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Politique étrangère et de défense - Traités et Affaires institutionnelles
Dans sa réponse à une question parlementaire de Fernand Kartheiser, Jean Asselborn présente dans les grandes lignes le futur Service européen d’action extérieure
16-11-2009


Le 9 octobre 2009, quelques jours après le vote favorable des Irlandais au second référendum, et alors que la ratification du traité de Lisbonne se faisait "plus probable", le député Fernand Kartheiser (ADR), adressait au ministre des Affaires étrangères une question parlementaire concernant la mise en œuvre du Service européen d’action extérieure (SEAE) dont la création est prévue par le traité de Lisbonne.

Se référant au programme du gouvernement qui indiquait d’ores et déjà que le Luxembourg serait "représenté de façon adéquate" au sein du SEAE, Fernand Kartheiser invitait le ministre Asselborn à préciser dans un premier temps quand et combien de diplomates luxembourgeois seraient mis à disposition, et selon quelles modalités.

Le député ADR voulait aussi savoir sous quelle forme administrative se ferait cette mise à disposition, et quel serait le statut légal des fonctionnaires luxembourgeois du SEAE.

Fernand Kartheiser demandait ensuite au ministre s’il était disposé à présenter, le moment venu, à la Chambre des Députés un rapport sur les fonctions obtenues par les diplomates luxembourgeois au sein du SEAE et ce notamment en comparaison avec celles obtenues par leurs collègues des autres Etats membres.

Le député souhaitait savoir si les diplomates mis à la disposition du SEAE seraient remplacés au sein du corps diplomatique luxembourgeois, et ce dans quels délais et selon quelle procédure de recrutement.

Enfin, Fernand Kartheiser appelait Jean Asselborn à présenter à la Chambre un plan prévisionnel de recrutement du Ministère des Affaires étrangères pour la période 2010-2014 et ce notamment au regard de la création du SEAE, de la candidature luxembourgeoise au Conseil de Sécurité des Nations Unies pour la période de 2013 et 2014 et enfin de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE prévue en 2015.

La réponse du ministre Asselborn

Dans sa réponse, datée du 10 novembre 2009, date à laquelle l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne était d’ores et déjà fixée au 1er décembre 2010, le ministre Jean Asselborn rappelle que les discussions sur la mise en œuvre concrète des réformes institutionnelles qu'engendrera l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne ont été suspendues après la signature du Traité dans la capitale portugaise en 2007, "pour ne pas gêner le processus référendaire irlandais".

Ces travaux n’ayant repris que depuis peu, le ministre explique donc que, "bien qu’ils avancent rapidement, beaucoup reste à faire". La Présidence suédoise s'applique actuellement à mettre d'accord les Etats membres sur les grandes lignes qui permettront de donner au futur SEAE sa forme et son contenu définitifs. Un rapport sur ses efforts a été présenté au Conseil européen du 29 et 30 octobre 2009. C’est sur la base de ce rapport, qui n'offre certes pas de réponses précises et définitives à toutes les questions posées, que le ministre Asselborn a répondu à Fernand Kartheiser.

"1. Le SEAE sera constitué par la mise en commun de services dépendant actuellement du Secrétariat général du Conseil ainsi que de ceux relevant de la Commission, en charge de la confection et de l'exécution de la politique extérieure de l'UE, y compris les volets sécurité et défense. Ces services seront complétés par la mise à disposition au SEAE de fonctionnaires détachés, sous une forme à convenir, des Etats membres. Une fois que le SEAE se trouvera définitivement constitué, le Secrétariat général du Conseil, la Commission et les Etats membres contribueront à part égale à son effectif. Il y aura une répartition équitable entre Etats membres pour ce qui est du nombre de fonctionnaires à détacher auprès du SEAE. Ces fonctionnaires seront recrutés dans tous les rangs de la carrière. Les postes à pourvoir se trouveront à Bruxelles et dans les Représentations de l'UE dans les pays membres et dans les pays tiers.

Le statut légal final des futurs fonctionnaires du SEAE demeure en discussion. Le SEAE devrait se voir attribuer un statut légal différent de ceux du Secrétariat général du Conseil et de la Commission, donc un statut "sui generis". Les fonctionnaires qui en feront partie seront soumis à une certaine mobilité afin d'assurer une représentation équitable de tous aux postes de responsabilité.

Concernant les fonctionnaires issus des pays membres, ils seront mis à disposition du SEAE pour une durée vraisemblablement de quatre à cinq ans, non renouvelable et pris en charge financièrement par le SEAE. Il reste à ajouter qu'il échoit au futur Haut Représentant de désigner les fonctionnaires au SEAE sur les listes de candidats que chaque Etat membre sera appelé à lui soumettre, le moment venu.

La mise en place du SEAE se fera de manière progressive, par phases successives. La première phase débutera par l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne et ira jusqu'au moment où le Conseil de l'UE se prononcera définitivement sur l'organisation et le fonctionnement du SEAE. Cette décision pourrait intervenir avant le terme du premier semestre 2010. Jusqu'à cette date, une équipe réduite, issue de représentants du Secrétariat général du Conseil, de la Commission et d'Etats membres, sera constituée pour assurer la mise en place du SEAE.

Une fois que le Conseil se sera définitivement prononcé, donc dès la fin du premier semestre 2010, le SEAE commencera à exercer ses fonctions normalement et mettra en place les sections administratives dont il aura besoin pour mener à bien ses tâches. On table sur une période de 18 à 24 mois pour conclure cette mise en place. Elle devrait être achevée en 2012.

A partir de 2012 le SEAE sera sensé tourner à plein régime. Après deux ans de fonctionnement donc, en 2014, une évaluation globale du SEAE sera entreprise."

"2. Sous toutes réserves quant au statut légal à conférer au SEAE, l'hypothèse la plus probable concernant la forme administrative que prendra la mise à disposition de fonctionnaires luxembourgeois au SEAE, sera l'octroi d'un congé spécial aux fonctionnaires luxembourgeois entrés au service d'institutions internationales, régi par la loi du même nom du 27 août 1977."

"3. Je suis, bien entendu, à disposition de la Chambre des Députés pour faire rapport sur l'intégration des fonctionnaires luxembourgeois dans le SEAE."

"4. Dans la mesure où les fonctionnaires luxembourgeois qui rejoindront le SEAE y resteront pour une période de plusieurs années, les vacances de postes qu'ils laisseront à Luxembourg devront être supplées par l'engagement de nouveaux fonctionnaires.

Ceci n'entraînera, toutefois, pas de dépenses supplémentaires à charge du budget de l'Etat étant donné que les agents relevant du SEAE seront rémunérés sur le budget de l'UE.

Les délais encourus sont ceux instaurés par le dispositif réglementaire luxembourgeois qui encadre le recrutement des agents de l'Etat. Pour autant que des vacances de postes sont prévisibles suffisamment en amont, l'engagement de nouveaux fonctionnaires pourra se faire de manière à coïncider avec le départ de ceux des candidats qui auront été retenus pour intégrer le SEAE."

"5. Concernant le SEAE, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer ci-avant, il faudra attendre quelques mois encore avant de savoir combien de Luxembourgeois exactement seront éligibles pour en faire partie. Ensuite, un nouveau délai courra avant de voir les candidats luxembourgeois retenus rejoindre leurs nouvelles affectations. Au fur et à mesure que ces différents paliers seront franchis, mon administration aura eu l'occasion de faire en sorte, en collaboration avec le Ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative, que toutes les vacances de postes, quel qu'en soit le nombre dans le contexte de la mise en place du SEAE, seront occupées en temps voulu.

Pour ce qui est de notre accession au Conseil de Sécurité des Nations Unies, qui sera décidée à l'issu du vote de l'Assemblée générale des Nations Unies à l'automne 2012, nous nous concentrons actuellement sur notre campagne visant à convaincre les Etats membres des NU de nous accorder les suffrages nécessaires. Le moment venu, nous nous pencherons sur le dispositif à mettre en place en 2013 et 2014 afin d'honorer notre qualité de membre du CSNU de manière crédible. D'ores et déjà je tiens à dire que ce dispositif se traduira essentiellement par un renforcement temporaire de l'effectif de notre Représentation Permanente auprès des NU à New York à partir de moyens existants. De même demanderons-nous, cas échéant, l'autorisation de conclure un nombre très restreint de contrats à durée déterminée afin de compléter notre dispositif. En tout état de cause, l'effort financier supplémentaire à fournir durant ces vingt-quatre mois restera circonscrit.

Enfin, pour ce qui est de la Présidence luxembourgeoise de l'UE en 2015 il y a lieu de rappeler que les travaux préparatoires démarrent 3 à 4 ans avant le début effectif de celle-ci. Il est clair, par ailleurs, que les présidences nationales semestrielles sont vouées à déléguer une partie considérable de la charge qui était la leur avant l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, aux nouveaux mécanismes, instances et dispositifs, à l'instar du SEAE, introduits par le nouveau Traité. J'attendrai donc de voir ce qui restera précisément aux présidences nationales en termes de charge de travail semestrielle, avant de me prononcer en détail sur le dispositif de la présidence luxembourgeoise requis en vue du Conseil de l'UE en 2015."