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Avant le G20 de Pittsburgh : Accord de l’Union européenne sur les principes d’une réforme du système financier international et sur la lutte contre le changement climatique
Jean-Claude Juncker ne croit pas qu’un accord puisse être obtenu avec les Etats-Unis sur les bonus des managers
17-09-2009


Jean-Claude Juncker et Fredrik Reinfeldt © Communautés européennesLe Conseil européen informel du 17 septembre 2009, censé coordonner les positions des Etats membres de l’UE au G20 de Pittsburgh, n’aura pas seulement été le Conseil européen sur les bonus des managers, les nouvelles exigences en matière de capital propre adressées aux banques, le renforcement de la surveillance bancaire et la réduction des dettes. Il a aussi été question d’emploi, de lutte contre le changement climatique et de sécurité énergétique.

Le souci essentiel des chefs d’Etat et de gouvernement était que le G20 permette la poursuite "d'actions coordonnées afin d'établir les fondements d'une croissance durable et d'éviter que la crise financière ne se reproduise." D’où aussi le souhait que "les politiques budgétaires [soient] progressivement réorientées vers la viabilité à long terme des finances publiques."

Le Conseil européen juge qu’il "est important de renforcer la coordination macroéconomique mondiale", et que dans cette coordination, "le Fonds Monétaire International (FMI) devrait jouer un rôle central". Ils voudraient qu’une "charte pour une gouvernance économique durable" voie le jour, qui réaffirme "les principes de responsabilité, de viabilité à long terme et de transparence".

La priorité à l’emploi

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont, au-delà des bonus des managers, il faut le préciser, voulu "donner la priorité à l'emploi" qui passe par "une accélération des réformes structurelles". Maintien de l'emploi, création d'emplois, promotion de la mobilité, amélioration des compétences, mise en correspondance des compétences et des besoins du marché du travail, et amélioration de l'accès à l'emploi sont des champs où, selon eux, des mesures doivent être prises.

La réforme du secteur bancaire

Les engagements pris en faveur de la réforme des marchés financiers doivent selon le Conseil européen être rapidement mis en œuvre. Les points retenus sont

  • un système de contrôle macroprudentiel coordonné à l'échelle mondiale, fondé sur une coopération étroite entre le FMI, le CSF et les autorités de surveillance, comportant un véritable échange d'informations
  • l’adoption par les pays du G20 du cadre établi par l'Accord de Bâle II sur les fonds propres, de manière cohérente et coordonnée, un accord dont "les lacunes (...) doivent être comblées"

  • un jeu unique de normes comptables mondiales de haute qualité
  • le renforcement de la  surveillance des institutions financières présentant une importance systémique, en accroissant les obligations réglementaires et prudentielles qui leur sont imposées (entre autres par des tests de tension, des plans d'urgence et des tampons de capitaux adaptés)

  • l'amélioration de la qualité de la surveillance transfrontière

Par ailleurs, la décision prise au G20 de Londres de prendre des mesures de rétorsion contre les pays ou territoires qui ne coopèrent pas "doit être intégralement mise en œuvre".

La question des bonus ou comment "promouvoir des pratiques de rémunération responsables dans le secteur financier"

L’UE27 voudrait que "le G20 respecte l'engagement pris à Londres concernant les rémunérations afin de favoriser une gestion saine des risques et un lien étroit entre les rémunérations et les performances à long terme, tout en assurant des conditions équitables."

Le Conseil européen voudrait, "en particulier" que "le G20 devrait s'engager à arrêter, pour les institutions financières, des règles contraignantes sur les rémunérations variables, soutenues par la menace de sanctions au niveau national, portant sur les principes suivants :

a) améliorer la gouvernance afin de garantir un contrôle approprié des rémunérations et des risques par les conseils d'administration

b) renforcer la transparence et les obligations de publication

c) fixer les rémunérations variables, y compris les bonus, à un niveau approprié par rapport à la rémunération fixe et les faire dépendre des performances de la banque, des lignes de métier et des personnes, en prenant dûment en compte les développements négatifs, de façon à éviter les bonus garantis; en cas de rémunérations variables élevées, le paiement d'une part importante des rémunérations doit être différé et n'intervenir qu'au terme d'un délai approprié et pourrait être annulé lorsque les résultats de la banque connaissent une évolution négative

d) empêcher que des stocks options ne soient exercées, et que des actions reçues ne soient vendues, pendant une période appropriée

e) empêcher que les dirigeants et les cadres ne soient totalement immunisés contre les risques

f) donner aux conseils de surveillance les moyens de réduire les rémunérations en cas d'évolution négative de la performance de la banque

g) examiner les moyens de limiter le montant total des rémunérations variables dans une banque à un certain pourcentage des rémunérations totales ou des revenus et/ou des profits de la banque"

Renforcer les institutions financières internationales

Pour doter les nouveaux accords d'emprunt (NAE) du FMI de 500 milliards de dollars supplémentaires, ce qui avait été décidé en avril, "les États membres de l'UE sont disposés à fournir jusqu'à 50 milliards d'euros supplémentaires, soit au total jusqu'à 125 milliards d'euros, ce qui représente 35 % de l'augmentation des NAE".

Des feuilles de route pour la réforme de la gouvernance du FMI devraient également être arrêtées à Pittsburgh et "la réforme de la Banque mondiale (…) achevée pour le printemps 2010."

L’UE est d’avis que "la taille actuelle du conseil d'administration du FMI reflète raisonnablement le compromis entre ouverture et légitimité, d'une part, et efficacité de fonctionnement, d'autre part". Pour l’UE, les réformes envisagées "devraient permettre aux pays sous-représentés d'être davantage entendus et augmenter leurs quotes-parts et leur représentation sur la base de critères objectifs tenant compte des changements que connaît l'économie mondiale." Une capitalisation des banques multilatérales de développement va de pair avec ces réformes, afin que celles–ci puissent "remplir leur mandat de base et jouer un rôle anti-cyclique."

Pour l'UE27, le soutien à la reprise dans les pays les plus pauvres du monde devrait être un autre souci du G20.

Partager l'effort de financement de la lutte contre le changement climatique dans la perspective de Copenhague

L’UE veut que soit trouvé "un accord planétaire, ambitieux et global à Copenhague" pour lutter contre les effets du changement climatique, dont les paramètres sont l’arrêt de l’augmentation des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'ici 2020, puis leur réduction d'au moins 50 % par rapport au niveau de 1990 d'ici 2050. Dans ce contexte, "les pays développés devraient réduire leurs émissions d'au moins 80% d'ici 2050, comme convenu lors du sommet du G8 à L'Aquila."  Elle plaide donc pour que "de toute urgence, des ressources financières considérablement accrues" soient consacrées à la réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre et à l'adaptation aux effets inévitables du réchauffement climatique. Le coût additionnel net total des mesures d'atténuation et d'adaptation est estimé à environ 100 milliards d'euros par an d'ici 2020, et l’UE voudrait qu’il soit réparti entre un financement national, un financement fondé sur le marché du carbone et l'aide publique internationale.

Le marché international du carbone devrait être élargi et réformé par la création de systèmes d'échange et l'établissement de liens entre ces systèmes afin d'accroître considérablement les flux financiers vers les pays en développement.

Promouvoir la sécurité énergétique

L’UE voudrait également que le G20 affirme "sa volonté d'améliorer la sécurité énergétique en renforçant la transparence du marché pétrolier et gazier, et de contenir la spéculation". Les moyens préconisés : communication des données complètes sur les marchés pétroliers nationaux et supervision du marché des produits dérivés négociés hors bourse, afin que les régulateurs puissent avoir une vision plus complète des actions des opérateurs du marché, et finalement, développement de nouvelles technologies à faible consommation d'énergie pour garantir l'efficacité énergétique.

Les commentaires de Jean-Claude Juncker

A l’issue du sommet, le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker a expliqué que les chefs d’Etat et de gouvernement avaient vite trouvé une position commune en vue du sommet du G20 de Pittsburgh.

En tant que président de l’Eurogroupe, il craint cependant qu’il n’y ait des différends entre les Européens et les Américains lors du G20, notamment au sujet de la réforme du FMI. L’Union européenne veut maintenir le nombre de sièges au conseil d’administration à 24, dont 8 sont actuellement occupés par des Etats européens. Les Etats-Unis, pour leur part, veulent réduire ce nombre et limiter la représentation européenne. Jean-Claude Juncker ne peut "pas cacher que cela exerce une énorme pression internationale sur l’Europe". Il a par ailleurs regretté que ni l’UE, ni l’Eurogoupe n’ont soutenu sa revendication d’un siège de l’Eurogroupe dans le conseil d’administration du FMI.

Selon Jean-Claude Juncker, une autre pomme de discorde au G20 sera la limitation des bonus des banquiers, dont il est d’avis "qu’on ne va pas trouver d’accord". Il pense que "la limitation des bonus devrait être une revendication acceptable pour chacun". Et de répéter que l’Europe devrait faire cavalier seul s’il n’y a pas d’accord avec les Etats-Unis dans ce domaine. Il s’est d’ailleurs montré convaincu que le jour viendra où "les Britanniques et les Américains s’aligneront sur notre position, parce que l’accord européen aura une telle dynamique que les autres ne pourront faire autrement que de suivre".