Le 29 novembre 2012, les eurodéputés de la Commission ECON ont approuvé à une nette majorité la proposition de recommandation rédigée par Anni Podimata (S&D) qui donne son feu vert au lancement d’une coopération renforcée visant à introduire une taxe sur les transactions financières.
Devant l’impossibilité de parvenir à l’unanimité au Conseil sur la base de la proposition qu’avait présentée la Commission en septembre 2011, plusieurs Etats membres ont demandé à avancer dans la création d’une telle taxe dans le cadre de ce mécanisme introduit par le traité de Lisbonne. Après analyse de ces demandes, la Commission a conclu le 23 octobre 2012 que toutes les conditions juridiques requises étaient remplies pour que le Conseil autorise les onze Etats membres intéressés à avancer ensemble. Il s’agit de l’Allemagne, de l’Autriche, de la Belgique, de l’Espagne, de l’Estonie, de la France, de la Grèce, de l’Italie, du Portugal, de la Slovénie et de la Slovaquie Une fois qu’ils auront l’autorisation du Conseil, qui en décidera à la majorité qualifiée, et du Parlement européen, la Commission mettra sur la table une proposition de fond.
Au sein de la Commission ECON, 32 votes ont été prononcés en faveur de cette autorisation, 6 s’y sont opposés, tandis qu’il y a eu une abstention. Anni Podimata ne s’est pas étonnée de ce vote favorable ; elle avait déjà joué le rôle de rapporteur lorsque le Parlement a adopté en mai 2012 une résolution appelant à la création d’une TTF.
Astrid Lulling, qui a joué le rôle de rapporteur fictif pour le groupe PPE dans ce dossier sensible au Luxembourg, a aussitôt réagi par voie de communiqué. L’eurodéputée luxembourgeoise n’a jamais caché ses réserves à l’égard de cette procédure, mais, rapporte-t-elle, "elle s’est pliée à la volonté majoritaire exprimée par les députés de son groupe".
Mais, elle n’a pas manqué de regretter que le Parlement se contente de donner un accord sur le principe alors que la proposition de fond de la Commission n’est pas encore connue.
Car si le commissaire Algirdas Semeta a annoncé, le 23 octobre dernier, que la proposition qui sera faite par la Commission se basera très largement sur la proposition initiale de septembre 2011, Astrid Lulling relève que cette dernière introduisait "une extraterritorialité assez large" dans le but affiché d’éviter "une délocalisation des opérations financières". Or, si cette logique pouvait prévaloir à l’échelle de l’UE, dans le cadre d’une coopération renforcée, Astrid Lulling se demande "quelle sera l’étendue exacte de cette extraterritorialité".
"Cela dépendra des propositions et des négociations", estime l’eurodéputée qui présage que les travaux seront compliqués, et ne concerneront pas que les Etats membres désireux d’avancer dans le cadre de la coopération renforcée. "Si un institut financier d'un Etat membre extérieur à la coopération renforcée effectue une opération sur une valeur provenant d'un Etat membre qui fait le jeu de la coopération renforcée, il y a fort à parier que la taxe sera exigible, de même que lorsqu'il effectue une opération avec un institut qui aura son siège dans cette même zone", augure en effet Astrid Lulling. Elle appelle par conséquent à ce que le problème soit posé en toute transparence. Et elle souligne qu’elle aurait préféré que le vote autorisant la coopération renforcée se fasse "en connaissance de cause". Mais, glisse-t-elle, "manifestement certains ont intérêt à cultiver un certain mystère", ce qui n’est "pas sain et pourrait réserver son lot de mauvaises surprises", met en garde Astrid Lulling.