Dans le cadre des élections européennes et nationales, l’ADR a précisé, le 27 mars 2009, lors d’une conférence de presse, ses vues sur "un Luxembourg fort dans l’Europe". Il fut aussi question d’identité, de souveraineté et d’intégration, ainsi que de droit de vote, concepts que cette formation politique associe à l’idée qu’elle se fait d’un Grand-Duché ancré dans l’UE.
Le député Robert Mehlen, candidat aux élections législatives et européennes, a déclaré en guise d’entrée en matière que s’il n’est plus possible d’agir selon la devise nationale "Mir wëlle bleiwe wat mir sin" (Nous voulons rester ce que nous sommes), il faut cependant pouvoir dire :"Mir wëllen erhale, wat mir hun."(Nous voulons préserver ce que nous avons.). D’où la revendication de l’ADR d’un Luxembourg et d’une Europe forts, mais aussi d’un Luxembourg fort dans l’Europe.
La doctrine de l’ADR sur le Luxembourg et l’Europe se décline autour de quelques mots-clés.
Souveraineté : L’ADR s’oppose à de nouveaux abandons de droits souverains au sein de l’UE. L’UE ne doit avoir aucun droit sur les questions de droits civil, pénal, fiscal, familial. Les domaines de la santé, de l’éducation, les questions religieuses et morales, celles liées à la cohésion sociale et à l’organisation interne de la communauté nationale relèvent de la souveraineté nationale.
Europe des nations : L’ADR est contre des institutions européennes qui se comportent comme un gouvernement européen et se prononce pour le renforcement du pouvoir des parlements nationaux. Dans cette optique, l’ADR est membre du groupe politique européen "Union pour l’Europe des nations" (UEN). Celui-ci regroupe avant tout des députés européens venant de formations eurosceptiques, conservatrices et souverainistes comme la Lega Nord et l’Alleanza nazionale italiennes, les partis de la droite extrême polonaise, les partis nationalistes letton "Patrie et Liberté" et estonien "Union du peuple estonie", le Fianna Fail irlandais, le Parti populaire danois, ce qui le situe très à droite de l’échiquier politique. et
Pour Gaston Gibéryen, député et lui aussi candidat aux élections nationales et européennes, ce qui rassemble ces partis, c’est leur opposition à une Europe fédérale. Mais ils ne sont pas unis "dans le détail", explique le député. "Par rapport à ce qu’ils font chez eux, chacun garde sa liberté et l’un vis-à-vis de l’autre aussi ses distances". D’ici au 7 juin 2009, la composition du groupe UEN peut changer. Pour illustrer son propos, il a cité l’exemple de l’Alleanza nazionale italienne (AN), qui était néo-fasciste, qui dit ne plus l’être, qui vient de s’auto-dissoudre pour fusionner avec le parti Forza Italia de Silvio Berlusconi, membre quant à lui du PPE, dont le CSV fait également partie. "Fort possible que les députés de l’ancienne AN fassent partie après le 7 juin du PPE."
Démocratie : L’ADR exige dorénavant que tout élargissement soit soumis au Luxembourg à un référendum conformément à l’article 114 de la Constitution.
Europe sociale : Pour l’ADR, l’Europe a été trop unilatéralement axée sur les libertés économiques, et sa dimension sociale a été négligée. D’où, selon Robert Mehlen, l’échec du Traité constitutionnel. L’ADR exige donc que des normes sociales minimales soient fixées pour qu’un équilibre soit créé entre les dimensions économique et sociale de l’Europe qui pourrait aller jusqu’à une harmonisation vers le haut de ces normes et du droit social et du travail dans l’UE.
L’identité : Ici il s’agit, selon Mehlen, "d’un regard vers l’intérieur". Avec sa défense des intérêts luxembourgeois en Europe, sa revendication du renforcement des Parlements nationaux, l’ADR s’engage selon Mehlen "comme aucun autre parti luxembourgeois pour le maintien de la souveraineté et de l’identité luxembourgeoises dans l'UE." Cela est d’autant plus nécessaire pour le député ADR que le pays compte selon lui plus de 40 % d’étrangers sur son territoire et que 44 % de la population active sont des non-résidents. "Cette situation unique en Europe constitue un véritable défi à la cohésion sociale. Ce défi est « l’intégration qui permette à ces personnes de vivre ensemble de manière harmonieuse et de manière telle que tout le monde garde son identité culturelle". Mais, et c’est là-dessus que l’ADR met l’emphase, "la langue luxembourgeoise est ce que tout ce monde doit avoir en commun". L’usage du luxembourgeois doit devenir une évidence pour tous "comme signe de respect pour l’identité luxembourgeoise." D’où la revendication que des moyens doivent être créés pour que chacun des 15 000 nouveaux arrivants par an dans le pays puisse apprendre la langue nationale.
A la question s’il pouvait définir l’identité luxembourgeoise, Robert Mehlen a répondu "qu’il y a 50 ans, l’identité luxembourgeoise était assurément différente. Mais il s’agit d’une certaine manière de vivre ensemble, qui est différente de celle des Français et des Allemands. Ce n’est pas facile à définir, mais cela a à voir avec notre langue, notre culture, nos traditions, nos coutumes, notre histoire, et assurément avec la genèse de notre Etat, qui est à l’origine de notre nation, quand il a dû s’affirmer et résister face aux invasions."
Langue : La langue luxembourgeoise doit donc être ancrée selon l’ADR dans la Constitution et devenir par ailleurs une matière obligatoire de l’enseignement secondaire. D’autre part, les enfants des nouveaux arrivants doivent être placés d’office dans des classes d’accueil pour un an. Les entreprises qui organisent des cours de langue nationale doivent être soutenues.
Fonction publique : Elle ne doit être accessible qu’aux nationaux. L’ADR s’oppose à une ouverture aux citoyens de l’UE et aux autres non-Luxembourgeois.
Immigration et intégration : Les nouveaux arrivants au Luxembourg, "qui de préférence devraient être de culture européenne", doivent être incités à faire des efforts d’intégration. Si leur apport peut constituer une richesse culturelle, « priorité » doit cependant être donnée selon Robert Mehlen "à la protection de nos coutumes, de nos traditions et de notre culture au bénéfice de notre cohésion sociale". La deuxième génération d’immigrants doit avoir les mêmes chances que les Luxembourgeois. Ce qui n’est pas le cas selon l’ADR.
Nationalité : L’ADR ne veut pas que l’on brade la nationalité luxembourgeoise. Il reste opposé à la double nationalité. "Une seule nationalité, la nationalité luxembourgeoise, est l’aboutissement de l’intégration dans notre pays", pense Robert Mehlen. Et pour l’obtenir, il faut bien savoir parler la langue nationale. "Sans la pression de l’ADR", ajoute Gaston Gibéryen, "cet aspect-là des choses n’aurait pas été pris en considération." Car pour l’ADR, ne peut demander à participer à la chose publique que celui qui comprend le discours politique. Et ce discours politique se fait en luxembourgeois.
Droit de vote : Alors que la plupart des partis bougent sur les droits politiques des autres ressortissants de l’UE, allant pour certains jusqu’à prôner (Déi Gréng), à envisager (LSAP) ou à vouloir étudier la possibilité (DP) d’une dévolution du droit de vote national, l’ADR est pour le statu quo.
"Pour un Luxembourg fort en Europe, pour autant d’Union européenne que nécessaire et autant de Luxembourg que possible", fut la conclusion de Robert Mehlen qui ajouta : "Nous sommes pour plus d’immigration, mais aussi pour une politique d’intégration qui place la langue nationale au centre, qui donne une chance aux enfants d’immigrés et qui protège l’identité luxembourgeoise avec les nouveaux arrivants."