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Economie, finances et monnaie
Le semestre européen, "petite révolution de l’UE", selon Viviane Reding qui appelle chacun à ses responsabilités pour la mise en œuvre de cet "embryon de gouvernance économique européenne"
Augmenter la capacité effective d’emprunt de l’EFSF ne signifie pas nécessairement le renflouement du fonds, précise la commissaire
14-01-2011


Le 14 janvier 2011, Viviane Reding, vice-présidente de la Commission européenne en charge de la Justice, des Droits fondamentaux et de la Citoyenneté, a convoqué les médias luxembourgeois afin de faire le point sur le plan de la Commission européenne pour renforcer la croissance.

Le 12 janvier 2011, le président Barroso et les commissaires Olli Rehn et Laszlo Andor avaient en effet présenté l’examen annuel de la croissance, lançant de la sorte la nouvelle procédure de coordination des politiques économiques et budgétaires dont s’est dotée l’UE sous le nom de semestre européen.  Viviane Reding a aussi saisi l’occasion pour présenter les contributions de la justice, son portefeuille à la Commission, à la croissance économique.

C’est sur un ton alarmiste que Viviane Reding a commencé sa présentation, attirant l’attention à l’aide de graphiques sur l’évolution du coût des emprunts obligataires qui connaissent une envolée impressionnante, et ce alors que la part de la dette des Etats membres qui n’est plus dotée d’un triple A par les agences de notation a elle aussi augmenté, ce qui a pour conséquence une augmentation des coûts de refinancement pour nombre d’Etats membres. Viviane Reding évoquant, graphiques à l'appui, l'envolée du coût de la dette le 14 janvier 2011

En bref, "si l’on ne prend pas mesure, on va droit dans le mur", a résumé Viviane Reding avant de rappeler les nombreuses mesures prises par la Commission européenne pour faire face à la crise.

En matière de supervision et de surveillance financière, les efforts ont abouti à la mise en place au 1er janvier 2011 des trois autorités de surveillance qui constituent le nouveau "système européen de surveillance financière" et du Comité européen du risque systémique. Ces nouvelles institutions devraient permettre de mieux anticiper les problèmes à l’avenir.

Mais les initiatives de la Commission ne se sont pas limitées à cela puisque des propositions ont été mises sur la table pour les agences de notation tandis que les hedge funds devraient être mieux encadrés à l’avenir. Autant d’initiatives que le commissaire Michel Barnier viendra présenter en détail au Luxembourg le 11 février prochain.

Augmenter la capacité effective d’emprunt de l’EFSF ne signifie pas nécessairement le renflouement du fonds !

La mise en place du  mécanisme européen de stabilité financière a elle aussi été une réponse à la crise. Et l’objectif présenté par la Commission le 12 janvier 2011 est d’augmenter la capacité effective d’emprunt dont dispose le Fonds européen de Stabilité financière qui est basé à Luxembourg. Il a semblé important à Viviane Reding de revenir sur ce sujet qui a fait les choux gras de la presse dans la semaine sans être, selon elle, toujours bien compris.

Les déclarations de José Manuel Barroso et d’Olli Rehn ont été interprétées par beaucoup de commentateurs comme un appel à un renflouement de ce fonds qui est déjà doté de 440 milliards d’euros provenant de contributions des Etats membres de la zone euro.

Or, le message de la Commission est qu’il faut organiser ce fonds de façon à pouvoir en augmenter la capacité effective de prêts qui est pour le moment de l’ordre de 250 milliards d’euros. Le problème, tel que l’a expliqué Viviane Reding, est en effet que dans les fonds dont dispose l’EFSF, les contributions de pays qui ne sont pas classés AAA par les agences de notation ne permettent pas d’emprunter dans les meilleures conditions. La Commission entend donc proposer une réorganisation de l’EFSF de façon à ce que tous les financements dont dispose ce fonds soient considérés dans leur ensemble et notés au mieux, c’est-à-dire avec un triple A. Il n’est donc pas nécessairement question de renflouer le fonds.

Pour Viviane Reding, qui s’adressait là indirectement à Jean-Claude Juncker, les émissions obligataires que va faire l’EFSF à la fin du mois, ce sont déjà, "ni vu ni connu, des euro-obligations".

Avec le semestre européen, qui marque "le début de la gouvernance économique européenne","l’Europe n’est plus la même"

Mais au-delà de ces mesures, c’est à la "petite révolution" que connaît l’UE que s’est consacrée ensuite Viviane Reding. "Vu que nous vivons dans une communauté solidaire, vu notre interdépendance, il importe de faire en sorte que chacun agisse de façon responsable, en bon père de famille", a expliqué la commissaire pour présenter en quelques mots le "semestre européen" qui vient de commencer dans l’UE.

A ses yeux, à partir de 2011, "l’Europe n’est plus même" puisque le semestre européen, dont le début est un "moment historique", marque pour Viviane Reding "le début de la gouvernance économique européenne" que beaucoup ont appelée de leurs vœux au plus fort de la crise.

Viviane Reding à Luxembourg le 14 janvier 2011En rappelant les principales étapes et le fonctionnement, Viviane Reding a insisté sur le fait que cette nouvelle procédure offrait aux autorités nationales et européennes l’occasion d’un jeu d’équipe dans lequel chacun doit prendre ses responsabilités.

Le principe, c’est que la Commission présente une analyse de la situation, ce qu’elle a fait mercredi 12 janvier, qui soit analysée dans les différentes formations du Conseil de l’UE jusqu’à ce que le Conseil européen décide au mois de mars des grandes orientations à adopter. Viendra alors le moment pour chaque Etat membre d’adapter son budget national à ces orientations générales, sachant que les prescriptions faites par le Conseil sur la base des propositions de la Commission dépendent naturellement de la situation de chacun des Etats membres. La proposition faite par les Etats membres une fois analysée au niveau européen suivra ensuite la procédure nationale de rigueur et passera donc par les parlements nationaux.

Viviane Reding a rappelé en quelques mots les grandes lignes des propositions d’actions faites par la Commission dans son "examen annuel de la croissance" le 12 janvier dernier (pour en savoir plus, consulter l’article détaillé d’Europaforum.lu sur la question). Il s’agirait ainsi de mettre en œuvre un ajustement budgétaire rigoureux, de mener des réformes structurelles sur le marché du travail ainsi que de cibler les investissements en privilégiant les domaines les plus prometteurs en termes de croissance et d’innovation.

La vice-présidente de la Commission a aussi fait référence aux résultats d’une enquête Eurobaromètre présentés le 12 janvier 2011 (résumé sur Europforum.lu) et dans lesquels les citoyens offrent à ses yeux des "réponses étonnantes" qui viennent conforter les efforts faits par la Commission. Selon cette enquête, 77 % des Européens jugent nécessaire une plus forte coordination des politiques économiques pour combattre la crise et 75 % d’entre eux sont favorables à un renforcement de la supervision des grands groupes financiers internationaux par l’UE. Viviane Reding a aussi relevé un certain regain d’optimisme en Allemagne, au Luxembourg (+ 21 points) et en Autriche par rapport à l’an dernier, même si elle ajoute que le pessimisme a gagné du terrain en Irlande et en Grande-Bretagne. Viviane Reding a souligné aussi que la confiance dans les institutions européennes était plus importante dans l’UE que la confiance dans les institutions nationales et dans les institutions supranationales.

Au-delà de l’analyse globale de l’économie européenne et des problèmes que l’UE doit résoudre, la Commission a aussi procédé dans son examen à une analyse de la situation des différentes Etats membres, et dans ce contexte, le Luxembourg compte "parmi les meilleurs" comme l’a souligné Viviane Reding, ce qui ne signifie pas pour autant que le Grand-Duché, qui dispose certes d’une certaine marge de manœuvre par rapport à bien d’autres Etats membres, n’a pas d’efforts à faire. Et elle a repris pour illustrer son propos les objectifs que s’est fixés le Luxembourg dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

Mais le principal message de Viviane Reding, qui s’adressait là explicitement à la Chambre des députés, mais aussi aux syndicats, c’est que, dans le mesure où le Luxembourg dépend grandement de ses voisins, tous les acteurs impliqués dans le semestre européen ont tout intérêt à en jouer le jeu pour que le Luxembourg n’ait pas à subir les conséquences de ce que pourraient faire d’autres Etats membres si ce mécanisme n’était pas mis en place pour garantir une certaine coordination des politiques budgétaires. "Chaque commissaire, chaque gouvernement, chaque parlement national doit jouer le jeu, chacun a sa part de responsabilité", a conclu Viviane Reding.

Que fait Viviane Reding pour contribuer à la croissance économique dans le cadre du portefeuille de la Justice ?

Viviane Reding s’est ensuite évertuée à présenter rapidement les initiatives prises ou prévues dans son domaine de compétence, la justice, pour contribuer à résoudre les problèmes économiques auxquels fait face l’UE.

En plus des 27 droits contractuels nationaux, devrait venir s’ajouter prochainement un 28e droit contractuel européen qui permettrait de faciliter la vie des entreprises, notamment les PME, qui ont des activités transfrontalières. En mai, l’initiative a été lancée et les experts impliqués devraient présenter le fruit de leurs travaux au printemps 2011 tandis que la Commission entend mettre sur la table une proposition à l’automne 2011

En matière de recouvrement transfrontalier des créances, un problème que Viviane Reding juge structurel, la Commission va proposer en juin 2011 l’introduction d’une procédure judiciaire.

De même, dans le souci de réduire les formalités administratives dans les affaires mettant en cause entreprises et consommateurs, la Commission vient de proposer de supprimer l’exequatur.

En matière de protection des données personnelles, une proposition de réforme de la directive y relative sera présentée à l’automne 2011 avec l’objectif d’offrir une meilleure protection des individus, mais aussi de simplifier la vie des entreprises, et ce tout en offrant des règles applicables à toute l’UE.

La Commission entend mieux protéger sur le plan juridique les intérêts financiers de l’UE – et des contribuables européens - en s’efforçant de criminaliser les fraudes qui peuvent exister dans l’utilisation des fonds européens. L’objectif est de limiter les pertes financières liées aux irrégularités observées chaque année.

Enfin, Viviane Reding, convaincue des avantages que présente un équilibre entre les genres au sein des équipes de management dans les entreprises, a-t-elle annoncée la tenue le 1er mars prochain d’une réunion avec les grands patrons des entreprises cotées en bourse afin de leur soumettre l’objectif d’arriver à un taux de 30 % de représentation des femmes dans les CA d’ici 2013, puis de 40 % en 2020.