Un rapport de la Commission européenne publié le 5 mars 2012 montre que de timides progrès ont été réalisés en ce qui concerne l'augmentation du nombre de femmes dans les conseils d'administration des entreprises, un an après l’appel de la commissaire européenne chargée de la justice, Viviane Reding, en faveur de mesures crédibles d'autorégulation. Dans les conseils d'administration des plus grandes entreprises européennes, un membre sur sept seulement est une femme (13,7 %). La situation s’est légèrement améliorée, par rapport au chiffre de 11,8 % de 2010. Il faudrait toutefois encore plus de 40 années supplémentaires, à ce rythme, pour parvenir à un équilibre tangible entre les hommes et les femmes (au moins 40 % des deux sexes).
Il a été démontré que l’équilibre entre les hommes et les femmes à des postes élevés contribuait à améliorer les résultats et la compétitivité des entreprises et à générer des avantages économiques. Un rapport élaboré par McKinsey a constaté par exemple que les entreprises ayant instauré un équilibre hommes-femmes réalisent un bénéfice d'exploitation qui dépasse de 56 % celui des entreprises n’employant que des hommes. Ernst & Young a examiné les 290 sociétés les plus importantes cotées en bourse. Leur constat a été que les gains des entreprises qui comptent au moins une femme dans le conseil d'administration étaient nettement supérieurs à ceux des entreprises qui n'en ont aucune à ce niveau.
Un faisceau d’éléments de plus en plus nombreux montre qu'un meilleur équilibre entre les hommes et les femmes dans le processus décisionnel économique peut générer des avantages économiques importants. La présence accrue de femmes à des postes de direction peut contribuer à un environnement de travail plus productif et innovant, et à l'amélioration des performances globales des entreprises. Cet élément soutient la compétitivité. Les femmes représentent 60 % des nouveaux diplômés de l'enseignement supérieur, mais peu d’entre elles parviennent au sommet des entreprises. Si la porte leur est ouverte à des postes de haut niveau, les femmes seront incitées à intégrer le marché du travail et à y rester, ce qui contribuera à augmenter leur taux d'emploi et permettra une meilleure utilisation de leur potentiel en tant que ressources humaines. "Si nous voulons atteindre l'objectif fixé par la stratégie Europe 2020 – la stratégie de croissance de l’Union européenne – pour amener à 75 % le taux d'emploi des femmes et des hommes âgés de 20 à 64 ans, nous devons faire de l’égalité entre les hommes et les femmes un atout pour la croissance", plaide ainsi Viviane Reding.
La mise en œuvre d’une égalité accrue dans le processus décisionnel est l’un des objectifs de la Charte des femmes, que le président José Manuel Barroso et la vice-présidente Viviane Reding ont lancée en mars 2010. La Commission a donné suite à ces engagements en adoptant, en septembre 2010, la stratégie pour l’égalité entre les femmes et les hommes pour les cinq prochaines années, qui envisage des initiatives ciblées pour renforcer la participation des femmes au plus haut niveau du processus décisionnel économique. Le programme de travail de la Commission européenne pour 2012 annonce une initiative législative concernant l'amélioration de l'équilibre entre hommes et femmes dans les sociétés cotées en bourse.
Pour déterminer les mesures appropriées en vue de remédier au déséquilibre persistant entre hommes et femmes dans les conseils d'administration des sociétés cotées en Europe, la Commission lance une consultation publique. Elle cherche à recueillir des avis quant aux actions envisageables à l'échelle de l'UE, y compris des mesures législatives, pour corriger le déséquilibre entre hommes et femmes qui caractérise les conseils d’administration des entreprises. La consultation publique sera ouverte jusqu'au 28 mai 2012. Après avoir reçu ces contributions, la Commission décidera de la suite à donner dans le courant de l'année.
Le rapport sur l'équilibre entre hommes et femmes dans les conseils d’administration des entreprises de l’Union européenne est publié un an après que la commissaire européenne chargée de la justice, Viviane Reding, a incité fortement les entreprises cotées en bourse en Europe à augmenter volontairement le nombre de femmes dans les conseils d'administration par la signature de l’engagement intitulé "Davantage de femmes dans les conseils d’administration, une promesse pour l’Europe". Une initiative soutenue activement par le gouvernement luxembourgeois lors du Conseil EPSCO du 1er décembre 2011, ainsi que l’indique le rapport de la Commission. En signant cette déclaration d'engagement, les sociétés s'engagent à porter la présence des femmes dans leurs conseils d’administration à 30 % d’ici à 2015 et à 40 % d’ici à 2020. Cependant, seules 24 entreprises ont signé l’engagement dans toute l’Europe au cours des douze derniers mois.
"Il y a un an, j’ai demandé aux entreprises d’augmenter volontairement le nombre de femmes siégeant dans les conseils d’administration", a rappelé Viviane Reding en soulignant que son appel avait reçu l’appui du Parlement européen et avait été transmis aux organisations professionnelles par les ministres de l'emploi, des affaires sociales et de l'égalité entre hommes et femmes dans de nombreux États membres de l’UE. "Je suis toutefois au regret de constater que, en dépit de nos appels, l'autorégulation n’a jusqu’à présent pas produit de résultats satisfaisants", reconnaît-elle un an plus tard.
"L’absence de femmes aux postes de direction dans les entreprises nuit à la compétitivité de l’Europe et constitue un frein à la croissance économique", continue cependant de penser Viviane Reding qui constate que plusieurs États membres de l'Union européenne, notamment la Belgique, la France, l’Italie, les Pays-Bas et l’Espagne, ont commencé à remédier à la situation en adoptant une législation qui introduit des quotas en vue d’une égalité entre hommes et femmes dans les conseils d’administration des entreprises. Certains pays, à savoir le Danemark, la Finlande, la Grèce, l’Autriche et la Slovénie, ont adopté des réglementations concernant l'équilibre entre hommes et femmes dans les conseils d'administration des entreprises publiques.
"Personnellement, je ne suis pas très favorable aux quotas, mais j’apprécie les résultats qu’ils engendrent", a déclaré Viviane Reding qui observe aussi que les entreprises exerçant des activités transfrontières dans le marché intérieur peuvent être tenues de se conformer à différentes législations nationales en matière de quotas, si elles souhaitent participer à des appels d’offres dans le domaine des travaux publics. Le programme de travail législatif de la Commission de 2012 prévoit donc une initiative visant à remédier à cette situation.
La consultation publique lancée par Viviane Reding est donc une invitation au public, autrement dit les entreprises, les partenaires sociaux, de même que les ONG et les citoyens intéressés, à donner leur avis sur la nature des mesures que l'Union européenne devrait prendre pour remédier au déséquilibre entre hommes et femmes dans les conseils d'administration. "Je pense qu’il est grand temps que l’Europe brise le plafond de verre qui empêche encore les talents féminins d’accéder aux plus hautes responsabilités dans les entreprises européennes cotées", plaide en effet Viviane Reding qui entend travailler en étroite collaboration avec le Parlement européen et l’ensemble des États membres pour susciter le changement.
Les progrès réalisés pour améliorer l'équilibre entre les hommes et les femmes dans les conseils d'administration en Europe au cours de l'année écoulée ont été les plus importants de ces dernières années (une hausse de 1,9 point de pourcentage entre octobre 2010 et janvier 2012, contre une hausse de la moyenne à long terme, sur la dernière décennie, de 0,6 point de pourcentage par an). Cette progression est à attribuer aux demandes de la Commission et du Parlement européen, ainsi qu’à un certain nombre d’initiatives législatives nationales. La France, qui a mis en place une législation sur l'égalité hommes-femmes dans les conseils d’administration en 2011, représente à elle seule près de la moitié de cette augmentation dans l'UE.
Globalement, cependant, l'évolution demeure obstinément lente. Le nombre de femmes qui président les principaux conseils d’administration a même diminué, tombant à 3,2 % en janvier 2012 alors qu’il était de 3,4 % en 2010. Il existe aussi des écarts notables entre les pays, les femmes représentant jusqu’à 27 % des membres des conseils d'administration dans les plus grandes sociétés finlandaises et 26 % de ces membres en Lettonie, contre seulement 3 % à Malte et 4 % à Chypre.
Au Luxembourg, les chiffres sont à peine un peu plus élevés, puisque le nombre de femmes présentes au sein des plus hauts organes décisionnels des entreprises atteignaient tout juste 6 % en janvier 2012. On note cependant un progrès de l’ordre de deux points de pourcentage par rapport à octobre 2010. Le Luxembourg compte cependant parmi le groupe de huit Etats membres, qui représentent presqu’un tiers des pays de l’UE, où au moins la moitié des conseils des principales sociétés ne comptent aucune femme.
Les citoyens européens s’accordent clairement à dire que cette situation devrait changer : 88 % d’entre eux (84 % au Luxembourg) considèrent que, à compétences égales, les femmes devraient être représentées à égalité aux postes de direction des entreprises, selon un nouveau sondage Eurobaromètre publié le même jour. En même temps, 76 % des Européens considèrent que les femmes possèdent les compétences nécessaires.
75 % des personnes interrogées (70 % au Luxembourg) sont en faveur d'une législation sur l'égalité entre hommes et femmes dans les conseils d’administration des entreprises, la majorité relative des personnes interrogées (49 % dans l’UE) ayant indiqué que des amendes constitueraient le meilleur moyen de faire respecter cette législation. Une option privilégiée par 41 % des répondants au Luxembourg, en sachant qu’un tiers des répondants ont spontanément répondu qu’aucune des mesures proposées (pas de marché public, annulation des décisions prises par le conseil d’administration, annulation de la nomination des membres du genre surreprésenté ou dissolution de la compagnie) ne serait la plus efficace. Au Luxembourg, plus de la moitié des répondants (55 %) estiment que les mesures pour améliorer l’égalité entre hommes et femmes dans les conseils d’administration des entreprises devraient être prises au niveau européen, un avis partagé par 35 % des sondés en moyenne dans l’UE.