Le 27 mai 2013, les ministres des Affaires étrangères de l’UE se sont réunis en Conseil "Affaires étrangères" (CAE) à Bruxelles pour faire le point sur la situation en Syrie et prendre des décisions quant aux sanctions de l’Union européenne contre la Syrie, celles-ci venant à expiration le 1er juin 2013. Le problème était le désaccord entre les Etats membres qui demandaient une levée de l’embargo sur les armes afin de pouvoir livrer des armes à la Coalition nationale syrienne et aux forces d’opposition, et qui conditionnaient leur accord à une prolongation des sanctions à cette levée de l’embargo, entre autres le Royaume Uni et la France, et les pays qui, comme le Luxembourg, l’Allemagne l’Autriche, et les Pays Bas s’y opposaient. Les premiers voulaient, par une levée de l’embargo sur les armes, accentuer la pression sur le régime du président Assad avant la nouvelle conférence sur la Syrie, dite Genève 2, et les autres arguaient que la livraison d’armes pourrait enclencher une course aux armements avec la Russie et que ces armes pourraient tomber dans les mains d’extrémistes.
Un communiqué du ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, décrit le processus de décision de la manière suivante : "Les ministres ont tout d’abord rappelé l’extrême importance de tout faire pour favoriser une solution politique au conflit syrien, et ont salué, dans ce contexte, l’initiative conjointe des Etats-Unis et de la Russie appelant à la tenue d’une conférence internationale pour la Syrie s’inscrivant dans la ligne des principes du communiqué de la conférence de Genève du 30 juin 2012. Conscients des risques de régionalisation du conflit et de l’urgence humanitaire, les ministres ont ensuite longuement examiné les modalités de la prolongation des sanctions européennes à l’encontre de la Syrie."
Le communiqué présente ensuite les décisions prises à l’unanimité : "Les ministres sont parvenus à un accord en deux volets. D’une part, ils ont décidé de prolonger les sanctions existantes au niveau de l’UE, à l’exception de l’embargo sur les armes. D’autre part, les Etats membres se sont engagés à titre national à s’abstenir d’exporter des armes à ce stade et, en tout état de cause, à appliquer un certain nombre de critères stricts à d’éventuelles exportations futures." Avec cette décision, les ministres ont, selon un commentaire de Jean Asselborn au micro de RTL "réussi à limiter les dégâts".
Les restrictions sur les exportations vers et les importations de la Syrie sont maintenues. De même sont maintenues les restrictions concernant le financement de certaines entreprises, de projets d’infrastructure et d’opérations commerciales, le secteur financier, le secteur des transports et l’admission de personnes sur le territoire de l’UE. S’y ajoute le gel de fonds. « La vente, la fourniture, le transfert et l’exportation d’équipements militaires et d’équipements qui pourraient être utilisés pour la répression interne » sont par contre permis aux Etats membres qui veulent aller dans cette direction, mais à condition qu’ils soient destinés à la Coalition nationale syrienne et aux forces d’opposition, et "à condition qu’ils soient utilisés pour la protection des civils". Les Etats membres demanderont des garanties afin que les équipements livrés ne soient pas utilisés pour des fins non autorisées. Chaque licence d’exportation sera donc scrutée selon la position commune en matière d’exportations de technologies et d’équipements militaires que l’UE a adoptée le 8 décembre 2008.
La livraison d’armes n’aura pas lieu immédiatement. Le Conseil reviendra avant le 1er août 2013 sur sa position et se basera alors sur un rapport de la Haute représentante et après consultation du secrétaire général des Nations Unies sur les résultats de l’initiative russo-américaine et les engagements pris par les parties syriennes après la conférence de Genève 2.
Le 28 mai, la Coalition nationale de l'opposition syrienne réunie à Istanbul a jugée insuffisante et intervenant "trop tard" la décision du Conseil de l’UE. "Nous avons besoin d'armes pour protéger les civils, le peuple syrien. Les armes seraient un élément mais nous voulons aussi que l'Union européenne adopte une position plus sérieuse, une position plus ferme", a déclaré un de ses porte-parole. Un porte-parole du commandement militaire supérieur de l'Armée syrienne libre (ASL), la principale formation de la Coalition, Kassem Saadeddine, cité par l’AFP demande "pourquoi attendre jusqu'en août ? Pourquoi attendre encore deux mois ? Pour que le peuple syrien soit encore victime de génocide ?", et ajoute que "nous avons besoin de batteries antiaériennes, de missiles antichars".
La Russie a de son côté regretté la levée par l'UE de l'embargo sur les livraisons d'armes aux rebelles syriens. "Cela porte un préjudice direct à la possibilité d'organiser une conférence internationale", a dit le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, cité par l'agence Itar-Tass. "L'embargo est levé en dépit de toutes les déclarations de l'UE en faveur d'un règlement basé sur la déclaration de Genève (de juin 2012), et en dépit de l'accord sur la nécessité d'organiser une conférence internationale sur la Syrie", a ajouté Sergueï Riabkov, pour qui "cela va à l'encontre de la politique de l'UE elle-même".