rien compris". "Ce qui me surprend, c'est que malgré le Brexit, on veuille faire du 'business as usual' sur un sujet sensible dans de nombreux pays où l'opinion publique parle avec raison d'une série de points faibles. C'est imprudent", a-t-il ajouté au micro de RTL.
Sur Twitter, le ministre LSAP du Travail, Nicolas Schmit, a estimé que la décision de Juncker sur le CETA envoie un "mauvais message". Il a lui aussi pensé au Brexit : "Aucun référendum sur [l'UE] n'est gagnable, il est temps de s'interroger pourquoi", a-t-il en effet dit, en appelant à une réorientation de l'UE vers plus de social et plus de démocratie.
Pour le député DP, Berger Eugène, le Brexit a pourtant démontré que souvent les gens ne sont pas satisfaits de l'UE et de la Commission, et que leurs décisions sont éloignées des citoyens. "J'espérais que la Commission aurait appris quelque chose, le besoin d'impliquer davantage les citoyens et leurs représentants", dit-il.
Le parti Déi Gréng a réagi par un communiqué de presse, dans lequel il qualifie de "politique de l'autruche", le contournement des parlements nationaux envisagé par la Commission européenne. Une telle conception serait "non seulement absolument inacceptable mais représente également un grand danger pour l'UE en soi", a déclaré la députée verte, Viviane Loschetter.
"Des décisions comme celles d'hier ne feront qu'enfoncer un peu plus l'Europe dans la crise de confiance actuelle et éloignera encore davantage l'UE des citoyens. L'Union ne peut à long terme survivre que si les citoyens se reconnaissent de nouveau dans un projet commun européen et le portent", a dit le député Claude Adam, porte-parole de Déi Gréng pour les affaires européennes.
Déi Lénk, qui avaient été à l'origine du débat à la Chambre du 7 juin, parlent dans leur communiqué d'un "monde politique qui se prive lui-même de ses pouvoirs" au profit d'investisseurs que personne n'a élus. Ils voudraient que le gouvernement ne soumette pas seulement la décision de la Commission à un examen juridique, mais soumette l'ensemble de l'accord CETA à un examen pour juger de sa compatibilité avec les traités européens, et ce en demandant un avis dans ce sens à la Cour de Justice de l'UE, comme cela est prévu à l'article 218 du traité sur le fonctionnement de l'UE (TFUE).