L’accord obtenu le 19 décembre 2009, non sans peine, à l’issue de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique à Copenhague suscite, au Luxembourg aussi, une déception unanime, tant chez les représentants politiques que dans la société civile.
C’est à l’occasion d’une conférence de presse que Claude Wiseler, ministre du Développement durable et des Infrastructures, et Marco Schank, ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures, ont fait part, le 21 décembre 2009, de leur déception. "L’accord obtenu n’est pas celui que nous avions espéré. Le Luxembourg, mais aussi l’Union européenne (UE), avaient de plus grandes ambitions", a expliqué Claude Wiseler. En effet, l’accord obtenu n’est pas contraignant et il ne contient ni des objectifs précis de réductions des émissions de CO2, ni de mécanisme de suivi ou de monitoring.
Pourtant, Claude Wiseler a reconnu que c’était le seul accord possible. "À un certain moment, il était clair qu’on ne pouvait pas aller plus loin. C’était ceci ou rien!", a raconté le ministre.
Le ministre a aussi tenu à souligner les aspects positifs de ce "premier accord mondial sur la protection du climat" qui fixe l’objectif de limiter l’augmentation de la température planétaire à 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et qui prévoit des investissements, à court terme (2010-2012), de 30 milliards de dollars afin d’aider les pays les plus vulnérables pour s'adapter à l’impact du dérèglement climatique.
Ainsi, si cet accord n’est "pas suffisant" à ses yeux, le ministre estime qu’il s’agit "bel et bien d’un premier pas, certes petit, qui a été réalisé". "Mais d’autres pas devront suivre!", a ajouté Claude Wiseler, qui a fait part de sa volonté de redoubler d’efforts pour atteindre les objectifs fixés. "Quelque soit le résultat obtenu à Copenhague, nous devons prendre nos responsabilités pour avancer dans la lutte contre le changement climatique".
Claude Wiseler et Marco Schank ont donc annoncé leur volonté de "faire [leurs] devoirs à domicile dans la lutte contre le changement climatique de façon conséquente". Et ils ont saisi l’occasion pour lancer un pacte national pour le climat et le développement durable que la presse a présenté comme une sorte de “Grenelle de l’environnement”.
L’objectif affiché par les deux ministres qui ont choisi le débat comme approche ? "Définir notre politique contre le changement climatique et pour le développement durable, avec des objectifs à moyen et à long terme".
Selon les souhaits des deux ministres, le pacte sera présenté en janvier 2010 au Conseil de gouvernement afin de démarrer les travaux des groupes de travail entre mars et juin. Après les vacances d’été, le processus de consultation des autres acteurs sera lancé et le pacte pourra être débattu en automne 2010 à la Chambre des députés.
Pour le Premier ministre Jean-Claude Juncker, l’accord obtenu à Copenhague est à la fois "un succès relatif et un échec à nuancer fortement" comme il l’a expliqué sur les ondes de RTL Radio le 19 décembre 2009. Jean-Claude Juncker, qui répondait aux questions des journalistes Francine Closener et Frank Kuffer, salue en effet le progrès que constitue un accord qui fixe comme objectif une hausse des températures n’excédant pas les 2 °C par rapport à la période préindustrielle. Mais il regrette que les différentes parties présentes, Europe comprise, n’aient pas réussi à se mettre d’accord sur les moyens d’atteindre cet objectif, ce pour quoi elles étaient pourtant réunies.
Jean-Claude Juncker avait déjà plaidé le 15 décembre 2009 pour un engagement sans condition de l’UE à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 30 % d’ici à 2020. Il regrette par conséquent que l’UE ait finalement renoncé à s’engager sur cette voie à défaut d’être suivie par d’autres pays. Ainsi, dans des négociations que le Premier ministre compare à un "mikado dans lequel le premier à bouger est celui qui perd", "personne n’a bougé et nous avons tous perdu". Pourtant, Jean-Claude Juncker ne considère pas que l’UE n’a pas parlé d’une seule voix lors du sommet. A ses yeux en effet, les positions du Conseil européen étaient "limpides et ce depuis deux ans déjà".
Pour les Verts, dont une délégation était présente à Copenhague, le sommet de Copenhague s’est terminé de façon "honteuse". Dans un communiqué de presse daté du 19 décembre 2009, l’eurodéputé Claude Turmes et ceux qui l’ont accompagné à Copenhague qualifie l’accord obtenu de "pure maculature".
Et les Verts luxembourgeois insistent sur la "responsabilité" de l’UE dans cet échec. Les signataires de ce texte dénoncent les "querelles internes" qui ont fait que l’UE n’a pas pu "jouer un rôle moteur dans ces négociations". A leurs yeux, l’UE aurait dû conclure une alliance avec les pays en voie de développement et fixer un objectif de réduction de 30 %, sans "hot air" et avec des engagements financiers clairs. Cela aurait été selon eux le seul moyen de mettre la Chine et les Etats-Unis sous pression.
La délégation des Verts luxembourgeois ne veut en aucun cas que l’accord obtenu à Copenhague ne soit "le dernier mot de la communauté internationale en matière de lutte contre le changement climatique". Il s’agit donc désormais pour eux de continuer à faire pression en vue des négociations qui vont se poursuivre en juin 2010 à Bonn puis en décembre 2010 à Mexico.
Le DP a réagi par voie de communiqué le 21 décembre 2009. S’il déplore "un résultat extrêmement maigre", le DP appelle le gouvernement à "aller de l’avant" par "une politique climatique offensive".
Le DP propose une action basée sur cinq axes majeurs :
Norry Schneider, chargé d’études auprès de Caritas, était présent à Copenhague. Dans un communiqué daté du 21 décembre 2009 et titré "une catastrophe pour les pauvres", il estime que "l’accord de Copenhague est une honte". Il déplore que "toute notion de justice climatique" manque à une déclaration finale qui, selon lui, "condamne des millions de personnes, parmi les plus pauvres, à la faim et à la souffrance". Norry Schneider regrette ainsi le "manque de volonté politique [qui] a paralysé les efforts internationaux pour aborder le changement climatique" au cours de la dernière décennie. Et il déplore que "pour les mois à venir, aucune échéance claire qui permettrait d’arriver à un accord juste, ambitieux et légalement contraignant n’ait été retenue".
Paul Delaunois, directeur de Greenpeace Luxembourg, a pour sa part évoqué, à l’occasion d’une conférence de presse, "un échec dramatique". Comme le rapporte Laurent Moyse dans l’édition de la Voix du Luxembourg datée du 28 décembre 2009, "le résultat de Copenhague, ce sont", pour Paul Delaunois, "douze articles et une feuille blanche". Et de dénoncer ce qu’il appelle "un no man's land décisionnel", alors que, selon lui, "la conjoncture n'a jamais été aussi favorable pour prendre des décisions politiques".
En évoquant "le désastre de Copenhague", Andreas Carlgren, le ministre suédois de l’Environnement, a donné le ton lors du Conseil Environnement qui s’est tenu le 22 décembre 2009. Dans un climat de déception, les ministres ont adopté des conclusions rappelant que l’UE s’efforce pour un accord qui soit juridiquement contraignant pour toutes les parties et qui soit suffisamment ambitieux pour limiter le réchauffement global en dessous de 2 °C en réduisant les émissions globales de 50 % d’ici à 2050.
A leurs yeux l’accord de Copenhague est donc "un premier pas" et les ministres se disent décidés à faire en sorte que l’UE poursuive ses efforts "afin d’offrir ambition et leadership". Il s’agit désormais de "tirer les leçons de Copenhague", et la première étape de ce bilan se fera en janvier 2010, lorsque la Commission présentera son analyse aux ministres de l’Environnement qui seront réunis à Séville pour une rencontre informelle.