Les résultats des stress tests, annoncés et attendus de longue date, ont été rendus publics le 23 juillet 2010 à la clôture des bourses européennes. C’est sur mandat du Conseil Ecofin que l’exercice a été coordonné par le Comité européen des contrôleurs bancaires (CEBS) en coopération avec la Banque Centrale Européenne (BCE), les autorités de surveillance nationales et la Commission Européenne.
Il s’agissait d’évaluer la résistance du secteur bancaire européen dans son ensemble et la capacité des banques à absorber des chocs hypothétiques supplémentaires en matière de risques de crédit et de marché, y compris les risques souverains.
L'exercice a été réalisé sur une base individuelle pour un échantillon de 91 banques européennes de 20 États membres de l'UE, couvrant au moins 50 % du secteur bancaire en termes du total des actifs consolidés dans chacun des 27 États membres de l'UE, en utilisant un scénario macro-économique qui a été décidé de commun accord (scénario de référence et scénario défavorable) pour 2010 et 2011 et élaboré en étroite coopération avec la BCE et la Commission Européenne.
L’exercice comprenait deux scénarios défavorables. Ces deux scénarios simulent un choc de la demande au niveau de l’Union européenne, partant de l’hypothèse d’une perte moyenne cumulée de 3 % de croissance du PIB en 2010 et 2011.
Dans le premier scénario, la courbe des taux s’aplatit suite à une augmentation de 125 points de base des taux d’intérêt à court terme et d’une croissance de 75 points de base des taux à long terme.
Le second scénario, plus sévère, a été élaboré afin de prendre en considération la détérioration observée sur les marchés de capitaux depuis mai 2010. Ce scénario fait l’hypothèse d’un choc majeur sur les engagements souverains qui entraîne un élargissement des "spreads" moyens sur obligations publiques (comparé au rendement des obligations publiques allemandes) amplifié par une hausse proportionnelle des "spreads" moyens sur obligations publiques (comparé au rendement sur les obligations publiques allemandes) de 30 points de base.
L’impact de ces scénarios défavorables sur les ratios des fonds propres de base ("Tier 1") des banques a été déterminé en utilisant les données relatives aux probabilités de défaut ("probability of default") et aux pertes en cas de défaut ("loss given default"). Ces données ont été fournies par la BCE pour l’ensemble des pays de l’Union européenne. Une distinction a été faite entre les actifs émis par les établissements de crédit, les entreprises et le secteur privé.
Sur l’ensemble des 91 institutions soumises à ces tests de résistance, seuls sept établissements ont finalement échoué et devront lever, au minimum, 3,5 milliards d'euros pour renforcer leur solidité financière. Il s'agit de la banque allemande Hypo Real Estate, des caisses d'épargne espagnoles Diada, Cajasur, Espiga, Unnim et Banca Civica, ainsi que de la banque grecque ATE (Agricultural Bank of Greece).
L’étendue initiale de l’exercice avait été élargie afin d’inclure non seulement les grandes banques transfrontalières au niveau consolidé, mais également les principales banques domestiques dans les pays de l’Union européenne.
Compte tenu de son rôle dans le domaine de la stabilité financière et de l’importance du secteur financier luxembourgeois, la Banque centrale du Luxembourg (BCL) avait donc introduit deux banques domestiques, importantes pour l’économie luxembourgeoise, sur la liste des banques ciblées par cet exercice. Il s’agissait de la Banque et Caisse d'Epargne de l'Etat (BCEE) et de la Banque Raiffeisen qui représentaient à elles deux 5 % du total des bilans des banques établies au Luxembourg au 31 mars 2010.
L’exercice reposait sur une estimation de divers paramètres internes, parmi lesquels la sensibilité des bénéfices et des dépréciations d’actifs aux variations du produit intérieur brut et aux variations d’autres paramètres macro-économiques. Sans s'écarter des règles définies dans les scénarios communs et des hypothèses fondamentales retenues au niveau européen, la BCL a aligné la probabilité de défaut du Luxembourg à la moyenne des trois pays voisins.
La Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) a participé à l’exercice et elle a notamment évalué, sur base des dernières données prudentielles disponibles, les implications pour la solvabilité réglementaire de ces deux banques.
Suivant les résultats établis par la CSSF, les deux banques sont à même de résister aux chocs hypothétiques défavorables prévus dans l'exercice du CEBS comme en témoigne leur ratio Tier 1 estimé qui demeure largement supérieur à la valeur de référence de 6 %.
Suite au choc hypothétique retenu dans le scénario défavorable, le ratio de fonds propres consolidé Tier 1 estimé de la BCEE devrait atteindre 11.5 % en 2011 par rapport à 11.4 % à la fin 2009. Un scénario de risque souverain additionnel aurait un impact de 0.1 point de pourcentage en plus sur le ratio de fonds propres Tier 1 estimé, qui atteindrait 11.3 % à la fin de l'exercice 2011, par rapport au minimum réglementaire fixé à 4 %. Les résultats du stress test font apparaître un coussin de 822 millions d’euros de fonds propres Tier 1.
Quant à la banque Raiffeisen, le ratio de fonds propres consolidé Tier 1 estimé suite au choc hypothétique retenu dans le scénario défavorable devrait atteindre 8.4 % en 2011 par rapport à 8.5 % à la fin 2009. Un scénario de risque souverain additionnel aurait un impact de 0.2 points de pourcentage en plus sur le ratio de fonds propres Tier 1 estimé, qui atteindrait 8.2 % à la fin de l'exercice 2011, par rapport au minimum réglementaire fixé à 4 %. Les résultats du stress test font ainsi apparaître un coussin de 59 millions d’euros de fonds propres Tier 1.
D'autres banques luxembourgeoises importantes, représentant 66 % de la somme des bilans des banques luxembourgeoises, ont participé à l'exercice du CEBS à travers leurs groupes respectifs, soumis au stress test sur base de leur situation consolidée.
Les groupes bancaires européens BNP Paribas, Dexia, ING, BPCE et Caixa Geral De Depósitos détiennent en effet des parts significatives du marché domestique du crédit et des dépôts à travers leurs entités luxembourgeoises, à savoir BGL BNP Paribas, Dexia Banque Internationale à Luxembourg, ING LUXEMBOURG S.A., Banque BCP S.A. ainsi que Caixa Geral de Depósitos SA, Lisboa (Portugal), succursale de Luxembourg.
Ces groupes, qui offrent des ratios de solvabilité supérieurs au minimum fixé pour ce test, sont eux aussi à même de résister aux chocs hypothétiques défavorables prévus dans l'exercice du CEBS.
Ces résultats ont été salués par la présidence belge de l’UE, le ministre belge des Finances, Didier Reynders, jugeant qu’ils "montrent un degré élevé de résistance du secteur bancaire de l'Union européenne dans son ensemble, qui reflètent les efforts entrepris au cours des dernières années par les banques et certains gouvernements en vue de rétablir la confiance".
Pour la BCE, l’exercice "confirme la résistance du système bancaire de l'Union européenne et de la zone euro à des chocs économiques et financiers majeurs", tandis que Dominique Strauss-Kahn, directeur du FMI, s’est réjoui de la publication de ces résultats qu’il voit comme "une entreprise considérable et une étape importante en vue d'une transparence accrue et d'un soutien à la confiance des marchés"."La publication des résultats et les mesures qui ont été annoncées pour régler la question de l'insuffisance des capitaux dans certaines banques sont la promesse d'un renforcement considérable du système financier européen", a-t-il ajouté.
Luc Frieden n’a pas manqué, lui non plus, de saluer dès leur publication ces résultats. Le ministre des Finances s’est tout particulièrement félicité du fait que les deux établissements financiers luxembourgeois qui ont participé directement à cet exercice ont "largement passé le ‘stress test’ avec une marge significative par rapport au seuil de référence de 6 % de ratio de solvabilité sur fonds propres de base en 2011". C’est également "avec satisfaction" qu’il a noté les résultats des groupes bancaires européens BNP Paribas, Dexia, ING, BPCE et Caixa Geral De Depósitos qui détiennent des parts significatives du marché luxembourgeois du crédit et des dépôts à travers leurs entités luxembourgeoises.
Selon Luc Frieden, "les exigences des autorités de surveillance luxembourgeoises, marquées par la stabilité, la prudence et l’anticipation, se voient confirmées" et "la place financière de Luxembourg aura ainsi prouvé sa bonne résilience". Comme il l’a déclaré au Luxemburger Wort dans un bref entretien publié le 24 juillet 2010, ces résultats "renforcent la confiance des clients dans la place financière".
Jean-Claude Juncker a pour sa part déclaré le 26 juillet 2010 depuis Ljubljana, où il était en visite officielle, que "les stress tests ont montré de façon évidente que le paysage bancaire européen était suffisamment robuste".
Quant aux critiques émises au sujet du niveau d'exigence de ces tests, la BCE comme la présidence belge insistent sur la rigueur et la transparence avec lesquelles ces tests ont été menés. Luc Frieden les rejoint en soulignant pour sa part tant sur le sérieux des scénarios de choc choisis que sur le choix de critères communs à tous les pays qui rendent les résultats comparables. Jean-Claude Juncker a expliqué en Slovénie que, "dans leur ensemble, les tests ont été crédibles" et qu'ils ont été "réalisés de façon très professionnelle, par des intervenants agissant de façon indépendante et sur la base de règles".