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Parlement européen
Antonio Tajani est le nouveau président du Parlement européen
17-01-2017


pe-election-tajaniDans la soirée du 17 janvier 2017, le Parlement européen a élu son nouveau président,  pour la période 2017-2019, en la personne de l'eurodéputé PPE, Antonio Tajani.

Un président élu avec les voix des groupes PPE, ADLE et ECR

La fin annoncée de la grande coalition

A l'issue des trois premiers tours de scrutin, aucun candidat n'avait réussi à remporter la majorité absolue requise. Lors du quatrième et dernier tour de scrutin, à la majorité relative, l'ancien commissaire à l'industrie et vice-président de la Commission Barroso de 2010 à 2014 l'a emporté en réunissant 351 voix tandis que son dernier concurrent en lice, le candidat et président du groupe S&D, Gianni Pittella, en obtenait 282. 80 eurodéputés se sont abstenus, ce qui porte à 713 le nombre total de voix exprimées (sur 751 possibles).

Le nouveau président du Parlement européen, a pu compter sur les voix des groupes ALDE (68 députés) et ECR (74 députés). La "Grande coalition" réunissant les groupes PPE, S&D et ADLE, conclue par un accord du 24 juin 2014, avait volé en éclats après que le groupe S&D a choisi de ne pas donner suite au partage de la présidence scellé dans l'accord de 2014, qui prévoyait que le PPE endosse la présidence du Parlement après le départ du président issu de ses propres rangs, Martin Schulz.

Au matin de l'élection, les groupes PPE et l'ADLE se sont mis d'accord pour formze une coalition pro-européenne afin de réformer l'Europe, qui permit le retrait du candidat des libéraux, Guy Verhostad, au profit d'Antonio Tajani. "Nous voulons agir ensemble pour apporter des résultats aux citoyens européens et garantir la stabilité de l'Europe. Notre partenariat repose sur le contenu et sur les réformes pour l'Europe. C'est un pacte de résultats. Nous invitons toutes les forces pro-européennes à rejoindre notre partenariat", a déclaré le président du PPE, Manfred Weber, dans un communiqué de presse.

Dans une déclaration, le nouveau président a décrit une UE "en eaux troubles", pour laquelle "les solutions ne sont pas dans toujours plus d'Europe, mais pas non plus dans l'implosion du projet européen". "Ce n'est pas au président du PE de faire l'agenda politique", a-t-il dit, s'engageant à conduire une présidence "neutre", au service de tous les citoyens, “concentrée sur les choses qui importent vraiment : sécurité, migrations et emploi."

L'accord entre les groupes PPE et ADLE

Dans leur accord de coalition, ouvert au ralliement des autres groupes politiques, les groupes ADLE et le PPE proposent une coalition pro-européenne, qui mette "en échec les nationalistes et populistes [qui] tentent de détruire l'Union de l'intérieur et de l'extérieur".

Les deux groupes demandent au Conseil de l'UE et à la Commission européenne de lancer une réflexion commune et interinstitutionnelle sur l'avenir de l'Union européenne, qui envisage le lancement possible d'une Convention.

Pour renforcer la croissance, le développement durable et les investissements, ils demandent par ailleurs à la Commission de présenter des propositions législatives établissant "une nouvelle gouvernance économique dans l'Union européenne et en particulier dans la zone euro", sur la base du rapport dit "des cinq présidents". Ils veulent également que la réalisation du nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) post-2020 s'appuie sur le rapport, présenté le jour même à la Commission européenne, du groupe de haut niveau sur les ressources propres présidé par Mario Monti.

Ils citent également l'approfondissement du marché intérieur, la mise en œuvre de l'accord de Paris sur le climat, l'établissement d'un nouveau mécanisme sur la démocratie, l'état de droit et les droits fondamentaux, ainsi que le renforcement des capacités pour la sécurité intérieure et extérieure, notamment alimentée par les travaux menés par une commission d'enquête du PE.

Enfin, ils souhaitent faire en sorte d'assurer la pleine participation du Parlement européen aux négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l'UE, afin que soient pris en compte les intérêts des citoyens européens.

Les réactions au Parlement européen

Des groupes politiques

"Véritable pro-Européen, Antonio Tajani a consacré sa carrière politique à l'Europe. Il sera un partenaire fort et fiable pour l'ensemble du Parlement", a déclaré le président du Groupe PPE, Manfred Weber. "L'élection d'Antonio Tajani démontre que le Groupe PPE est le point d'ancrage du Parlement européen et la force avec laquelle les partenariats peuvent être construits. Le Groupe PPE garantit la stabilité de cette assemblée. Nous construisons des ponts et nous continuerons à le faire pour apporter des résultats aux citoyens européens" a Manfred Weber.

Président du groupe S&D, Gianni Pittella a félicité Antonio Tajani et s'est dit confiant dans le fait qu'il interprètera sa nouvelle fonction "dans le plein respect pour l'égalité des droits et des prérogatives de tous les groupes politiques et eurodéputés". Il a préféré voir "un fort de démocratie et de la vitalité" du Parlement dans le fait que c'est la première élection du président du Parlement depuis longtemps qui n'aurait "pas été arrangée à l'avance".

"Une nouvelle page est tournée. Aujourd'hui, le paysage politique au Parlement européen, est dramatiquement changé par la naissance d'un bloc conservateur. Nous nous y opposerons par le travail, dès demain, avec les autres forces progressistes. L'Europe a besoin d'un Parlement efficace et courageux, prêt à affronter les défis. Notre objectif, sera toujours le bien de l'Europe et des citoyens européens", a prévenu Gianni Pitella.

Pour l'ECR qui a apporté ses voix à Antonio Tajani, Syed Kamall a expliqué avoir été satisfait par les garanties claires que Antonio Tajani agira comme le présdient neutre du Parlement, et non comme un Premier ministre." Il explique que l'ECR ne voulait pas signer l'accord du PPE et de l'ADLE, mais se dit prêt à travailler avec tout groupe politique qui soutient les réformes sur les principes de la déclaration de Prague. "Si nous pouvons maintenant travailler pour former à l'avenir une coalition de centre-droit sur les questions économiques ce ne peut qu'être positif pour l'économie de l'UE."

Pour le groupe Verts-ALE, Philippe Lamberts a déclaré que la fin de la Grande coalition n'était que "temporaire" et parié que le groupe S&D allait bientôt travailler, avec les groupes PPE et ADLE, à l'adoption du CETA notamment. Pour cause, les écologistes n'ont pas réussi à obtenir de Gianni Pitella, en échange de leur soutien, l'engagement à ce que le groupe S&D vote dans sa totalité avec eux un recours devant la Cour de Justice de l'UE pour examiner la compatibilité du CETA avec le droit européen, ainsi que l'eurodéputé l'a fait savoir dans une déclaration publiée sur les réseaux sociaux.

La président du groupe GUE/NGL Gabi Zimmer MEP a dit la déception de son groupe, qui a toujours été "critique envers les accords en coulisse et les politiques de grande coalition", tels celui conclu entre le PPE et l'ADLE qui a permis l'élection d'un présiddent PPE. "En raison de son rôle passé au sein de la Commission européenne, qui n'a pas vu le scandale du 'dieselgate' et ses positions sur l'égalité des sexes", le groupe GUE-NGL estimait que c'était un candidat "inadapté". Le groupe; qui a apporté ses voix au candidat S&D, voit dans ce vote "un tournant avec la fin de la Grande coalition" et s'engage à collaborer avec les forces progressives car "l'Europe, plus que jamais, a besoin d'une voix forte à gauche pour contrer le populisme de droite".

Des eurodéputés luxembourgeois

Du côté du groupe PPE, Georges Bach a déploré, dans un communiqué de presse, la rupture de la grande coalition et le retour à une politique droite-gauche. "Moi par exemple, au sein de la commission emploi et affaires sociales, je travaille très bien avec les socialistes", a-t-il dit, en assurant que son groupe resté ouvert à travailler avec toutes les fractions pro-européennes. Nonobstant les critiques, Antonio Tajani est un "homme avec une riche expérience pour cette fonction importante", dit également, Georges Bach, qui voit comme un signe important que le président du Parlement vienne du Sud de l'Europe, "qui a beaucoup souffert, aussi bien de la crise économique que de la crise migratoire".

"Le Parlement européen doit réunir la gauche et la droite et non pas les diviser. Il n'y a pas de clivage gauche-droite en Europe, il n'y a que des pro ou des antieuropéens. S'il faut bâtir une coalition au cas par cas, cela va devenir plus compliqué", a pour sa part déclaré Viviane Reding dans les colonnes du Quotidien. L'ancienne commissaire européenne aux côtés d'Antonio Tajani craint que le rapport de force avec le Conseil soit en défaveur du Parlement : "Le Parlement a le pouvoir de codécision, il ne peut être fort face au Conseil que s'il est uni, c'est dans l'intérêt des citoyens", dit-elle.

Fränk Engel a lui aussi déploré, au micro de RTL que l'accord de 2014 n'ait pas été respecté par le groupe S&D et que Gianni Pitella ait congédié la grande coalition. Il s'est demandé quel en était le but, alors que le Parlement n'est "pas gérable" sans la grande coalition, car la coalition actuelle est trop éloignée d'une majorité absolue.

Interrogée par Le Quotidien, l'eurodéputée S&D, Mady Delvaux, juge au contraire tout à fait justifié que le groupe S&D ait refusé son soutien au candidat du PPE, alors que ceux de présidents du Conseil et de la Commission sont allés au groupe PPE qui "certes, a la plupart des votes, mais pas beaucoup plus que le deuxième parti".

L'eurodéputée socialiste relativise par ailleurs, vu du terrain, les désavantages de l'absence d'une grande coalition sur le terrain. "La grande coalition c'est bien pour l'entente entre les dirigeants de parti, mais je siège dans ce Parlement depuis deux ans et demi et je vois que sur les dossiers sur lesquels je travaille au jour le jour, à chaque fois je dois aller chercher une majorité."

Regrettant que l'élection ait tournée en "une question d'ego de quelques hommes d'un certain âge", elle a estimé que ni Tajani, proche de Berlusconi, ni Gianni Pittella, n'étaient des candidats qui font rêver et qu' "une bonne candidate libérale" aurait pu l'emporter si Guy Verhofstad avait laissé sa place.

Membre du groupe ADLE, Charles Goerens, avait espéré que cette élection soit "un sursaut", dont il sortirait un "message fort, porteur d'avenir et susceptible de sortir l'Europe de sa polycrise". Au contraire, la seconde moitié de la présente législature commencera "avec un handicap supplémentaire", constate-t-il en référence à "l'absence d'une majorité suffisamment solide pour s'engager dans un esprit de solidarité face aux trois crises" qu'il identifie comme des défis à l'UE : la problématique de l'immigration, celle liée au Brexit et l'amélioration du fonctionnement de l'UE.

Il plaide pour que les "forces politiques responsables" au Parlement européen, à savoir le Parti Populaire Européen, les Socialistes & Démocrates, les Libéraux et les Verts, unissent leurs efforts pour donner une réponse européenne à ces grands défis. "Comme le Président Tajani a annoncé vouloir être un président neutre, il faut espérer que les Présidents des quatre groupes précités seront à même de s'organiser en vue de forger une majorité susceptible d'avancer sur les grands dossiers", a-t-il déclaré dans un communiqué de presse.

Dans une déclaration reprise par RTL, l'eurodéputé Verts-ALE, Claude Turmes, a déploré que cette élection ait été une occasion manquée "pour qu'une forte coalition de centre-gauche forte et progressiste introduise un vrai changement politique au Parlement européen". Il a jugé décevant que ce soit un ancien protégé de Berlusconi qui arrive à ce poste à la faveur d'une alliance entre libéraux, conservateurs et eurosceptiques mais a en même temps déploré que les sociaux-démocrates n'aient pas réussi à "proposer une alternative crédible et à organiser la majorité nécessaire."