Principaux portails publics  |     | 

Semestre européen
Semestre européen 2017 – Dans son paquet d’hiver, la Commission décrit les défis que devront affronter les pays de l’UE dans des rapports par pays qui seront discutés avant la rédaction des recommandations en mai
22-02-2017


La Commission européenne a lancé le semestre européen 2017 le 16 novembre 2016La Commission européenne a publié le 22 février 2017 son analyse annuelle de la situation économique et sociale dans les États membres, à savoir les "rapports par pays". Ces rapports rédigés dans le cadre du semestre européen 2017 sont désormais publiés dès le mois de février de façon à suivre les réformes entreprises et à signaler à un stade précoce les défis que les Etats membres doivent relever. Ils vont donc servir de base au dialogue avec les États membres en vue de l’adoption, en avril, de leur programme national de réforme et leur programme de stabilité (pour les pays de la zone euro) ou de convergence (pour les pays hors zone euro), et conduiront à la formulation, à la fin du printemps, des recommandations par pays de la Commission.

Pour 13 États membres recensés dans le rapport 2017 sur le mécanisme d'alerte publié en novembre parallèlement à l’examen annuel de la croissance, les rapports par pays contiennent également le bilan approfondi réalisé dans le cadre de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques. Il en ressort que la Bulgarie, Chypre, la Croatie, la France, l'Italie et le Portugal présentent des déséquilibres économiques excessifs, tandis que l'Allemagne, l'Espagne, l'Irlande, les Pays-Bas, la Slovénie et la Suède présentent des déséquilibres économiques. A l’issue de cet examen approfondi, seule la Finlande ne présente pas de déséquilibre économique.

Dans le rapport consacré au Luxembourg, qui, comme les autres, reste un document de travail de la Commission et fera donc l’objet de discussions avant la formulation de nouvelles recommandations, les services de la Commission commencent par faire le point sur la situation économique du Grand-Duché à la lumière de l’examen annuel de la croissance publié le 16 novembre 2016 par la Commission européenne, qui a invité les États membres de l’UE à redoubler d’efforts sur les trois éléments du triangle vertueux de la politique économique: stimuler l’investissement, mener des réformes structurelles et garantir des politiques budgétaires responsables. Ce faisant, les États membres devraient mettre l’accent sur l’amélioration de l’équité sociale, de manière à générer une croissance plus inclusive.

La Commission se base notamment sur les prévisions d’hiver de la Commission et relève que l’économie du Luxembourg a fortement rebondi depuis le début de la crise financière et devrait continuer de bénéficier de cette forte dynamique dans les années à venir puisque, après 3,8 % en 2016, la croissance du PIB devrait atteindre 4,0 % en 2017, puis revenir à 3,9 % en 2018, proche des niveaux d’avant la crise, mais toujours en dessous de ceux-ci. La demande intérieure devrait remplacer les exportations nettes en tant que principal moteur de la croissance, note la Commission, qui observe que la croissance continue de s’accompagner d’une création d’emplois soutenue. Conséquence, le chômage continue de diminuer, mais à un rythme plus lent que prévu, la forte création d’emplois profitant davantage aux travailleurs frontaliers qu’aux résidents. Une très faible inflation a contribué à une évolution salariale modérée, observe encore la Commission, qui est d’avis que "la faible progression des salaires et à la hausse de la production" ont permis de "compenser certaines pertes antérieures de compétitivité en matière de coûts".

La Commission note une fois de plus des progrès limités dans la mise en œuvre des recommandations par pays de 2016

Comme l’an passé, la Commission estime que le Luxembourg a accompli des progrès limités dans la mise en œuvre des recommandations par pays de 2016. Ces deux recommandations portaient sur la viabilité des finances publiques et sur la levée des obstacles à l’investissement et à l’innovation.

Selon les services de la Commission, le Luxembourg "n’a guère progressé sur le front de la viabilité des finances publiques : en particulier, si une loi concernant le reclassement des salariés atteints d’un handicap et visant à les maintenir dans l’emploi a été mise en œuvre,  la loi limitant les départs anticipés à la retraite n’a toujours pas été adoptée". "Aucun progrès n’a été enregistré en ce qui concerne l’alignement de l’âge légal de la retraite sur l’évolution de l’espérance de vie", note encore la Commission.

"Des progrès limités ont été accomplis dans l’élimination des obstacles à l’investissement et à l’innovation qui constituent un frein au développement économique des entreprises.", estiment par ailleurs les services de la Commission qui relèvent toutefois "certains progrès pour ce qui est de la suppression des goulets d’étranglement qui freinent les investissements dans le logement". "Néanmoins,  compte tenu de la hausse prévue de la population, les défis qui attendent les autorités luxembourgeoises restent de taille", observe la Commission.

En ce qui concerne les progrès dans la réalisation des objectifs nationaux au titre de la stratégie Europe 2020, le Luxembourg obtient de bons résultats dans les domaines de l’emploi, des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique, de la réduction du décrochage scolaire et de l’amélioration du nombre de diplômés de l’enseignement supérieur, juge la Commission. Par contre, le Luxembourg est encore loin d’atteindre ses objectifs pour les investissements dans la recherche et le développement (R&D), la diminution des émissions de gaz à effet de serre et la réduction de la pauvreté, note-t-elle encore.

La Commission identifie un certain nombre de défis à relever

La Commission dresse ensuite une liste des défis auxquelles font face les autorités luxembourgeoises.

En toute logique, les préoccupations de la Commission quant à la viabilité à long terme des finances publiques persistent, en raison de la hausse attendue du coût du vieillissement. Si le régime de pension reste excédentaire et a accumulé des réserves substantielles, en grande partie du fait de l’augmentation constante de la main-d’œuvre, la Commission s’appuie sur  les conclusions de l’examen du régime d’assurance pension réalisé en novembre 2016 pour faire part de ses inquiétudes, étant donné que le solde annuel du régime devrait devenir négatif d’ici 2023. Les dépenses au titre des pensions devraient augmenter de 3,3 points de pourcentage du PIB jusqu’en 2040, ce qui, note la Commission représente la deuxième plus forte hausse de l’UE, la moyenne de l’UE étant de 0,4 point de pourcentage du PIB. Dans des conditions moins favorables du point de vue démographique et de l’évolution du marché du travail, les déficits futurs seraient plus importants encore, s’inquiète encore la Commission. Ses services notent aussi que les soins de longue durée vont poser d’autres défis pour la viabilité des finances publiques : les projections font état d’une forte hausse des dépenses, qui devraient plus que doubler par rapport à leur valeur actuelle, en pourcentage du PIB.

Autre défi relevé par la Commission, bien connu des résidents luxembourgeois, la demande de logements continue de dépasser l’offre, entraînant une forte  augmentation des prix de l’immobilier. "Le nombre de logements bâtis reste inférieur à ce qui serait nécessaire pour répondre à la demande d’une population en hausse constante", constate la Commission qui estime qu’un nombre insuffisant de terrains disponibles ou l’incapacité de les mobiliser semble constituer le principal obstacle à la construction de nouveaux logements. Or, s’inquiète la Commission, "en raison du niveau élevé et croissant des prix de l’immobilier, ainsi que de politiques favorisant la propriété, le Luxembourg risque de devenir peu attrayant comme lieu de résidence, ce qui réduirait sa capacité d’attirer et de conserver une main-d’œuvre très qualifiée, composée en grande partie de ressortissants étrangers". Sans compter que cette situation risque d’aggraver les problèmes d’embouteillages et de pollution atmosphérique, est-il encore relevé dans le rapport.

La Commission souligne que le Luxembourg possède un secteur financier sain, pour lequel les risques peuvent être qualifiés de limités. Dans un proche avenir, les évolutions dans le secteur financier devraient continuer à avoir d’importantes répercussions sur les performances économiques du pays, estime la Commission qui ne perd pas de vue qu’un solide cadre de surveillance financière est essentiel pour assurer la résilience du secteur. "Le Luxembourg est bien placé pour tirer parti de l’union bancaire de l’UE, qui offrira un cadre réglementaire européen amélioré et plus intégré", souligne la Commission.

Se penchant sur l’endettement des ménages, qui a augmenté au cours des dix dernières années pour atteindre un niveau proche de la moyenne de la zone euro en pourcentage du PIB, la Commission explique que des conditions de prêt favorables et la faiblesse des taux d’intérêt ont soutenu une forte hausse des crédits hypothécaires. "L’évolution du marché immobilier et la concentration des activités de crédit hypothécaire dans quelques banques seulement comportent des risques pour le secteur financier", relève la Commission qui observe toutefois aussi que des facteurs favorables, tels qu’une bonne capitalisation des banques et une faible proportion de créances improductives, font qu’elle juge limités les risques directs que l’immobilier résidentiel fait peser sur le système bancaire.

Pour autant, la Commission continue de penser que "la réduction de la dépendance de l’économie vis-à-vis du secteur financier reste un défi de taille à long terme". "La réussite de la stratégie de diversification est susceptible d’être conditionnée par un certain nombre de facteurs, tels que l’innovation et l’esprit d’entreprise", observe la Commission qui estime aussi que l’évolution du coût de la main-d’œuvre joue également un rôle dans des secteurs plus sensibles aux prix, ce qui risque de limiter la diversité des secteurs qui peuvent être ciblés à ceux à forte valeur ajoutée.

La Commission constate par ailleurs que l’investissement privé, en particulier dans les actifs incorporels, reste inférieur à la moyenne de la zone euro, ce qui pourrait "nuire aux perspectives de croissance car ce faible niveau d’investissement affaiblit l’innovation et la productivité". L’intensité de R&D des entreprises est en baisse, constate encore la Commission. "Cette situation, qui s’ajoute à un niveau élevé de restrictions dans la législation régissant le secteur des services, et notamment les services aux entreprises, limite le potentiel d’innovation et fait obstacle à la diversification", relève encore la Commission.

En ce qui concerne le marché du travail, la Commission constate de bons résultats, avec une croissance de l’emploi constante et un taux de chômage qui compte parmi les plus bas de l’UE, mais est d’avis qu’il reste encore des défis à relever pour certaines catégories de personnes, et notamment les travailleurs âgés et les femmes, dans une moindre mesure. "Les personnes âgées et les travailleurs peu qualifiés sont plus susceptibles d’être au chômage", constate la Commission qui explique ce phénomène en partie par la structure économique du pays, qui se caractérise par une évolution à long terme vers des secteurs hautement qualifiés et par une forte spécialisation dans les services financiers et les services aux entreprises. Les risques de pauvreté et d’exclusion sociale augmentent mais demeurent parmi les plus faibles de l’UE, note la Commission qui ne perd pas de vue que les transferts sociaux restent toutefois essentiels pour la sortie de la pauvreté. Le système de prélèvements et de prestations a contribué à maintenir les inégalités de revenus à des niveaux modérés, a-t-elle ainsi constaté.

Les services de la Commission observant par ailleurs que malgré une proportion très élevée de diplômés de l’enseignement supérieur, les comparaisons internationales indiquent que les performances dans les compétences de base sont faibles et se sont dégradées depuis 2012. "L’influence de la situation socio-économique des élèves sur leurs résultats est l’une des plus fortes de l’UE, ce qui indique un haut niveau d’inégalités dans l’éducation", commente la Commission qui est d’avis que l’adaptation de l’enseignement et de la formation professionnels aux besoins du marché du travail reste une gageure.

Si les finances publiques sont jugées saines, les services de la Commission relèvent toutefois qu’une  partie de la marge budgétaire disponible a été utilisée pour mettre en œuvre une réforme fiscale qui vise à accroître l’équité et la compétitivité tout en préservant la durabilité. "Certaines caractéristiques du système fiscal luxembourgeois restent sensibles à des initiatives internationales de lutte contre l’évasion fiscale", observe la Commission, qui constate que la réforme fiscale a réduit l’assiette fiscale. Les services de la Commission notent encore que le niveau d’imposition des biens immobiliers est peu élevé, ce qui semble contribuer à une faible offre de logements. De même, la faible taxation des carburants est dans le viseur de la Commission qui est d’avis qu’elle  aggrave les embouteillages et risque de contrecarrer les efforts déployés pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 et investir dans des ressources énergétiques moins polluantes. Enfin, la Commission note que le Luxembourg ne dispose pas, dans sa procédure budgétaire, d’un mécanisme d’examen régulier des dépenses, qui pourrait accroître l’efficience des dépenses publiques.