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Economie, finances et monnaie - Fiscalité
Les ministres des Finances ont trouvé un accord sur la règlementation des fonds d’investissement alternatifs
Pour Luc Frieden, ce projet de directive représente une chance pour le Luxembourg
19-10-2010


Après une longue journée de discussions menée la veille dans le cadre de la dernière réunion de la task force sur la gouvernance économique présidée par Herman Van Rompuy, les ministres des Finances de l’UE se sont retrouvés le 19 octobre 2010 pour un Conseil Ecofin qui s’est lui aussi tenu à Luxembourg.

Luc Frieden, ministre des Finances, représentait le Luxembourg au cours de ces deux "longues et intenses journées" sur lesquelles il a tenu à faire le point devant la presse.Luc Frieden fait le point devant la presse à l'issue du Conseil

Pour le ministre, le Pacte de stabilité et de croissance sort renforcé du compromis trouvé après d’âpres négociations au sein de la task force, et, s’il aurait préféré aller plus loin, il se félicite cependant de cet accord.

Au Conseil, les ministres se sont entendus sur le projet de directive sur les fonds d’investissement alternatifs, les fameux "hedge funds", et le texte qui en ressort représente aux yeux de Luc Frieden "une chance pour le Luxembourg". Le Grand Duché pourrait en effet devenir la porte d’entrée sur le marché européen de fonds alternatifs venant de pays tiers.

Les ministres avaient aussi à l’ordre du jour une discussion sur la coopération administrative en matière de lutte contre la fraude et d’évasion fiscale. Le Luxembourg semblait prêt à donner son accord sur ce texte qui n’aurait pas d’incidence sur la place financière. Mais certains pays jugent que le texte n’est pas assez ambitieux. Il reviendra donc sur la table à l’occasion d’un prochain conseil.

Luc Frieden salue l’accord trouvé à l’issue de la dernière réunion de la task force et se félicite que le Pacte de stabilité et de croissance en sorte renforcé

La très longue réunion de la task force du 18 octobre 2010 a permis d’aboutir à un accord qui constitue aux yeux du ministre luxembourgeois "une solide amélioration" du Pacte de stabilité et de croissance.

Comme il a tenu à le préciser, si les critères du Pacte, qui restent bons, restent inchangés, c’est un "bon mécanisme de sanctions", assorti d’un renforcement de l’aspect préventif, que le ministre a salué. Un Etat ne respectant pas la discipline budgétaire prévue par le Pacte devrait désormais recevoir à un stade précoce un avis de la Commission l’intimant à améliorer la situation dans un certain délai ; une fois ce délai passé, qui atteindra six mois au maximum, si rien n’a été fait, l’Etat en question sera soumis à des sanctions financières graduées. Il s’agirait dans un premier temps d’un dépôt rémunéré, et, dans un deuxième temps d’un dépôt non rémunéré. Mais, selon le ministre, "les Luc Frieden (c) Présidence belge du Conseildétails techniques comptent moins que le fait que nous avons trouvé un accord sur les sanctions".

Les discussions ont porté sur le degré d’automaticité des sanctions, et, en fin de compte, ces dernières ne seront pas totalement automatiques, ainsi que le souhaitaient l’Allemagne et, à ses côtés, les pays qui défendaient une discipline budgétaire forte, comme le Luxembourg. Le compromis trouvé avec des pays qui, eux, basaient plus leur position sur le contexte économique, prévoit cependant une procédure pour fixer le moment où les sanctions devront tomber, ce qui est un net progrès et qui renforce selon Luc Frieden le Pacte de stabilité et de croissance. Les majorités nécessaires pour valider ou bloquer les sanctions dépendront des différentes étapes de la procédure : la majorité qualifiée sera cependant nécessaire pour la partie coercitive du pacte, ce qui donne un caractère quasi-automatique aux sanctions.

Le texte sur lequel se sont mis d’accord les ministres des Finances est, comme l’a souligné Luc Frieden, le rapport qu’Herman Van Rompuy présentera au nom de la task force aux chefs d’Etat et de gouvernement lors du prochain Conseil européen. De son côté, la Commission européenne a elle aussi émis des propositions qui vont être analysées en détail. L’accord du 18 octobre n’est donc pas un texte légalement contraignant, lequel doit encore être rédigé, ce qui prendra un certain temps.

Selon Luc Frieden, tout ce que prévoit l’accord trouvé en termes de sanctions pourrait être mis en place dans le cadre du traité actuel. Si le Luxembourg est bien d’avis qu’il faudra, à moyen et à long terme, envisager de mettre en place un mécanisme permanent, une sorte de fonds monétaire européen, pour faire face à d’éventuelles situations de crise, "il n’y a pas d’urgence" pour autant aux yeux de Luc Frieden à vouloir changer trop vite les traités. D’autant plus que l’EFSF est pour le moment un outil adéquat en cas de crise et qu’il est possible de chercher des solutions pour mettre en place un mécanisme permanent dans le cadre des traités. Le ministre luxembourgeois a en outre plaidé pour le maintien d’une "stabilité des traités".

Le projet de directive sur les fonds d’investissement alternatifs sur lequel se sont entendus les ministres représente "une chance pour le Luxembourg" aux yeux de Luc Frieden

Au cours du Conseil Ecofin, les ministres des Finances ont trouvé, après 18 mois de négociations, un accord sur la directive qui règlementera les fonds d’investissement alternatifs, les "hedge funds". Luc Frieden a fait part à l’issue du Conseil de sa satisfaction à ce sujet. En effet, il avait été décidé pendant la crise de renforcer et coordonner les politiques budgétaires, mais aussi de mieux réguler les activités financières. Et l’accord trouvé représente à ce titre un bon pas en avant aux yeux du ministre luxembourgeois.

A l’avenir, ces fonds devront faire l’objet d’une autorisation et répondre à des règles en termes de fonds propres, de reporting et de responsabilité des dépositaires, autant d’éléments "qu'il convient de saluer d’un point de vue luxembourgeois". Quant aux gérants de tels fonds provenant de pays tiers, ils vont eux aussi devoir respecter des règles de transparence avant de pouvoir commercialiser leurs produits dans l’UE. Les fonds alternatifs seront ainsi à la fois "mieux réglementés" et plus "européanisés".Didier Reynders et Luc Frieden (c) Le Conseil de l'UE

Selon Luc Frieden, l’Europe n’est donc pas une "forteresse", comme ont pu le lui reprocher ceux qui craignaient que cette directive n’ait des accents protectionnistes : le marché européen reste en effet ouvert aux fonds venant de pays tiers dans la mesure où les règles européennes sont respectées.

Pour Luc Frieden, ce texte représente "une chance pour le Luxembourg". Selon lui, l’Europe a besoin de fonds "private equity", de fonds alternatifs, car ils apportent des financements nécessaires aux entreprises et à l’économie réelle et, dans ce contexte, le Luxembourg est bien placé pour les attirer encore plus à l’avenir. Pourquoi ? Du fait d’abord que l’UE a déjà fixé des règles pour les fonds destinés aux particuliers, avec la directive UCITS IV, et que, d’autre part, le Luxembourg dispose déjà, pour des fonds qui s’adressent plus à des investisseurs institutionnels, d’outils et d’une expérience qui pourront attirer les fonds alternatifs.

 L’objectif du gouvernement luxembourgeois est donc d’être le premier à transposer la directive UCITS IV puis, quand le moment viendra, la directive sur les fonds alternatifs. Il s’agit de faire de la place luxembourgeoise une porte d’entrée sur le marché européen pour les fonds alternatifs venant de pays tiers. Le texte, qui tient compte selon Luc Frieden des soucis exprimés par le Parlement européen, doit encore être soumis aux eurodéputés.

En matière de coopération entre les administrations fiscales, le Luxembourg est prêt à donner son accord. Mais certains pays jugent que le texte n’est pas assez ambitieux.

Les ministres avaient aussi à l’ordre du jour une discussion sur la coopération administrative en matière de lutte contre la fraude et d’évasion fiscale. Sur ce sujet, le Luxembourg a pour habitude de demander à prendre en considération ensemble les textes sur la coopération administrative, la taxation de l’épargne et les relations avec les pays tiers. Si les textes concernant la taxation de l’épargne et les relations avec les pays tiers qui sont sur la table depuis plusieurs mois ne trouvent pas l’assentiment du Luxembourg, le projet de directive sur la coopération administrative n’a lui, selon Luc Frieden, aucune incidence directe sur le marché intérieur des épargnants.

Luc Frieden a expliqué que, du point de vue luxembourgeois, le texte discuté ne posait pas de difficulté substantielle. En effet, l’échange automatique d’informations prévu dans ce projet de directive se limite à un certain nombre de domaines, comme les salaires et les pensions, dans lesquels, pour des raisons internes, l’échange d’informations existe déjà. Rien à voir donc avec le marché du private banking et la gestion du patrimoine : la protection de la sphère privée reste donc la même. Par ailleurs, le projet de directive limite l’échange d’informations sur demande à des informations dont dispose l’administration fiscale et qui sont communiqués dans le cadre des accords de non double imposition. Le Luxembourg pourrait donc donner son accord sur un tel texte dans la mesure où il n’aurait pas d’incidence sur la place financière. Resterait juste à vérifier que tout concorde bien entre les dispositions de ce texte en matière d’échange d’informations et les nombreux accords bilatéraux que le Luxembourg a signé récemment.

Un certain nombre de pays, Pologne et Italie en tête, veulent cependant aller plus loin en termes d’échange automatique d’informations et jugent que le texte soumis n'est "pas assez ambitieux". De ce fait, aucun accord n’a pu être trouvé, et le sujet reviendra donc à l’ordre du jour à l’occasion d’un prochain Conseil. Mais pour le Luxembourg, il n’est pas question d’aller au-delà.