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Dans un entretien diffusé sur RTL, Jean Asselborn évoque les difficultés que pourrait poser la ratification du pacte budgétaire en France
Le ministre réitère son inquiétude quant aux dérives autoritaires de Budapest
04-02-2012


Dans une interview donnée le 4 janvier 2012 sur les ondes de RTL au journaliste Roy Grotz, le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, développe quelques points de son approche de la politique européenne, face à la crise, face aux défis institutionnels posés par le pacte budgétaire, dont la ratification risque par ailleurs de poser des problèmes, notamment en France, mais aussi face aux inquiétudes que la politique du gouvernement hongrois soulève en ce qui concerne le respect des valeurs fondamentales de l’UE.

Des dirigeants politiques luxembourgeois d’accord sur l’essentiel quand il s’agit de l’UE

rtlLes Luxembourgeois et leurs dirigeants politiques, même venant d’horizons différents, doivent être unis sur l’essentiel, explique Jean Asselborn, surtout quand il s’agit de veiller à ce qu’une Europe intégrée et forte aille dans la bonne direction, et émettre les messages nécessaires, car sans cette Europe, le Luxembourg aurait de la peine à se retrouver sur l’échiquier mondial. "Je pense que c’est ce que fait notre Premier ministre pour l’Eurogroupe", déclare le socialiste au sujet de son collègue chrétien-social, "et moi, j’essaie d’y apporter ma modeste contribution en m’engageant au niveau de la politique étrangère pour ceux qui travaillent pour plus de stabilité et de reconnaissance du droit international".

Jamais, depuis la seconde guerre mondiale, pense Jean Asselborn, il n’a été aussi difficile de gouverner, et ce à cause de la crise. L’équilibre budgétaire, la réforme de la caisse de santé, maintenant la réforme du système des pensions ont été menés ou sont abordés, et il est donc faux selon lui de reprocher au gouvernement de ne pas s’attaquer aux grands problèmes, même s’il est parfois difficile, dans un environnement en fluctuation continuelle, de savoir par quel bout prendre les choses.

Le pacte budgétaire et les problèmes de fond qu’il soulève

Au niveau européen, il est clair pour Jean Asselborn qu’il faut actuellement aller au-delà du pacte budgétaire, car selon lui, la légitimité de l’Union est autre : l’enjeu en est en effet que jamais plus les Européens ne devront se faire la guerre. Cela ne suffit plus à légitimer l’Union, reconnaît-il, mais c’est le fondement de sa légitimité, pense néanmoins Jean Asselborn.

Ce qui dérange Jean Asselborn dans le pacte budgétaire, ce n’est pas son contenu. "Ce qui me dérange, c’est que c’est la première fois que nous essayons de résoudre nos problèmes en dehors des traités européens communs". Maintenant, pense le ministre, alors qu’il serait vain de revenir sur son bien-fondé ou non, il s’agit de tirer le meilleur de ce traité et de veiller à ce qu’il soit ratifié.

Pour lui, la France, qui a pourtant poussé sous l’actuel président vers ce pacte, pourrait poser problème. Le traité pourrait ne pas être ratifié avant les présidentielles, donc au cours du premier semestre 2012. Ensuite, il faudra attendre le vote des deux chambres, l’Assemblée nationale, qui sera renouvelée en juin 2012, et le Sénat, qui ne changera pas, et il est donc possible que l’on opte en France pour le référendum. "Et un référendum sera impossible à remporter", juge Jean Asselborn.

Au vu de ces problèmes, Jean Asselborn espère pour l’Union que la ratification ne se fera pas avec des difficultés de ce genre. Si des pays signataires ne pouvaient pas devenir une partie contractante, "ce serait mauvais pour nous tous, y compris pour le Luxembourg". Comme ce n’est pas bon par ailleurs selon lui pour le futur de l’Union que l’on se passe de plus en plus souvent en son sein de la méthode communautaire pour lui préférer la méthode intergouvernementale.

Les dérives autoritaires de Budapest

Depuis plus d’un an, Jean Asselborn a dénoncé à plusieurs reprises les dérives autoritaires du gouvernement hongrois. Pour le journaliste Roy Grotz, cela "fait de lui un représentant diplomatique atypique qui émet des messages clairs". Mais ne faudrait-il pas, comme ministre d’un petit Etat, y aller plus prudemment avec la critique des autres ? Pour Jean Asselborn, il y a va de la crédibilité de l’Union sur tous les continents, puisque sur tous les continents, elle défend les droits de l’homme et l’Etat de droit, et c’est ce que fait le ministre lui aussi, qui passe au fil de tous ses voyages par tous les continents. S’il y a donc un Etat membre au sujet duquel il faut se demander s’il respecte encore la liberté de la presse, le principe de la séparation des pouvoirs, comme c’est le cas pour la Hongrie, alors la crédibilité du projet européen est entamée, pense le chef de la diplomatie luxembourgeoise. "C’est pourquoi je me fais de gros soucis", explique-t-il.

Jean Asselborn a de la peine quand on parle d’un côté d’expulser la Grèce de la zone euro, et quand, de l’autre côté, alors que ce sont les valeurs fondamentales de l’UE qui sont en jeu, on est si tolérant envers Viktor Orban et son parti, le FIDESZ qui ont commencé dès 2010 à saper la liberté des médias par une loi contestée. Pour s’en tirer, ils essaient de modifier deux, trois détails, mais l’on continue à saper l’Etat de droit et la démocratie dans le même esprit, pense le ministre. "Et ça, c’est grave pour l’UE, et j’espère vraiment qu’au niveau du Conseil européen l’on interviendra pour mettre fin à cette évolution."