Les ministres de la Justice de l’UE se sont réunis en Conseil le 23 septembre 2011. François Biltgen y représentait le Luxembourg.
En amont du Conseil, le ministre luxembourgeois de la Justice a eu une réunion de concertation bilatérale avec son homologue français, Michel Mercier. Les deux délégations se sont d’abord concertées sur le droit européen des contrats. Ils ont ensuite eu un échange de vues au sujet de la formation judiciaire, sujet sur lequel la Commission a présenté au Conseil une communication pour assurer que davantage de professionnels de la Justice puissent se voir offrir des programmes de formation européenne.
Lors de la réunion du Conseil, les ministres ont constaté un accord sur le projet de directive relative à la décision de protection européenne en matière pénale qui porte sur la reconnaissance mutuelle des décisions nationales prises afin de protéger les victimes d’infractions. Le but de la directive est de continuer à protéger des personnes qui bénéficient d’une telle protection dans leur pays d’origine lorsqu’ils se déplacent vers d’autres États membres.
Les ministres ont en outre été informés sur une proposition de règlement portant création d'une ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires, destinée à faciliter le recouvrement transfrontière de créances en matière civile et commerciale
Un des grands sujets de discussion des ministres de l’UE concernait la proposition de directive sur l’accès à un avocat. Il s'agit pour l'UE d'harmoniser les garanties procédurales minimales en matière pénale et de transcrire dans le droit de l'Union européenne la jurisprudence dite "Salduz" de la Cour européenne des droits de l'homme. Le texte proposé fixe des normes minimales communes, applicables partout dans l'Union européenne, concernant les droits des personnes soupçonnées ou poursuivies dans le cadre de procédures pénales d'avoir notamment accès à un avocat.
Selon le ministre François Biltgen, il est essentiel que les citoyens puissent circuler librement en sachant que les garanties procédurales sont respectées partout dans l'Union. Selon lui, il faut un niveau d'ambition élevé, à l'image de celui retenu par la Commission dans sa proposition, même si sur certains aspects la proposition mérite d'être retouchée pour mieux tenir compte des contraintes de la pratique. "Il s’agit là d’un point essentiel du programme de Stockholm, et je serais fier si nous pouvions l’évacuer aussi vite que possible", a déclaré le ministre luxembourgeois.
François Biltgen a expliqué comprendre les réticences plus ou moins fortes exprimées par certains Etats membres et il les a résumées en deux points principaux : la question du champ d’application, qui est très large dans la proposition de la Commission puisqu’il comprend toute infraction pénale, et les problèmes de coût que soulève la question de l’assistance judiciaire qui n’est pas abordée dans la proposition. Le ministre a aussi mis le doigt sur la mise en œuvre pratique de la proposition, le nombre d’avocats pénalistes étant limité.
S’appuyant sur les travaux menés au Luxembourg par un groupe de travail constitué de représentants du parquet, de la police et d’avocats pénalistes qui s’attache à la préparation d’une réforme de l'instruction criminelle qui garantirait en particulier aux personnes privées de liberté un accès à un avocat dès les débuts de l'enquête pénale, François Biltgen a émis au Conseil quatre propositions concrètes qui pourraient, selon lui, permettre d’aboutir à un bon compromis au niveau européen.
François Biltgen suggère ainsi de réduire le champ d’application de la directive en excluant notamment les infractions au droit de la circulation, mais aussi en veillant à ne pas étendre le droit d’accès à un avocat à toutes les sortes d’enquêtes ou de collectes de preuves. Il convient selon lui cependant de donner à l’avocat un droit de contrôle sur les conditions de détention.
La proposition prévoit que les dérogations soient formulées par le biais de cinq conditions cumulatives. Ce que François Biltgen juge trop restrictif.
Par ailleurs, François Biltgen plaide pour que soit appliqué le principe de proportionnalité pour ce qui est des voies de recours. Sur ces deux points François Biltgen a invité à se référer à l’arrêt Salduz, qu’il s’agit de ne pas outrepasser.
Enfin, le ministre a appelé à ce que soit fixé un agenda concernant la discussion qu’il convient selon lui de mener au sujet de l’assistance judiciaire : sans coopération entre Etats membres, cette dernière serait appliquée sans tenir compte de la réelle nécessité de cette aide pour les personnes concernées. Ce qui aurait un coût important dans la mesure où les normes minimales prévues sont élevées.