En décembre 2010, la Commission européenne mettait sur la table une proposition visant à modifier le règlement (CE) n° 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale et le règlement (CE) n° 987/2009 fixant les modalités d'application de ce règlement de base.
Ces deux règlements destinés à moderniser la coordination des systèmes de sécurité sociale sont appliqués dans l'ensemble des États membres de l'Union depuis le 1er mai 2010. Le risque restait cependant que les références faites au droit national dans la législation de l'Union coordonnant les systèmes de sécurité sociale, parfois devenues caduques, ne soient une source d'incertitude juridique pour les différents protagonistes amenés à appliquer les règlements. Par sa proposition, la Commission entendait donc mettre à jour les références présentes dans ces deux règlements afin que celles-ci donnent une image correcte de l'évolution des législations nationales et des changements de la réalité sociale.
Après plus d'un an de discussions, le Conseil s'est accordé le 1er décembre 2011 sur une "approche commune" visant à mettre à jour les règlements 883/2004 et 987/2009.
Le Parlement, de son côté, a intégré la position du Conseil dans ses amendements en vue d'obtenir un accord en première lecture.
Le texte a été adopté en première lecture par les eurodéputés réunis en plénière le 18 avril 2012. La résolution législative a été adoptée par 540 voix pour, 19 contre et 30 abstentions.
"Ces nouvelles règles permettront un meilleur fonctionnement du marché intérieur en améliorant la protection sociale d'un grand nombre de travailleurs mobiles tels que le personnel navigant des compagnies aériennes et les indépendants frontaliers", a déclaré Milan Cabrnoch (Conservateurs et réformistes), rapporteur du Parlement européen, lors du débat en plénière.
Ce nouveau règlement introduit le concept de "base d'affectation" pour accorder des droits à la sécurité sociale au personnel navigant des compagnies aériennes. Ainsi, la base d'affectation est définie comme le lieu où le personnel "débute et termine son service" et où l'opérateur "n'est pas tenu de loger le membre de l'équipage".
Jusqu'à présent, un vide juridique dans la législation européenne permettait à quelques compagnies à bas coûts d'appliquer la législation la moins coûteuse en matière de sécurité sociale, indépendamment de la base d'affectation des membres de l'équipage.
Du côté de Ryanair, compagnie aérienne low-cost systématiquement citée dans la presse dans ce dossier, la réaction est pour le moins vive, comme le montrent les déclarations du directeur de la communication, Stephen McNamara, rapportées par Le Soir dans son édition du 19 avril 2012. "C'est une nouvelle illustration de la manière dont l'Europe introduit une réglementation qui n'a d'autre but que d'augmenter le coût du voyage aérien et de réduire la compétitivité entre les États membres de l'Union", juge-t-il en effet, dénonçant même "une nouvelle entrave à la liberté de mouvement des travailleurs qui était pourtant un des principes fondateurs du marché unique". "On peut supposer que dorénavant les opérateurs de ferries et de bateaux de croisière devront aussi payer taxes et sécurité sociale dans chaque port de départ ; et que les fonctionnaires européens devront payer taxes et sécurité sociale dans leur pays d'origine plutôt qu'aux taux réduits dont ils profitent à Bruxelles", s’est-il plu à imaginer.
Par ailleurs, ces nouvelles règles clarifient également la situation des travailleurs indépendants frontaliers (qui rentrent dans leur pays de résidence au moins une fois par semaine) quant à leur accès aux prestations de chômage.
Si un indépendant exerce ses activités dans un pays qui prévoit un régime de prestations de chômage pour les indépendants et réside dans un État membre frontalier qui ne prévoit pas de système d'indemnisation pour les indépendants, il pourra percevoir des indemnités de chômage du pays dans lequel il a travaillé, selon le texte.
Par exemple, la France et la Belgique ne disposent pas de régime d'assurance chômage pour les indépendants contrairement à leurs voisins allemands et luxembourgeois. "Le travailleur indépendant qui a dû cesser son activité en raison de difficultés économiques et financières ou par le fait d'un tiers, a droit au chômage, à condition qu'il soit domicilié sur le territoire luxembourgeois au moment de la cessation de son activité, qu'il s'inscrive comme demandeur d'emploi, qu'il justifie de 5 années au moins d'assurance obligatoire à la caisse de pension des artisans, des commerçants et industriels, à la caisse de pension agricole ou à la caisse de pension des employés privés et qu'il ait été indépendant pendant depuis au moins 6 mois avant le dépôt de la demande d'indemnisation", indique ainsi le site de la Chambre des Métiers. Avec l’entrée en vigueur de ce nouveau règlement, la condition de résidence ne devrait donc plus valoir pour les indépendants frontaliers qui exercent au Luxembourg.