Le 1er juin 2010, la Chambre des députés s’est penchée sur l’avenir de la place financière luxembourgeoise, ce qui lui a permis d’aborder de nombreux sujets qui sont actuellement en discussion au niveau européen. Mais les députés réunis en plénière ont aussi eu l’occasion de débattre, à l’occasion d’une heure d’actualité demandée par le groupe CSV, de la proposition de la Commission européenne, présentée le 12 mai 2010, d’introduire dans le cadre du pacte de stabilité une procédure prévoyant que Commission et Conseil s’expriment sur les grandes lignes des projets de budgets avant que ceux-ci ne soient votés par les parlements nationaux.
Le même jour, la Commission du Budget et des Finances avait eu un échange de vues avec le ministre des Finances, Luc Frieden, au sujet des différents aspects de la proposition d’une meilleure coordination budgétaire formulée par la Commission.
L’idée d’une évaluation ex ante des orientations budgétaires avait très vite fait l’objet de réactions dans la presse luxembourgeoise et le DP avait pour sa part convoqué une conférence de presse pour se positionner sur le sujet le 28 mai dernier.
La nécessité d’une meilleure coordination budgétaire au niveau européen fait l’unanimité en vue de protéger l’union monétaire et tout le monde s’accorde à dire que les règles du pacte de stabilité doivent être respectées et contrôlées.
Cependant, Lucien Thiel (CSV) a fait part de ses craintes de voir la souveraineté en matière budgétaire glisser peu à peu dans le champ de compétences de l’UE. Il s’est donc demandé si la disparition de la souveraineté budgétaire ne serait pas un prix trop élever pour la stabilité.
Alex Bodry (LSAP), qui a salué l’idée de la Commission de confronter dans son analyse déficit et dette d’Etat, constate qu’il ne suffit pas de montrer du doigt ceux qui enfreignent les règles du pacte de stabilité et que des sanctions plus sévères seraient donc nécessaires. Pourtant, le président du LSAP a mis en garde contre une possible mise sous tutelle des parlements nationaux à travers un contrôle ex ante des orientations budgétaires qui serait de tout façon difficile à mettre en place à l’heure actuelle. Comment collecter en effet des données sûres à transmettre à Bruxelles en amont de la procédure ?
Pour François Bausch (Déi Gréng), un droit de regard de la Commission européenne sur la politique budgétaire nationale ne ferait pas sens à l’heure actuelle dans la mesure où, dans un grand nombre de domaines ne relevant pas de sa compétence, l’UE n’a pas son mot à dire. Un tel droit de regard de la Commission contribuerait par conséquent à ses yeux à renforcer le déficit démocratique.
Claude Meisch (DP) a expliqué que son parti, qui se positionne contre un gouvernement économique européen mais pour une gouvernance économique et financière, n’était pas contre un contrôle ex ante des orientations budgétaires des pays membres de la zone euro tout en soulignant que cela ne semblait cependant pas faisable sur le plan politique à l’heure actuelle. Il ne lui semblerait en effet pas opportun de se lancer en ce moment dans des modifications du traité en sens.
Le ministre des Finances, Luc Frieden, a pour sa part salué, au nom du Luxembourg, la proposition faite par la Commission européenne. Vivre dans une union économique et monétaire implique en effet à ses yeux d’avoir quasiment une politique budgétaire commune. Cela ne signifie pas pour autant que chaque mesure doit faire l’objet d’un contrôle ex ante, et d’ailleurs la Commission n’est de toute façon "pas outillée pour donner son avis sur les différentes lignes budgétaires". "Elle peut néanmoins donner son avis sur les grands traits", a expliqué Luc Frieden qui estime qu’il s’agit de prévenir à l’avenir des problèmes budgétaires structurels comme ceux qui ont contribué à mener à la crise qui frappe la zone euro.
D’après le ministre, le but poursuivi par une nouvelle procédure d’analyse serait triple :
Répondant aux inquiétudes formulées par les députés, Luc Frieden a déclaré que "les parlements nationaux auront toujours la priorité". Une telle mesure, qui si elle avait existé aurait pu éviter sans doute que l’on n’en arrive aux difficultés rencontrées actuellement par certains pays du Sud de la zone euro, n’enlèverait selon le ministre rien au pouvoir budgétaire des parlements.
En bref, cette proposition, qui n’a pas encore discutée en détail, va pour le ministre dans la bonne direction.