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Emploi et politique sociale
Les syndicats luxembourgeois vont appeler la Chambre des députés à se prononcer contre le compromis sur la directive temps de travail
09-10-2008


Viviane GoergenLe Secrétariat européen commun de la CGT-L (OGBL/FNCTTFEL) et du LCGB a tenu le 8 octobre 2008 une conférence de presse sur les "nouveaux développements au niveau de la mise en œuvre de la révision récente de la directive européenne sur le temps de travail".

Viviane Goergen du LCGB et Nico Clement de l’OGBL ont pointé vers les trois problèmes que la révision de cette directive a soulevés : le temps de garde, le temps de référence et la possibilité de l’opt-out dans tous les Etats membres par rapport à la limite de 48 heures de temps de travail hebdomadaire.

Le temps de garde était considéré comme du temps de travail avant le compromis. "Maintenant, le temps de garde n’est considéré ni comme du temps de travail, ni comme du temps de repos, ce qui serait encore pire", s’est exclamé Nico Clement.

L’opt-out, de la directive de 1993 à la proposition  actuelle

L’opt-out est pratiqué dans l’Union européenne depuis 1993, date à laquelle la première directive (93/104/CE) sur le temps de travail, qui vaut toujours, est entrée en vigueur. Mais il se limitait au Royaume-Uni. Elle permet uniquement aux travailleurs de ce pays de travailler plus de 48 heures hebdomadaires s’il y a accord avec le patron.

La proposition de directive 2003/88/CE qui est en discussion depuis fin 2003 et qui a soulevé un grand émoi dans le monde syndical permet théoriquement, si les lois du travail nationales le permettent, un opt-out sur le temps de travail dans tous les pays de l’Union européenne. Le temps de travail peut alors être étendu à 60 respectivement 65 heures hebdomadaires moyennes sur une période de trois mois, s’il y a oui ou non une convention collective qui règle les relations entre partenaires sociaux.   

Pas d’accord avec le compromis actuel et la position de François Biltgen

Du point de vue de la procédure, 20 Etats membres ont approuvé le 15 septembre 2008 le compromis du 9 juin 2008, 5 se sont abstenus et 2 ont voté contre, la Grèce et l’Espagne. Le Luxembourg avait voté pour le compromis, et le ministre du Travail et de l’Emploi François Biltgen s’en était longuement expliqué. Il avait estimé en juin 2008 que l'encadrement de l'exception de l'opt-out et l’instauration d’une limite hebdomadaire de 60 heures était nettement plus favorable aux travailleurs que les dispositions de la directive de 1993, qui ne contenaient aucune limite maximale en matière de temps de travail hebdomadaire. Par ailleurs, il avait souligné que le projet de directive devait être approuvé en codécision avec le Parlement européen et que le Parlement européen actuel voulait aller plus loin que le Conseil en matière de fin éventuelle des exceptions au principe des 48 heures de travail hebdomadaire.

Les syndicats luxembourgeois ne sont pas d’accord avec cette position. L’adoption d’une directive amendée en 2e lecture par le Parlement européen requiert une majorité absolue dont ils doutent qu’elle puisse être atteinte. Leurs entretiens avec les eurodéputés luxembourgeois n’ont pas été très probants, même si Viviane Goergen et Nico Clement  n’ont pas été très explicites.

Nico GoergenL’adoption de la directive exercera forcément selon eux une pression indirecte sur une législation luxembourgeoise du travail favorable aux travailleurs. "Les arrêts de la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) Laval, Viking et contre le Luxembourg en matière de détachement des travailleurs montrent que des instances communautaires peuvent s’attaquer à des législations nationales que les syndicats considèrent comme positives. Dans une économie de la libre circulation des services, l’actuel compromis sur la directive sur le temps de travail affaiblit notre système à moyen terme, si quelques grands pays décident de passer à l’opt-out. Ce qui se passe à Bruxelles, mais pas seulement à Bruxelles, affaiblit la loi nationale luxembourgeoise", a remarqué Nico Clement. Et Viviane Goergen a ajouté : "Un arrêt de la CJCE peut venir changer la donne nationale."

L’appel à la Chambre des députés

C’est pourquoi les syndicats luxembourgeois feront appel à la Chambre des députés pour qu’elle se prononce, à l’instar du Congrès des députés espagnols, contre l’extension du temps de travail dans la directive temps de travail. Ils lanceront cet appel de concert avec d’autres syndicats affiliés à la Confédération européenne des syndicats (CES), qui s’adresseront également à leurs parlements nationaux. Une telle résolution ou motion parlementaire aurait avant tout un caractère symbolique, puisque la procédure législative se déroule dans le cadre strictement européen de la codécision du Conseil et du Parlement européen. Mais les syndicats se sont dits convaincus que le Parlement européen ne pourrait pas ne pas tenir compte de la position d’un nombre significatif de parlements nationaux.