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Traités et Affaires institutionnelles
La Chambre des Députés a introduit dans son règlement les adaptations nécessaires à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne
14-07-2010


Le 14 juillet 2010, les députés ont adopté en fin d’une séance publique à l’ordre du jour bien rempli la proposition de modification du Règlement de la Chambre des Députés relative aux incidences du Traité de Lisbonne sur les parlements nationaux.

Adopté par 57 députés, ce nouveau règlement introduit les adaptations qui s’imposaient avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le 1er décembre 2009. Celui-ci introduit en effet le contrôle du principe de subsidiarité par les parlements nationaux et il fallait donc préciser les procédures en matière de contrôle de la subsidiarité, d'introduction de recours ou encore d'expression d'un avis motivé politique.

Les modifications avaient été déposées en date du 3 juin 2010 par la Conférence des Présidents et Ben Fayot, député socialiste qui préside la Commission des Affaires étrangères et européennes, avait été nommé rapporteur le 30 juin 2010. La Commission du Règlement, présidée par Gast Gibéryen (ADR), s’est penchée sur le texte en date du 6 juillet 2010 et a livré un rapport détaillé et adopté à l’unanimité de ses membres. C’est sur ce document que se base Europaforum.lu pour présenter les motifs de cette modification du règlement.

Lors du vote en séance publique, Léon Gloden (CSV), Lydie Polfer (DP), Gast Gibéryen (ADR), Félix Braz (déi gréng) et André Hoffmann (déi Lénk), ont tous souligné le rôle et la responsabilité des députés en matière de contrôle du principe de subsidiarité.

Nouveaux pouvoirs des parlements nationaux

Le traité de Lisbonne prévoit une série de nouveaux pouvoirs pour les parlements nationaux. Outre le contrôle du respect du principe de subsidiarité, de nouvelles attributions leur sont réservées notamment en matière de révision des traités, d’évaluation des activités d’Eurojust et en matière de contrôle des activités d’Europol.

Les dispositions suivantes mentionnent les parlements nationaux :

Traité sur l’Union européenne :

  • article 5: principe général du contrôle de subsidiarité des parlements nationaux
  • article 10: disposition générale relative aux principes démocratiques
  • article 12: contribution des parlements nationaux au bon fonctionnement de l’Union européenne
  • article 48: révision des Traités
  • article 49: information sur les adhésions à l’Union européenne.

Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne :

  • article 69: surveillance du respect du principe de subsidiarité en matière de coopération judiciaire en matière pénale et de coopération policière
  • article 70: information sur l’évaluation de la mise en œuvre des politiques de l’Union relatives à l’espace de liberté, de sécurité et de justice
  • article 71: information des parlements nationaux sur les travaux du comité permanent pour la sécurité intérieure
  • article 81: droit d’opposition des parlements nationaux dans certains aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière
  • article 85: association des parlements nationaux à l’évaluation des activités d’Eurojust
  • article 88: association des parlements nationaux au contrôle des activités d’Europol
  • article 352: clause de flexibilité.

S’y ajoutent le Protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne et le Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

En ce qui concerne plus particulièrement le contrôle du respect du principe de subsidiarité, tout parlement national peut, dans un délai de huit semaines à compter de la date de transmission d’un projet d’acte législatif dans toutes les langues officielles de l’Union, adresser aux institutions de l’Union européenne un avis motivé exposant les raisons pour lesquelles il estime que cet acte n’est pas conforme au principe de subsidiarité. Lorsqu’un tiers des parlements nationaux (respectivement un quart pour les textes relatifs à la coopération policière et à la coopération judiciaire en matière pénale) a communiqué un avis motivé, la Commission doit réexaminer son projet.

Si un projet d’acte législatif est contesté par la majorité des Parlements nationaux, mais que la Commission décide néanmoins de le maintenir, le processus législatif est suspendu. Le Conseil et le Parlement européen doivent se prononcer sur la compatibilité de la proposition avec le principe de subsidiarité. Si 55% des membres du Conseil ou le Parlement européen (à la majorité simple) donne une réponse négative, le projet est définitivement écarté.

La Cour de Justice est compétente pour se prononcer sur les recours pour violation, par un acte législatif, du principe de subsidiarité formés par un Parlement national. Les recours visent les directives et règlements dans leur version finale et sont à introduire dans un délai de deux mois à compter de la publication du texte visé au Journal officiel (article 8 du Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité et article 263 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne).

A relever également que l’examen des parlements nationaux s’étend au fond des propositions législatives. En effet, le courrier du 1er décembre 2009 adressé aux parlements nationaux par José Manuel Barroso, Président de la Commission européenne, et par Margot Wallström, à l’époque Vice-Présidente, retient que "étant donné que le mécanisme de contrôle de la subsidiarité est appliqué parallèlement au dialogue politique (qui couvre tous les aspects des documents transmis aux parlements nationaux et pas seulement le respect du principe de subsidiarité), la Commission invite les parlements nationaux à distinguer autant que faire se peut les aspects de la subsidiarité et les commentaires quant au fond de la proposition. (…)"

Méthode de travail de la Chambre des Députés

Depuis septembre 2006, la Commission européenne communique les documents de consultation (livres verts, livres blancs, communications) et les propositions législatives européennes directement aux Parlements nationaux.

La Chambre des Députés a décidé d’étudier tant les documents de consultation que les propositions législatives, mais contrairement à la plupart des autres Parlements nationaux, elle n’a pas mis en place de commission spécialisée dans les affaires européennes, traitant de manière exclusive les dossiers européens.

Ce sont au contraire les commissions sectorielles qui en sont en charge, bien que la Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration assure une coordination générale des dossiers européens.

Tri des dossiers

La Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration analyse régulièrement la classification des documents européens en "documents A" (documents ne présentant pas un intérêt politique, économique, législatif ou financier particulier pour le Luxembourg ou document dont la procédure est déjà trop avancée sur le plan européen) et en "documents B" (document méritant un examen plus détaillé), sur base de tableaux établis par la "cellule européenne" du Service des Relations internationales. Ces listes sont accompagnées de résumés des "documents B" et proposent quelle commission pourrait être compétente pour les différents dossiers.

Le Président de la Chambre des Députés renvoie ensuite les documents B aux différentes commissions sectorielles, en cas d’urgence sans attendre la position de la commission.

Les commissions sectorielles obtiennent communication d’une liste regroupant les nouveaux documents européens dont elles sont saisies. Il leur appartient d’assurer un suivi approprié des documents européens qui entrent dans leur compétence. A relever que les commissions peuvent reclasser à tout moment un "document A" en un "document B" et vice-versa et peuvent également demander le renvoi d’un document à une autre commission, lorsqu’elles jugent que la matière visée ne tombe malgré tout pas dans leur propre compétence.

Analyse du programme de travail de la Commission européenne

La Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration analyse chaque année la stratégie politique annuelle de la Commission européenne ainsi que son programme législatif et de travail, ce qu’elle fait le 6 juillet dernier pour le programme de travail 2010.

La délégation de la COSAC (Conférence des Organes spécialisés dans les affaires communautaires) renseigne la Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration sur les éventuels problèmes soulevés à ce propos au courant des réunions de la COSAC.

La cellule européenne tient informée la Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration sur les problèmes soulevés le cas échéant par d’autres Parlements nationaux lors de la discussion de ces deux documents.

L’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne au 1er décembre 2009 lance le contrôle du respect du principe de subsidiarité par les parlements nationaux, ce qui demande une certaine adaptation des procédures internes.

Contrôle de la subsidiarité

Avis motivé

La Chambre des Députés a décidé de n’appliquer le contrôle de la subsidiarité qu’aux propositions législatives européennes classées comme documents B. De surcroît, un avis motivé sur la subsidiarité n’est rédigé que dans l’hypothèse où une violation du principe de subsidiarité est constatée.

L’avis motivé est discuté en commission en présence d’un représentant du Gouvernement.

La commission sectorielle concernée doit avoir clôturé ses discussions endéans un délai de quatre semaines et décider s’il y a lieu de rédiger un avis motivé concluant au non-respect du principe de subsidiarité.

Chaque groupe politique ou technique et chaque sensibilité politique peut présenter un projet d’avis motivé tendant à inviter une commission à retenir le non-respect du principe de subsidiarité.

La décision de rédiger un avis motivé est prise à la majorité des membres de la commission.

Les dernières quatre semaines du délai de huit semaines doivent être réservées à la rédaction de l’avis motivé ainsi qu’au vote de la Chambre siégeant en séance publique.

La décision de l’envoi de l’avis motivé est prise en séance publique sous la forme d’une résolution adoptée à la majorité des membres de la Chambre des Députés. Cette résolution est présentée par le Président de la Chambre des Députés et est soumise au vote de la Chambre des Députés. La résolution est adoptée sans débat à moins que la Conférence des Présidents n’en décide autrement suite à une demande de la commission concernée. Le temps de parole auquel l’article 85 (3) du Règlement fait référence n’est pas applicable.

Au cas où aucune séance publique n’est convoquée en temps utile pour respecter le délai de huit semaines, la Conférence des Présidents, convoquée dans les meilleurs délais, décide à la majorité simple de l’éventuel envoi de l’avis motivé. Pour ce point les sensibilités politiques sont également invitées à la Conférence des Présidents.

Dans cette hypothèse, la décision de l’envoi n’est pas prise sous forme d’une résolution. La commission compétente est informée de la décision de la Conférence des Présidents par lettre du Président de la Chambre des Députés. La Chambre des Députés en est informée lors de la prochaine séance publique dans le cadre des "communications".

En toute hypothèse, l’avis motivé est communiqué aux Présidents de la Commission européenne, du Conseil et du Parlement européen ainsi que pour information au Gouvernement luxembourgeois par une lettre du Président de la Chambre des Députés. L’avis motivé est communiqué sur IPEX aux autres parlements nationaux par la cellule européenne, en français et en anglais (traduction de courtoisie).

Recours

Les recours visent les directives et règlements dans leur version finale et sont à introduire dans un délai de deux mois à compter de la publication du texte visé (article 83 du Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité et article 2634 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne).

Le recours se limite au cas où la Chambre des Députés a envoyé un avis motivé à la Commission européenne.

La Commission du Règlement a retenu qu’il appartient à la cellule européenne de l’administration de suivre les textes ayant fait l’objet d’un avis motivé, afin qu’un recours éventuel contre l’acte communautaire puisse être décidé et introduit dans les délais.

Les commissions parlementaires sectorielles sont invitées à inscrire le plus tôt possible après leur publication les directives et les règlements européens concernés à l’ordre du jour d’une réunion de commission.

La commission compétente décide endéans les trois semaines de la publication de la directive ou du règlement au Journal officiel s’il y a lieu de proposer à la Chambre siégeant en séance publique l’introduction d’un recours devant la Cour européenne de Justice. Les discussions en commission y relatives se font en présence d’un représentant du Gouvernement.

Au cas où la commission conclut à une violation du principe de subsidiarité, une motion à soumettre à la séance publique est déposée pour inviter le Gouvernement à introduire un recours devant la Cour de Justice pour violation du principe de subsidiarité.

Conformément aux dispositions de la Constitution, la motion doit être adoptée en séance publique à la majorité des Députés. Au cas où il y aura révision de l’article 62 de la Constitution, la Chambre des Députés se réserve le droit de revenir sur ce point.

Au cas où aucune séance publique n’est convoquée en temps utile pour respecter le délai de deux mois, la Conférence des Présidents, convoquée dans les meilleurs délais, prend la décision. L’introduction du recours est décidée à la majorité des voix représentées à la Conférence des Présidents. Pour ce point les sensibilités politiques sont également invitées à la Conférence des Présidents.

Dans cette hypothèse, la décision de l’envoi n’est pas prise sous forme d’une motion. La commission compétente est informée de la décision de la Conférence des Présidents par lettre du Président de la Chambre des Députés. La Chambre siégeant en séance publique en est informée dans la rubrique des "communications" du Président.

Le Gouvernement est lié par la motion demandant l’introduction d’un recours.

Les Parlements nationaux sont informés par IPEX sur l’introduction du recours, par l’intermédiaire de la cellule européenne.

Sur décision du Bureau, la Chambre des Députés chargera un avocat de l’introduction du recours. Les frais et honoraires des avocats et des experts à consulter sont à charge de la Chambre des Députés.

Avis politique

La procédure utilisée pour le contrôle de subsidiarité s’applique également aux avis motivés politiques, signalant des problèmes au niveau du contenu, comme par exemple pour les avis sur des livres verts.

Les principales différences par rapport au contrôle du respect du principe de subsidiarité sont que :

  • Les avis politiques ne sont pas prévus par le Traité de Lisbonne, mais sont encouragés par la Commission européenne, et en particulier par le Président Barroso.
  • Le délai de huit semaines n’est pas applicable.
  • Un recours devant la Cour de Justice ne peut être introduit que dans l’hypothèse du contrôle de subsidiarité.

Révision des traités

Procédure de révision ordinaire (art. 48 (3) TUE)

Dans l’hypothèse de la convocation d’une Convention, la délégation de la Chambre des Députés respecte la composition du Parlement luxembourgeois.

Procédure de révision simplifiée (art. 48 (7) TUE)

La procédure applicable au droit d’opposition de la Chambre des Députés en matière de révision simplifiée des traités se calque sur la procédure applicable pour la rédaction des avis politiques (initiative Barroso), avec une préparation au niveau de la commission compétente et une adoption de la décision finale en séance publique.

Droit d’opposition dans certains aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière

La procédure applicable au droit d’opposition se calque sur la procédure applicable pour la rédaction des avis politiques (initiative Barroso), avec une préparation au niveau de la commission compétente et une adoption de la décision finale en séance publique.

Coopération avec le Gouvernement

Un aide-mémoire sur la coopération entre la Chambre des Députés et le Gouvernement du Grand- Duché de Luxembourg en matière de politique européenne règle les relations entre les deux pouvoirs en ce qui concerne plus particulièrement le traitement des dossiers européens, aide-mémoire qui se trouve en annexe 2 du Règlement de la Chambre des Députés.

Coopération avec les Députés européens

L’article 168 du Règlement de la Chambre des Députés dispose que les membres luxembourgeois du Parlement européen peuvent être invités à assister aux réunions des commissions lorsque celles-ci traitent des dossiers européens.

A l’avenir un contact plus étroit sera établi avec les Députés européens et leur secrétariat en vue d’optimiser au maximum l’échange d’informations entre les Députés nationaux et leurs homologues européens.

Coopération avec les acteurs économiques et sociaux

Lors de réunions en décembre 2009 et janvier 2010, le Président de la Chambre des Députés ainsi que le Président de la Commission des Affaires étrangères et européennes, de la Défense, de la Coopération et de l’Immigration ont rencontré des délégations de la Chambre des Salariés, de la Chambre des Fonctionnaires et Employés publics, de la Chambre des Métiers, de la Chambre de l’Agriculture, de la Chambre de Commerce, de l’UEL et du Comité économique et social pour discuter sur une possible coopération entre le Parlement et ces entités.

Etant donné que les délais réservés au contrôle de la subsidiarité sont fort réduits, il est impératif que le Parlement soit informé dans les meilleurs délais d’éventuels problèmes au niveau de la subsidiarité ou au niveau du fond des dossiers, et ce endéans les quatre premières semaines du délai de huit semaines.

Il va de soi que cette information préalable peut être communiquée d’abord de manière informelle entre correspondants aboutissant le cas échéant à un échange de vues avec la commission sectorielle compétente et qu’un avis officiel peut être communiqué à un moment ultérieur, tout en gardant en vue l’expiration du délai de huit semaines.

En ce qui concerne Europol et Eurojust, la Commission du Règlement rappelle qu’elle en attente des propositions de la Commission européenne.

Mise en œuvre pratique de la coopération

La Chambre des Députés propose une coopération en deux étapes.

Dans une première phase, la communication passe par un échange d’informations par courrier électronique. La Chambre des Députés a mis en place une adresse e-mail (europe@chd.lu) destinée à regrouper tous les documents envoyés par les différents acteurs.

Les tableaux regroupant les documents transmis par la Commission européenne depuis mars 2008 peuvent être consultés sur le site Internet de la Chambre des Députés (www.chd.lu), dans la rubrique La Chambre et l’UE, et plus particulièrement dans le volet Documents transmis par la Commission européenne de la rubrique L’action de la Chambre.

Dans une deuxième phase, la Chambre des Députés suggère de mettre en place une plate-forme informatique permettant à tous les utilisateurs d’avoir accès au rôle des affaires européen du Parlement luxembourgeois.

A cet effet, les services compétents de la Chambre des Députés sont en train d’élaborer un programme informatique permettant d’optimiser la gestion interne des dossiers européens. L’objectif est de centraliser les informations et les données relatives aux différents dossiers européens traités au Parlement luxembourgeois.

Il sera notamment possible de faire des recherches sur l’évolution des travaux sur les dossiers, d’avoir accès à des documents connexes (par exemple avis motivés du Parlement, procès-verbaux des réunions de commission y afférents, etc.), de trouver les liens pertinents vers le site http://europa.eu, d’être informé sur l’expiration du délai de huit semaines pour le contrôle de la subsidiarité ou sur l’expiration du délai de transposition des directives, de consulter des statistiques (par exemple possibilité de confectionner un tableau des documents non encore traités en commission, etc.).