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Élargissement - Politique étrangère et de défense
Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont adopté des sanctions renforcées contre l'Iran
Selon Jean Asselborn, l’UE est prête à reprendre le dialogue, sous condition que l’enrichissement de l’uranium soit arrêté et que l’Iran coopère avec l’AIEA
26-07-2010


Jean Asselborn, Konstantin Dimitrov et Tonio Borg (c) SIPLe ministre des Affaires étrangères luxembourgeois, Jean Asselborn, a participé aux Conseils "Affaires générales" (CAG) et "Affaires étrangères" (CAE) de l’Union européenne, le 26 juillet 2010 à Bruxelles. Le CAG a été présidé par le ministre des Affaires étrangères belge, Steven Vanackere, tandis que la session du CAE a été présidée par la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité commune, Catherine Ashton.

Le Conseil a notamment adopté la position générale de l’UE concernant les négociations d'adhésion avec l'Islande. Les ministres ont par ailleurs lancé la création du Service européen pour l’Action extérieure, ont discuté du processus de paix au Proche-Orient et de la situation dans la bande de Gaza, et ont débattu des implications de l’avis de la Cour internationale de Justice sur la déclaration d'indépendance du Kosovo. Finalement, ils ont a adopté un ensemble de mesures restrictives contre l’Iran tout en réaffirmant leur engagement à vouloir œuvrer pour une solution diplomatique dans le dossier nucléaire iranien.

L’adhésion de l’Islande à l’UE

En ce qui concerne les négociations d’adhésion avec l’Islande, le Conseil a adopté la position générale de l’UE, y compris les 35 chapitres du cadre de négociation, en vue de l’ouverture des négociations d’adhésion. La séance d’ouverture de la Conférence intergouvernementale UE-Islande aura lieu le 27 juillet 2010 à Bruxelles.

L’Islande participe au marché commun depuis plus de quinze ans par le biais de l'Espace économique européen (EEE). Elle est également membre de l'espace Schengen. Elle applique d’ores et déjà près des trois quarts des lois européennes nécessaires pour une adhésion. Bien que l’Islande se situe à un stade de rapprochement avec l'UE beaucoup plus avancé que tous les autres pays qui frappent à la porte des 27, qu'il s'agisse des pays des Balkans ou surtout de la Turquie, les chapitres concernant le secteur financier, l’environnement et la pêche peuvent poser de sérieux problèmes. L'Islande veut entre autres protéger ses zones de pêche de morue et continue à chasser la baleine, ce que l'UE interdit.

Autre souci : Si le gouvernement de Reykjavik espère rejoindre l'UE à l'horizon 2012, il lui faudra toutefois obtenir, après la conclusion des négociations, l'assentiment des quelque 300 000 Islandais qui seront consultés par référendum. Les récents sondages révèlent qu’une grande majorité des Islandais ne sont pas très enthousiastes. Les Européens ont encore en mémoire les deux "non" à l'adhésion infligés par les Norvégiens en 1972 et 1994, et le refus des Suisses d'intégrer l'EEE en 1992.

L'Islande avait déposé sa demande de candidature à l'UE le 16 juillet 2009 avec un intérêt affiché: adhérer à la zone euro pour bénéficier de son parapluie. Mais de l’autre côté, les Islandais avaient refusé à 93,3 % d'indemniser les épargnants britanniques et néerlandais, victimes du naufrage de la banque islandaise Icesave, de sorte que Londres et La Haye avaient pris provisoirement à leur charge l'indemnisation de leurs citoyens concernés. Mais les deux Etats membres de l’UE  attendent d'être remboursés par l'Islande.

La création du Service européen pour l’Action extérieure

Enfin, le Conseil "Affaires générales" a adopté une décision portant création du Service européen pour l’Action extérieure (SEAE) et a décidé de son organisation et de son fonctionnement. Le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn a salué la création du SEAE comme "d’une grande importance". Il a souligné que "huit mois après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il est important d’avoir à présent une vision plus claire sur la structure de ce service qui représentera les intérêts de l’Union européenne dans le monde."

"Le fait d'avoir une diplomatie européenne va largement contribuer au fait de parler d'une seule voix", s'est félicité le chef de la diplomatie belge, Steven Vanackere, dont le pays assure la présidence semestrielle de l'UE. Ce service composé de diplomates des différents pays de l'UE et de fonctionnaires européens "va devoir être opérationnel pour le 1er décembre et il va falloir procéder à des nominations pour cette date", a-t-il précisé.

Le Service européen d'action extérieure comptera à terme plusieurs milliers de personnes à Bruxelles et hors de l'UE dans des ambassades.

Les mesures contre l’Iran

La session du Conseil "Affaires générales" a été suivie par celle du Conseil "Affaires étrangères", présidée par la Haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité commune, Catherine Ashton.

Les ministres se sont notamment penchés sur la situation en Iran et la question du dossier nucléaire iranien. Le Conseil a adopté un ensemble de mesures restrictives à imposer à l’Iran dans le cadre de la mise en œuvre de la résolution 1929 du Conseil de sécurité des Nations unies. Le Conseil réaffirme son engagement à vouloir œuvrer pour une solution diplomatique dans le dossier nucléaire iranien, et fait un appel à l’Iran de revenir à la table des négociations. Ces mesures visent environ 70 personnes et une centaine d'entreprises ou organismes liés au régime. Les détails, avec les listes précises, doivent être divulgués lors de leur publication au Journal officiel de l'UE.

Les Européens ont d'une part transposé les mesures décidées le 9 juin par une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU et sont allés d'autre part plus loin, en ciblant par exemple le secteur énergétique de l'Iran.

La transposition des sanctions de l'ONU impliquent l’interdiction renforcée des investissements en Iran dans le secteur nucléaire ou balistique. 41 personnes sont visées par des gels d'avoirs et interdiction de visa (sans changement par rapport au précédent train de sanctions) mais 22 "entités" iraniennes (entreprises ou organismes) sont ajoutées pour les gels d'avoirs. Les transports de fret de et vers l'Iran, y compris en haute mer et dans les ports européens seront inspectés. Les restrictions financières sont accrues. Les transactions supérieures à 40 000 euros sont interdites sans autorisation spéciale. Huit nouvelles banques iraniennes sont interdites d'activité en Europe. Le commerce de produits à "double usage", c'est à dire non destinés a priori au secteur militaire, mais qui pourraient être détournés à cette fin, est interdit. Les crédits à l'exportation sont généralement restreints.Trois sociétés iraniennes liées à la compagnie nationale Islamic Republic of Iran Shipping Line (IRISL) sont interdites d'activité en Europe, parce que soupçonnées d'avoir jusqu'ici aidé à contourner les sanctions. 15 "entités" liées aux Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de Téhéran, sont inscrites sur une liste de gels d'avoirs.

Lors de sa conférence de presse à l’issue de la réunion du Conseil, le ministre des Affaires étrangères luxembourgeois a expliqué que "pour l’Union européenne, il s’agit de maximiser l’impact des mesures décidées par le Conseil de sécurité de l’ONU." Et de poursuivre : "À mon avis, le message a bien été compris par la partie iranienne, on sent la volonté du côté iranien de reprendre les négociations. L’Union européenne de son côté est prête à reprendre le dialogue, à deux conditions : un arrêt total de l’enrichissement de l’uranium, et la coopération totale avec l’AIEA." Le ministre Asselborn a également souligné que "la question des droits de l’Homme en Iran doit rester une question de première importance, dans l’intérêt de la population civile iranienne." Le Luxembourg a par ailleurs, à l’instar de la Suède, plaidé pour un exercice de révision de ces sanctions dans six mois.

Le processus de paix au Proche-Orient

En ce qui concerne le processus de paix au Proche-Orient, et plus particulièrement la situation actuelle dans la bande de Gaza, la haute représentante a rendu compte de sa récente visite sur place. Les ministres ont eu une discussion sur le processus de paix et sur la situation dans la bande de Gaza, ainsi que sur les options pour l’UE de prêter assistance dans le domaine de l’acheminement de biens de et vers Gaza. Le ministre des Affaires étrangères Jean Asselborn a déclaré dans ce contexte que "l’incident tragique de la flottille, aussi terrible fût-il, a contribué à l’ouverture de la bande de Gaza. Cependant, cette ouverture aujourd’hui reste insuffisante pour arriver à une reconstruction de Gaza."

Le ministre Asselborn a poursuivi en soulignant la volonté de l’Union européenne à travailler ensemble avec les partenaires de la région, afin d’apporter l’aide nécessaire à Gaza. Cependant, "il importe que les négociations directes entre Israéliens et Palestiniens reprennent, et pour cela, il va falloir qu’Israël arrête ses projets de colonisations. Si Israël continue les colonisations, cela hypothéquera tout éventuel résultat de négociations. Ensuite, il importe que les Palestiniens soient prêts à reprendre les négociations", a-t-il souligné. Il a par ailleurs insisté sur le fait que les négociations devraient se dérouler dans le cadre des frontières de 1967, une des conditions sine qua non pour que les négociations réussissent.

L’indépendance du Kosovo

Les ministres se sont penchés sur la situation dans les Balkans occidentaux. Tout d’abord, ils ont abordé la situation en Bosnie-Herzégovine, ainsi que la présence de l’Union européenne dans ce pays. Ensuite, les ministres ont discuté des implications de l’avis de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur la déclaration d'indépendance du Kosovo, ainsi que sur les relations entre la Serbie et le Kosovo.

Le 22 juillet 2010, Catherine Ashton avait "salué" cet avis et appelé Pristina et Belgrade à se tourner à présent vers l'avenir, en dialoguant. "La priorité devrait être à présent de se tourner vers l'avenir. L'avenir de la Serbie se situe dans l'Union européenne, celui du Kosovo aussi (...) les relations de bon voisinage, la coopération régionale et le dialogue sont à la base de l'Union européenne", avait-elle estimé. Le président du Parlement européen Jerzy Buzek a fait écho aux propos de Catherine Ashton en appelant "à respecter l'avis de la CIJ". Les Etats de l'UE restent toutefois divisés sur la déclaration d'indépendance du Kosovo, que cinq pays ne reconnaissent pas à ce jour: Espagne, Slovaquie, Roumanie, Grèce et Chypre. Le Grand-Duché de Luxembourg a formellement reconnu le Kosovo le 21 février 2008.