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Succession de Jean-Claude Juncker à la présidence de l'Eurogroupe : les eurodéputés luxembourgeois semblent pencher pour la nomination du commissaire européen Olli Rehn
13-12-2012


rtlEn amont du Conseil européen des 13 et 14 décembre 2012, RTL Radio Lëtzebuerg a diffusé un reportage dans lequel quatre des six eurodéputés luxembourgeois expriment leur avis sur la nomination du futur président de l'Eurogroupe et l'étendue de son mandat. Le sommet devait en effet lancer les discussions préparatoires à la nomination d'un successeur à Jean-Claude Juncker, qui a fait savoir le 3 décembre 2012, qu'il voulait passer la main rapidement, à la fin du mois de janvier 2013 au plus tard.

Finalement, les tractations n'auront guère avancées durant le Conseil européen. A l'issue de la rencontre, Jean-Claude Juncker a expliqué qu'il s'entretiendrait du sujet dans les prochaines semaines avec le président du Conseil européen. Déclarant ne pas avoir de favori, il s'est dit sûr qu'il aurait un successeur au mois de février.

Robert Goebbels en faveur d'Olli Rehn pour succéder à Jean-Claude Juncker

La veille de la diffusion du reportage de RTL, l'eurodéputé socialiste, Robert Goebbels, avait fait part, par communiqué de presse interposé, qu'il était favorable à la nomination d'Olli Rehn, l’actuel commissaire européen aux affaires monétaires, comme président à plein temps de l’Eurogroupe. "Une telle présidence renforcerait la cohésion entre la Commission et l’Eurogroupe", y soulignait l'élu. "Cela diminuerait le nombre de ceux prétendant parler au nom de l’Eurogroupe, réduisant ainsi quelque peu la cacophonie actuelle après les réunions de l’Eurogroupe."

Robert Goebbels rappelait que lors du Conseil européen du 26 octobre 2011, les chefs d’Etat et de gouvernement avaient adopté "dix mesures pour améliorer la gouvernance de la zone euro", parmi lesquelles la cinquième visait une organisation plus structurée des travaux de l’Eurogroupe. Cette  mesure affirmait : "Le président de l’Eurogroupe est élu conformément au protocole n°14 annexé aux traités. La décision sur la question de savoir s’il devrait être élu par les membres de l’Eurogroupe en leur sein ou être un président à temps plein basé à Bruxelles sera prise à l’expiration du mandat de l’actuel président de l’Eurogroupe“. Pour Robert Goebbels, c'est donc le moment de choisir. Et lui a choisi : "un président à temps plein basé à Bruxelles".

Frank Engel : "Ce n'est pas quelque chose que l'on peut faire depuis son pays, entre 15 h et 15 h 30, entre sept autres coups de téléphones à donner et des conseils des ministres"

"Différents noms circulent, de personnes qui le feraient plus ou moins bien. Mais ce dont on a vraiment besoin, c'est de quelqu'un qui peut s'en occuper en permanence et qui, comme les chefs d'Etat et de gouvernement l'ont dit, est basé à Bruxelles", a expliqué de nouveau Robert Goebbels au micro de RTL. L'exemple du mandat de Jean-Claude Juncker montre qu'il est difficile de cumuler ce mandat avec un autre. "Il dit lui-même que c'est un travail d'au moins quatre heures par jour. On ne peut pas le faire quand on est ministre des Finances allemand ou français ou quand on est Premier ministre du Luxembourg", constate l'eurodéputé socialiste qui ajoute : "Aussi longtemps que l'Eurogroupe était un club, dans le bon vieux temps, quand il n'y avait pas beaucoup à décider, c'était simple. Mais ces temps-ci, on a besoin de quelqu'un qui est présent dans la durée à Bruxelles."

Les eurodéputés Déi Gréng, Claude Turmes, et  CSV, Frank Engel, partagent cette analyse. "On l'a vu avec M. Juncker. Le fait qu'il était chef de l'Eurogroupe avait pour conséquence qu'il n'était jamais au Luxembourg Si l'euro doit être bien géré dans les règles de l'art, cela ne peut alors être assuré que par un président à plein temps", a déclaré Claude Turmes sur les ondes.

Pour Frank Engel, il faudra d'autant plus de temps au président de l'Eurogroupe que sa tâche est rude. Il devra en effet "mener un travail très solide de réflexion et de prospection pour trouver ce que nous ferons à l'avenir de la zone euro et de l'euro, et comment nous pouvons les stabiliser durablement. Ce n'est pas quelque chose que l'on peut faire depuis son pays, entre 15 h et 15 h 30, entre sept autres coups de téléphones à donner et des conseils des ministres."

Claude Turmes considère toutefois qu'il n'y a pas lieu de créer un nouveau poste, pas même une nouvelle institution. Il estime que serait une bonne chose de rapprocher l’Eurogroupe de la Commission européenne, puisque "la Commission européenne fut toujours au centre de l'exécutif européen". De plus, le nouveau nommé disposerait déjà, en pareilles circonstances, d'un "staff immense pour gérer convenablement et de manière professionnelle".

Frank Engel pense que le Luxembourg doit s'employer à défendre la nomination du Commissaire européen en charge de l'économie, Olli Rehn. "Un vice-président de la Commission européenne (…) doit avoir assez d'autorité, pour présider 17 ministres des Finances. Il ne leur donne aucune instruction, ne les commande pas. Mais il prépare les réunions, comme le fait M. Van Rompuy avec le Conseil européen. Et pour faire cela, on ne peut pas exiger beaucoup plus de légitimité que celle dont dispose Olli Rehn."

Claude Turmes : "Nous pensons que Berlin, et notamment le gouvernement conservateur libéral allemand, nous a déjà suffisamment plongés dans la crise par sa posture rigide"

Interrogé sur les propos du ministre allemand des Finances, Wolgang Schäuble, lequel a défendu sa candidature en arguant qu'il était plus simple pour un chef de l'Eurogroupe qui assume déjà des responsabilités dans son propre pays, l'eurodéputé socialiste, Robert Goebbels ne partage une telle analyse. "Ce n'est relativement pas important qui préside une telle chose. Parce qu'un président préside mais ne décide lui-même de rien. Et M. Rehn a l'avantage d'avoir à ses côtés une administration complète, qui peut l'assister. Tandis que Jean-Claude Juncker était en fait jusque-là un illustre solitaire."

Claude Turmes, comme ses collègues écologistes, ne souhaite pas la nomination de Wolfgang Schäuble. "Nous pensons que Berlin, et notamment le gouvernement conservateur libéral allemand, nous a déjà suffisamment plongés dans la crise par sa posture rigide. Pour cela, ce qui doit d'abord être clair, c'est le non à M. Schäuble en vue du sommet."

Charles Goerens verrait bien, lui aussi, un ministre des Finances à la tête de l'Eurogroupe, mais il ne se prononce pas sur un candidat

Il ne reste que Charles Goerens pour trouver des vertus à une candidature autre que celle d'Olli Rehn qui lui conviendrait d'ailleurs aussi très bien. "[Olli Rehn] n'est pas quelqu'un qui chasse les gens de leur siège. Celui qu'on met à ce poste doit peut-être faire preuve de pondération, de sérénité." Toutefois, Charles Goerens verrait bien aussi un ministre des Finances à la tête de l'Eurogroupe : "Il est absolument certain que M. Schäuble a l'étoffe pour le faire. M. Moscovici aussi. Mais on doit encore voir quelle est la relation entre la France et l'Allemagne. J'ai toujours pensé que, si l'un des deux le devenait, alors il serait responsabilisé pour placer le bien commun de la zone euro au-dessus de considérations purement françaises ou allemandes", déclare-t-il.

Cependant, Charles Goerens ne veut pas trancher en faveur d'un candidat. "Nous ne savons pas encore à quoi va ressembler la gouvernance définitive de la zone euro. Y aura-t-il un gouvernement ? Sera-t-il conçu quelque chose qui ressemble à une coopération entre l'Eurogroupe, donc une représentation de pays, et la Commission ?", se demande Charles Goerens, favorable à une réforme fondamentale de la gouvernance de la zone euro.