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Economie, finances et monnaie
Les ministres des Finances se sont entendus à l’unanimité sur l’octroi d’une aide financière à l’Irlande dont le montant total atteindra 85 milliards d’euros sur trois ans
Le futur mécanisme européen de stabilité se précise
28-11-2010


Les ministres des Finances européens se sont réunis à l’occasion d’un Conseil extraordinaire le dimanche 28 novembre 2010. Un Eurogroupe présidé par Jean-Claude Juncker fut ainsi suivi, dans la foulée, d’un ECOFIN. Afin de préparer ces réunions, une concertation téléphonique entre Herman van Rompuy, José Manuel Barroso, Jean-Claude Juncker, Jean-Claude Trichet, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel avait eu lieu auparavant.Jean-Claude Juncker, Didier Reynders et Olli Rehn à Bruxelles le 28 novembre 2010 © SIP/Jock Fistick

Accord à l’unanimité pour accorder une aide financière à l’Irlande de 85 milliards d’euros sur trois ans

L'Eurogroupe et les ministres des finances de l'UE se sont mis d'accord à l'unanimité pour accorder une aide financière en réponse à la demande des autorités irlandaises du 22 novembre dernier. Cette aide financière sera accordée sur la base du programme qui a été négocié avec les autorités irlandaises par la Commission, le FMI et la BCE, et que le gouvernement irlandais a approuvé le jour même.

Comme le précise le communiqué publié par les ministres de l'Eurogroupe et de l'ECOFIN, le programme d’aide financière sur trois ans repose sur trois piliers :

  • un "renforcement immédiat" du système bancaire irlandais
  • un "ajustement fiscal ambitieux visant à restaurer une fiscalité durable, y compris par le biais d'une correction du déficit excessif d'ici 2015"
  • des réformes destinées à favoriser la croissance, en particulier sur le marché de l'emploi afin de "permettre un retour à une croissance robuste et soutenable tout en protégeant la position économique et sociale des citoyens irlandais".

Le programme totalisera 85 milliards d'euros, dont 50 milliards pour couvrir les besoins budgétaires de l'Irlande et 35 milliards pour les banques, parmi lesquels 10 milliards sont prévues pour des mesures immédiates de recapitalisation et 25 milliards pour des aides ultérieures au système bancaire.

La moitié des aides au secteur bancaire - soit 17,5 milliards - sera financée par l'Irlande via des liquidités du trésor et le fonds national de réserve pour les retraites. Le reste du programme sera financé pour un tiers, soit 22,5 Olli Rehn, Didier Reynders, Jean-Claude Juncker et Jean-Claude Trichet à Bruxelles le 28 novembre 2010 © SIP/Jock Fistickmilliards d'euros, par le mécanisme européen de stabilisation financière, instrument garanti par le budget de l'UE, pour un autre tiers par le FMI, et pour le tiers restant par le Fonds européen de stabilité de la zone euro (EFSF) et, hors zone euro, les prêts bilatéraux du Royaume-Uni (3,8 milliards), de la Suède (0,6 milliard) et du Danemark (0,4 milliard).

Concernant le taux d'intérêt des prêts, le Premier ministre irlandais a annoncé que l'Irlande devrait payer un taux moyen et flexible de 5,8 % par an, plus que les 5,2 % consentis à la Grèce, dans le cadre du plan de sauvetage, mais moins que ce que devrait payer le pays aujourd'hui sur les marchés.

Le commissaire européen Olli Rehn et le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, ont déclaré dans un communiqué commun soutenir "vigoureusement le programme économique annoncé".  "C'est une réponse vigoureuse aux vulnérabilités du système bancaire qui pèsent lourdement sur le budget, et qui par conséquent affectent les perspectives de croissance dont l'Irlande a besoin pour une solution durable à la crise", ajoutent les deux responsables.

"Une mise en œuvre rapide et régulière de ce programme permettra la création d'un système bancaire plus petit qui sera robuste et bien capitalisé, et capable de répondre aux besoins de l'économie irlandaise", poursuivent le commissaire et le directeur du FMI. "Au niveau budgétaire, le programme précise les efforts à faire au cours des prochaines années, aussi bien en termes de dépenses que de revenus, pour rééquilibrer le budget en tenant compte, comme il se doit, du solide système de protection sociale irlandais", notent les deux responsables, avant d’ajouter que "les partenaires internationaux de l'Irlande se tiennent à ses côtés". 

Dans un communiqué séparé, Dominique Strauss-Kahn a confirmé que la participation du FMI s'élèverait à 22,5 milliards d'euros et qu’elle se présenterait sous la forme d'un prêt d'urgence qui sera débloqué sur trois ans. Le choix d'un prêt d'urgence permet offrir à l'Irlande une durée de remboursement plus longue, avec des paiements ne débutant que quatre ans et demi après le premier versement et pouvant s'échelonner sur 10 ans, a précisé le directeur général du FMI. Les taux d'intérêt, qui sont calculés chaque semaine sur la base des taux du bon du Trésor américain, devraient se situer aux alentours de 3,12 % pendant les trois premières années du remboursement et un peu moins de 4 % par la suite, a estimé Dominique Strauss-Kahn.

Les ministres de la zone euro précisent les contours du futur mécanisme européen de stabilité et prévoient la possibilité d’une participation au cas par cas du secteur privé

Les ministres des Finances ont par ailleurs trouvé un accord sur le futur mécanisme européen de stabilité dont la nécessité avait été établie par les chefs d’Etat et de gouvernement lors du Conseil européen de la fin du mois d’octobre dernier.Jean-Claude Juncker à Bruxelles le 28 novembre 2010 © SIP/Jock Fistick

Selon le communiqué diffusé par l’Eurogroupe à l’issue de sa réunion, ce mécanisme européen de stabilité sera basé sur l’actuel fonds de stabilité financière européenne (EFSF) qui est en mesure de livrer une aide financière aux Etats membres de la zone euro selon une stricte conditionnalité.

Les règles du futur mécanisme européen de stabilité seront cependant adaptées pour permettre, ce qui n’est pas le cas avec le mécanisme en place jusqu’en 2013, une participation au cas par cas des créditeurs du secteur privé qui sera pleinement en ligne avec les politiques pratiquées par le FMI.

Dans tous les cas, est-il précisé dans le communiqué, pour protéger l’argent des contribuables et pour envoyer aux créditeurs privés un signal clair leur signifiant que leurs créances seront subordonnées à celles du secteur public, un prêt du mécanisme européen de stabilité aura le statut de créancier préférentiel, inférieur seulement à un prêt du FMI.

L’aide accordée à un Etat membre de la zone euro sera basée sur un programme rigoureux d’ajustement économique et fiscal à une analyse rigoureuse de la soutenabilité de la dette conduite par la Commission, le FMI et la BCE. C’est sur cette base que les ministres de l’Eurogroupe prendront une décision à l’unanimité pour délivrer l’aide.

Le mécanisme fera la différence entre les crises de liquidité et les crises de solvabilité.

Si un Etat de la zone euro est solvable, mais a des problèmes temporaires de liquidité, la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le FMI étudieront le dossier. Sur la base de cette analyse, les investisseurs privés seront encouragés à maintenir leur exposition à la dette souveraine en question. L'UE fournira un soutien en liquidités au gouvernement en difficulté sans que le secteur privé soit obligé de participer.

Dans le cas où un pays se retrouverait en état d'insolvabilité, et seulement dans ce cas, les Etats "devront négocier une restructuration de la dette avec les créditeurs du secteur privé". Et ce n'est que "si ces mesures peuvent conduire à une dette soutenable" que le mécanisme européen de stabilité pourra fournir des liquidités.

Tous les emprunts obligataires émis dans la zone euro à partir du 1er juillet 2013 se verront assortis de clauses d'actions collectives (CAC), équivalentes à celles pratiquées en "common law", qui permettront à une majorité qualifiée de porteurs d'obligations de l'emporter sur les minoritaires dans la recherche d'une solution avec l'Etat souverain émetteur.

Les Etats membres vont s’efforcer d’allonger la maturité de leurs nouvelles émissions obligataires à moyen terme afin d’éviter des pics de refinancement.

Une évaluation du mécanisme, qui ne sera pas effectif avant la mi-2013, est d’ores et déjà prévue pour 2016.

Herman Van Rompuy a indiqué que la proposition de changement limité du traité qu’il entend faire au Conseil européen de décembre tiendrait compte de la décision de l’Eurogroupe qu’il n’a par ailleurs pas manqué de saluer.