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Entreprises et industrie - Environnement
L’avocat général de la CJUE estime que le Luxembourg peut exiger d’ArcelorMittal la restitution sans indemnité des quotas d’émission de gaz à effet de serre non utilisés dans la mesure où ils ont été attribués de manière indue
05-07-2016


CJUELe 5 juillet 2016, l’avocat général Manuel Campos Sánchez-Bordona a rendu ses conclusions dans l’affaire qui oppose ArcelorMittal et le gouvernement luxembourgeois. La Cour de Justice de l’Union européenne a en effet été saisie par la Cour constitutionnelle du Luxembourg afin de savoir si un État membre, en l’occurrence le Luxembourg, peut  exiger la restitution sans indemnité des quotas d’émission de gaz à effet de serre non utilisés par une entreprise, à savoir ArcelorMittal. Après la polémique suscitée en 2012 par l’octroi de quotas d’émission pour le site pourtant fermé de l’aciérie de Schifflange, le gouvernement avait en effet demandé la restitution de ces quotas alloués à titre gratuit. Une décision contestée par le géant de la sidérurgie. Pour l’avocat général, le Luxembourg peut exiger d’ArcelorMittal la restitution sans indemnité des quotas d’émission de gaz à effet de serre non utilisés dans la mesure où ils ont été attribués de manière indue.

À compter de la fin de l’année 2011, la société luxembourgeoise ArcelorMittal Rodange et Schifflange a décidé de fermer son aciérie de Schifflange pour une durée indéterminée. Cette décision n’a cependant été notifiée aux autorités luxembourgeoises que plusieurs mois après, une fois effectuée l’attribution des quotas d’émission de gaz à effet de serre pour 2012. Comme il n’était plus possible d’annuler les quotas attribués pour cette année, les autorités ont réclamé la restitution, sans indemnité, des quotas non utilisés par ArcelorMittal. La réglementation luxembourgeoise prévoit en effet que les autorités peuvent réclamer la restitution totale ou partielle des quotas non utilisés lorsqu’une cessation totale ou partielle de l’exploitation d’une installation leur est notifiée (cette notification devant s’effectuer immédiatement). ArcelorMittal conteste cette décision en justice.

Saisie de l’affaire, la Cour constitutionnelle du Luxembourg demandait à la Cour de justice si, au regard de la directive sur le système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, un État membre peut exiger d’une entreprise ayant cessé l’exploitation d’une installation la restitution, sans indemnité, des quotas non utilisés.

Dans ses conclusions présentées le 5 juillet 2016, l’avocat général Manuel Campos Sánchez-Bordona fait tout d’abord remarquer que, dès la suspension des activités de l’aciérie de Schifflange en 2011, ArcelorMittal était tenue d’en informer l’autorité compétente. Si elle l’avait fait dès ce stade, aucun quota correspondant à cette installation ne lui aurait été alloué pour l’année 2012. Si des quotas ont donc été alloués à cette installation pour 2012, c’est parce que l’autorité compétente ignorait la cessation de l’activité de l’aciérie.

Selon l’avocat général, la loi luxembourgeoise est compatible avec la directive dès lors que l’autorité compétente, informée de manière tardive de la cessation de l’exploitation d’une installation, exige la restitution des quotas alloués de manière erronée. Ainsi, l’injonction de restitution est légitime si, d’un point de vue chronologique, il n’est plus possible de demander l’annulation de l’allocation.

Par ailleurs, l’avocat général considère que la restitution de quotas indûment alloués ne saurait être qualifiée d’expropriation, comme le soutient ArcelorMittal. En effet, une telle restitution n’implique pas l’expropriation d’un bien qui est déjà devenu partie intégrante du patrimoine de l’exploitant, mais le retrait de l’acte d’allocation des quotas en raison du non-respect des conditions que cette allocation devait remplir conformément à la directive.

En résumé, l’avocat général propose à la Cour de répondre qu’un État membre peut exiger la restitution sans indemnité des quotas d’émission de gaz à effet de serre non utilisés par une entreprise, lorsque ces quotas ont été attribués de manière indue en raison d’une erreur de l’entreprise concernée.