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Bilan Compétitivité 2012 : alors que le Luxembourg, en 11e position parmi les 27 pays de l'UE, recule de 3 places et sort du top-10, le ministre de l'Economie veut lancer un débat de consultation pour "réinventer le modèle luxembourgeois"
23-10-2012


comp-allegrezza-schneiderLe 23 octobre 2012, le directeur du Statec, Serge Allegrezza, et le ministre de l'Economie, Etienne Schneider, ont présenté le Bilan compétitivité 2012. Dans ce rapport baptisé "Vents contraires", l'indice synthétique de compétitivité place désormais le Luxembourg en 11e position parmi les pays de l'UE pour 2011, soit trois places de moins qu'en 2010. Le pays se retrouve ainsi à la position qu'il occupait en 2006. 

Le ministre de l'Economie a d'emblée mis en garde contre un usage exclusif de ce seul classement. L'indice synthétique est en effet le résultat d'un calcul impliquant 78 indicateurs qui explorent dix domaines de la compétitivité définie comme "la capacité d’une nation à améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur procurer un haut niveau d'emploi et de cohésion sociale tout en préservant l’environnement". "Il y a des indicateurs très précis avec lesquels travailler et voir comment on peut ponctuellement, avec les partenaires sociaux, les améliorer", a-t-il dit.

Le domaine de la cohésion sociale a progressé, à la faveur notamment du recul de la pauvreté et des inégalités. En la matière, le Luxembourg est 5e (juste derrière la France 4e et la Belgique 3e, loin devant l'Allemagne 15e). Alors qu'il est en tête en termes de performances macroéconomiques, le Luxembourg est 10e pour l'emploi (l'Allemagne 3e, la Belgique 12e et la France 13e). Par contre, dans la catégorie "productivité et coût du travail", le Luxembourg se retrouve en 23e position parmi les Etats membres de l'UE (l'Allemagne est 9e, la Belgique 16e et la France 13e).

En terme d'environnement, il figure toujours à la dernière position (l'Allemagne est 17e, la Belgique 20e et le France 19e), en raison notamment du tourisme à la pompe, souligne Etienne Schneider. "Il y a une série de facteurs qu'on ne peut pas influencer sans avoir d'autres problèmes", dit-il, évoquant la perte d'un milliard d'euros, soit 10 % du total du budget national, en cas de réajustement des accises sur l'essence. "Ce serait une chute dramatique. On doit se demander si c'est ce que l'on veut en ce moment."

En réponse à la suggestion d'un journaliste, le ministre de l'Economie a contesté que le gouvernement abandonne la question écologique et mentionné à ce titre le plan pour l'efficacité énergétique.

Un autre sujet d'inquiétude est la 23e position détenue dans la catégorie « entreprenariat » (la France est 5e, l'Allemagne 21e et la Belgique 26e). A ce sujet, le ministre de l'Economie a réitéré son appel à un changement de mentalité qui mette fin à "la peur de l'échec dans notre culture" et permette de redonner à la jeunesse "le goût de l'esprit d'entreprise. "

Dans la catégorie "éducation et formation", le Grand-Duché est 12e (l'Allemagne 13e, la Belgique 19e et la France 17e).

Le ministre veut un débat de consultation sur la croissance et la compétitivité

comp-etienne-schneiderLe ministre de l'Economie a confié qu'il écrirait à la Chambre durant les jours suivant la publication du rapport afin de provoquer un débat de consultation sur la croissance et la compétitivité de l'économie luxembourgeoise. "Je pense que nous sommes dans un moment immensément mouvementé, et qui ne le sera vraisemblablement pas moins ces prochaines années, et je suis convaincu que le modèle luxembourgeois tel que nous le connaissons ne pourra pas être maintenu éternellement. (…) Nous devons nous réinventer." Etienne Schneider envisage que les débats à la Chambre soient précédés également d'hearings avec les acteurs concernés.

Il a par ailleurs également annoncé qu'aurait lieu prochainement la table ronde sur la simplification des procédures, qui doit permettre d'attirer davantage d'investissements, telle que l'avait annoncée le Premier ministre lors du débat sur la déclaration sur l'Etat de la nation.

En amont donc du débat qui se profile, le ministre de l'Economie a fait savoir qu'il considérait que cette dégradation de la compétitivité luxembourgeoise ne devrait pas donner lieu à des revendications excessives. En introduction au rapport, il écrit : "Le Luxembourg doit affronter une période de transformations difficiles, voire douloureuses. (…) Faire face à ces défis ne pourra pas se faire par une diminution spectaculaire des coûts. L'attention doit se porter sur la stimulation de l'innovation et de la montée en gamme des exportations, qui seuls peuvent garantir une performance durable."

Pour autant, Etienne Schneider a confié qu'il n'était pas opposé à de nouvelles économies budgétaires tant qu'elles ne concernent pas des investissements stratégiques. Il rappelle d'ailleurs à ce titre qu'il existe "une règle d'or universelle" qui veut qu'un Etat peut se permettre un déficit public tant qu'il n'est pas supérieur au montant des investissements. Invité par un journaliste à citer des exemples d'investissements intouchables, il a évoqué ceux en faveur de l'agrandissement de zones artisanales, du centre logistique et d'un incubateur pour les entreprises actives dans les écotechnologies.

La balance courante du Luxembourg, en excédent, crée des déséquilibres

Dans le cadre de la stratégie Europe 2020, l'Observatoire de la compétitivité, attaché au Ministère de l'Economie, surveille la trajectoire du Luxembourg dans la poursuite des cinq objectifs qu'il s'est fixés. Il analyse également la performance du Luxembourg dans le cadre de la surveillance des déséquilibres macroéconomiques, introduite par la nouvelle gouvernance économique.

Concernant la surveillance des déséquilibres macroéconomiques, "l’indicateur du taux de change effectif réel (TCER) qui est utilisé pour comparer l’évolution des prix et des coûts de l’économie luxembourgeoise par rapport aux prix et coûts de ses principaux partenaires commerciaux montre que la compétitivité-prix et la compétitivité-coûts nationales, deux déterminants essentiels pour les entreprises désirant exporter leurs biens et services, continuent à se détériorer", lit-on à ce sujet dans le communiqué de presse diffusé par le gouvernement.

De même, le Luxembourg obtient un résultat négatif pour ce qui est de la balance courante et de la dette privée, deux nouveaux domaines observés au niveau européen suite à l'analyse faite de la crise économique. Pour ce qui est de la balance courante, la Commission européenne considère que l'excédent enregistré par le Luxembourg, supérieur au plafond qu'elle a fixé, crée des déséquilibres et donc des déficits dans les autres Etats membres, a expliqué Serge Allegrezza.

De la même manière, le calcul de la compétitivité prend désormais en compte l'endettement privé, domaine dans lequel le Luxembourg s'en sort avec un résultat négatif.

Concernant les objectifs fixés au Luxembourg dans le cadre de la stratégie Europe 2020, celui concernant le taux de décrochage scolaire (objectif de moins de 10 %) et la part de personnes âgées de 30 à 34 ans détenant un diplôme de l'enseignement supérieur (objectif : au moins 40 %) est déjà atteint avec des taux respectifs de  6,2 et 48,2 % en 2011.

L'objectif en termes d'investissement public et privé dans la recherche et le développement (entre 2,3 et 2,6 % du PIB) n'est pas encore atteint avec un taux de 1,63 % en 2010. Le directeur du STATEC fait remarquer que celui-ci est fortement influencé par la conjoncture étant donné que le secteur privé a un poids prépondérant en la matière.

Interrogé sur la réforme de l'indexation des salaires, recommandée par la Commission européenne dans le cadre du semestre européen, le ministre de l'Economie s'est contenté de rappeler que ce sera au prochain gouvernement de prendre une décision. "Ce sera un des sujets les plus importants de la campagne de 2014", parie-t-il. "Les partis devront se positionner sur cette question. Mais ce n'est pas le seul problème."

A noter que le Bilan compétitivité 2012 compare les différents classements et indicateurs composites élaborés des organisations internationales et communique sur les résultats d'une série d'études destinées à alimenter, appuyer et explorer différentes facettes de la compétitivité structurelle du pays.