En février et mai 2007, l’organisme EPSO, chargé de l’organisation des procédures de recrutement des fonctionnaires de l’Union, a publié des avis de concours pour les administrateurs et assistants dans le domaine de l'information, de la communication et des médias. Ces avis ont été publiés en langues allemande, anglaise et française au Journal Officiel de l'Union Européenne (JOUE). En ce qui concerne l'admission et le déroulement des tests d'accès, une connaissance approfondie d'une des langues officielles de l'Union en tant que langue principale et une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français en tant que deuxième langue différente de la principale étaient exigées. Par ailleurs, il était prévu que les convocations, la correspondance entre l'EPSO et les candidats et les tests d’accès se dérouleraient uniquement en allemand, en anglais ou en français. Les mêmes conditions étaient prévues pour l'admission aux épreuves écrites, ainsi que pour le déroulement de celles-ci.
En juin et juillet 2007, EPSO a publié deux amendements au JOUE, dans toutes les versions linguistiques, renvoyant expressément à la version intégrale des avis déjà publiés en langues allemande, anglaise et française et rouvrant les délais de présentation des candidatures.
L'Italie a saisi le Tribunal de recours pour l'annulation des avis. Cet État a contesté essentiellement l’absence de publication intégrale des avis dans les langues officielles autres que les langues allemande, anglaise et française, ainsi que la limitation arbitraire du choix de la deuxième langue à trois langues seulement pour la participation aux concours, la communication avec l’EPSO et le déroulement des épreuves.
Le Tribunal ayant rejeté ces recours par un arrêt du 13 septembre 2010, l’Italie a formé un pourvoi devant la Cour de justice en faisant valoir que le Tribunal, en confirmant la validité des avis, avait commis une erreur de droit.
Dans son arrêt rendu le 27 novembre 2012, la Cour examine, en premier lieu, l’absence de publication intégrale des avis dans toutes les langues officielles. Elle rappelle que le régime linguistique de l'Union européenne définit comme langues officielles et langues de travail des institutions de l'Union les 23 langues actuelles de l’Union, que le JOUE doit paraître dans toutes les langues officielles et que selon le statut des fonctionnaires de l'Union, un avis de concours général doit être publié au JOUE.
Dès lors, la combinaison de ces règles implique que les concours litigieux auraient dû être publiés intégralement dans toutes les langues officielles. Ces dispositions ne prévoyant pas d’exception, le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la publication ultérieure des amendements avait remédié à l’absence de publication intégrale.
En tout état de cause, partant du présupposé que les citoyens de l’Union européenne lisent le JOUE dans leur langue maternelle et que cette langue est l’une des langues officielles, un candidat potentiel dont la langue maternelle n'est pas l’une des trois langues de la publication intégrale des avis aurait dû se procurer le JOUE dans l’une de ces langues et le lire dans cette langue avant de décider de se porter candidat. Un tel candidat était donc désavantagé par rapport à un candidat de langue maternelle anglaise, française ou allemande, en ce qui concerne tant la compréhension correcte des avis que le délai pour préparer et envoyer sa candidature.
En second lieu, la Cour examine la limitation du choix de la deuxième langue pour la participation à un concours. Elle constate qu’une telle limitation peut être justifiée par l’intérêt du service. Selon la Cour, des règles limitant le choix de la deuxième langue doivent prévoir des critères clairs, objectifs et prévisibles, pour permettre aux candidats de connaître suffisamment à l'avance les connaissances linguistiques requises et pouvoir se préparer aux concours dans les meilleures conditions.
Or, les institutions concernées par les concours n’ont jamais adopté de règles internes déterminant les modalités d’application du régime linguistique en leur sein. La Commission n’a pas non plus invoqué l’existence d’autres actes, tels que des communications stipulant les critères pour une limitation du choix d’une langue en tant que deuxième langue pour participer aux concours. Enfin, les avis litigieux ne contenaient aucune motivation justifiant le choix des trois langues retenues.
Afin que les institutions puissent s’assurer les meilleurs candidats (en termes de compétence, de rendement et d’intégrité) il peut être préférable que ceux-ci soient autorisés à présenter les épreuves de sélection dans leur langue maternelle ou dans celle qu'ils maîtrisent le mieux. Par ailleurs, les connaissances linguistiques constituent un élément essentiel de la carrière des fonctionnaires et les institutions peuvent contrôler les efforts dont ceux-ci font preuve pour les mettre en pratique et en acquérir éventuellement de nouvelles. Il appartient donc aux institutions de mettre en balance, d’une part, la limitation du nombre de langues des concours et, d’autre part, l’objectif d’identifier les candidats ayant les plus hautes qualités de compétence et les possibilités d’apprentissage par les fonctionnaires recrutés des langues nécessaires à l’intérêt du service.
Par conséquent, la Cour annule l'arrêt du Tribunal. Statuant définitivement sur ce litige, elle annule également les avis des concours généraux. En revanche, afin de préserver la confiance légitime des candidats sélectionnés, les résultats des concours ne seront pas remis en cause.