Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie - Marché intérieur
MiFID II – Parlement, Conseil et Commission parviennent à un accord de principe pour encadrer les marchés d’instruments financiers au terme de longues négociations
14-01-2014


Dans la soirée du 14 janvier 2014, Parlement, Conseil et Commission sont parvenus à dégager un accord de principe sur la refonte des règles européennes encadrant les marchés d’instruments financiers, MiFID II. 

Si la présidence grecque se félicite de cet accord, il faut souligner que les négociations ont couru tout au long des présidences exercées successivement par la Lituanie, l'Irlande, Chypre et le Danemark. La Commission avait en effet mis sur la table ses propositions en octobre 2011, et le Parlement européen avait adopté sa position en vue d’un accord en trilogue avant le vote en première lecture dès le mois d’octobre 2012. Depuis, les négociations se sont poursuivies au Conseil, la réunion des ministres des Finances de juin 2013 ayant permis de confirmer un accord trouvé en Coreper sur la position que le Conseil entendait défendre dans le cadre du trilogue.

L’accord trouvé a donc été salué par le commissaire en charge du dossier, Michel Barnier, convaincu que ces nouvelles règles marquent "une avancée décisive vers l’instauration d’un système financier plus sûr, plus ouvert et plus responsable, et vers un rétablissement de la confiance des investisseurs après la crise financière".

Ce texte devrait permettre de "rendre les marchés financiers plus sûrs et plus efficaces, de mieux protéger les investisseurs, de limiter la spéculation sur les marchés de matières premières et de réguler le trading à haute fréquence qui repose sur des transactions financières effectuées à la nanoseconde", ainsi que l’a souligné le Parlement dans un communiqué.

Pour le rapporteur, l’eurodéputé Markus Ferber (PPE), cet accord marque la fin de plus de deux ans de travail, et il se félicite à l’idée que les lacunes dans la réglementation sur les marchés d'instruments financiers révélées par la crise soient comblées et que les excès qui ont fait trembler les marchés en raison de procédures opaques ne soient plus possibles. A ses yeux, la directive qu’il s’agissait de revoir est en effet "la mère de la règlementation européenne des marchés financiers", puisqu’elle fixe les règles des échanges d’obligations et de capitaux pour le petit épargnant comme pour les entreprises boursières.

Cet accord de principe va désormais faire l’objet de négociations plus détaillées avant que le Parlement européen et le Conseil ne puissent l’adopter formellement.

Structure des marchés et transparence

Le texte prévoit  un encadrement des plateformes de négociation alternatives (OTF) nées avec la libéralisation du secteur boursier, et qui n'étaient pas réglementées jusqu'ici. Comme l’a souligné Michel Barnier suite à cet accord, la réforme MiFID II aura pour effet de faire passer la négociation organisée d'instruments financiers vers des plates-formes de négociation multilatérales et bien réglementées. 

Ces plateformes de négociation seront réservées aux obligations, aux produits dérivés et aux produits financiers structurés, mais les actions ne pourront pas y être échangées, conformément au souhait du Parlement. Les actions devront être échangées en Bourse ou sur des systèmes multilatéraux de négociation.

Par ailleurs, l’instauration d’une obligation de négociation pour les instruments dérivés devrait renforcer la sécurité et l'efficacité des marchés et compléter l'obligation de compensation prévue par le règlement sur l'infrastructure des marchés européens.

La mise en place d’un cadre européen harmonisé garantissant un accès non discriminatoire aux plates-formes de négociation et aux contreparties centrales ainsi qu'aux indices de référence utilisés aux fins de la négociation et de la compensation renforcera la concurrence et rendra les marchés des capitaux plus efficaces, mieux intégrés et plus sûrs, au bénéfice des investisseurs, estime encore Michel Barnier.  

Pour l’eurodéputée Arlene McCarthy, rapporteur fictif pour le groupe S&D, qui a pris le relais de Robert Goebbels dans les négociations, il y a encore des raisons de s’inquiéter en raison de lacunes potentielles dans la réglementation des plateformes de négociation alternatives (OTF) qui pourraient conduire à des distorsions de marché en faveur des OTF. Mais il n’a pas été possible d’aller plus loin, regrette-t-elle. L’eurodéputée socialiste se réjouit toutefois du fait que le nombre de transactions menées dans l’opacité va être réduit.

En termes de transparence, des règles strictes interdiront la négociation anonyme d'actions et d’autres instruments de capitaux propres, qui fait obstacle à une formation des prix juste et efficace.

S’il salue l’avancée importante que constitue cet accord en termes de transparence, le commissaire Michel Barnier aurait souhaité aller plus loin encore en introduisant un régime de transparence pour les instruments autres que les actions, comme les obligations et les instruments dérivés.

Protection des investisseurs

MiFID II devrait également renforcer la protection des investisseurs. Comme le résume Michel Barnier, les entreprises d’investissement devront respecter des normes plus strictes, afin que les investisseurs puissent être assurés qu'on leur propose des produits adaptés à leur profil et que leurs actifs sont bien protégés. De même, les investisseurs peuvent s’appuyer sur des conseils objectifs et indépendants lorsqu'ils le souhaitent, et la structure des honoraires et rémunérations des conseillers ne doit pas y faire obstacle.

L’enjeu est de bien informer les investisseurs sur les risques liés aux produits qui leur sont proposés, de façon à éliminer des marchés les produits toxiques, comme le souligne le site du Parlement européen.

Limites à la spéculation sur les matières premières

En instituant un système européen harmonisé qui limite les positions détenues en produits dérivés des matières premières, MiFID II contribuera à une cotation ordonnée et préviendra les abus de marché, réduisant de la sorte la spéculation sur les matières premières ainsi que les conséquences désastreuses que celle-ci peut entraîner pour les populations les plus pauvres de la planète.

Ainsi, les autorités compétentes pourront fixer des limites aux positions qu'un trader ou un groupe de traders pourront détenir sur les marchés de dérivés de matières premières. Le but est de lutter contre l'hyperspéculation sur les produits agricoles et les distorsions sur les marchés de matières premières, y compris celui de l'énergie.

Une disposition introduite par le Parlement européen et qui figure dans le texte "malgré les tentatives du gouvernement britannique et de certains eurodéputés conservateurs pour l'affaiblir et la vider de sa substance", ainsi que l’a souligné Arlene McCarthy. Markus Ferber voit lui aussi l’accord sur la limitation de ces positions comme un grand succès, puisque cette mesure va permettre de réduire la spéculation sur les marchés à terme sans pour autant déranger le marché en soi.

L’autorité européenne de sécurité des marchés devra déterminer la méthodologie permettant de calculer les limites aux positions sur les marchés de dérivés de matières premières, et il reviendra ensuite aux autorités nationales de l’appliquer, ce qui suscite toutefois quelques inquiétudes.

Trading à haute fréquence

MiFID II garantira également l'adaptation de la législation à l’évolution technologique. L’accroissement spectaculaire, en volume et en vitesse, des flux d'ordres échangés pourrait être un facteur de risque systémique.

Les nouvelles règles entendent garantir un fonctionnement sûr et ordonné des marchés ainsi que la stabilité financière en instaurant un contrôle de la négociation et une exigence de liquidité appropriée pour les opérateurs de trading à haute fréquence qui appliquent une stratégie de tenue de marché, et en réglementant la fourniture d’accès électroniques directs au marché.

Le Parlement se félicite ainsi d’avoir introduit des règles encadrant l’échange algorithmique d’instruments financiers, à savoir la pratique visant à laisser un ordinateur décider sur la base de paramètres individuels prédéterminés la possibilité d’initier une opération, le moment où le faire, son volume ou son prix. L’enjeu est là d’avoir des systèmes efficaces et des moyens de contrôle, ainsi que des moyens de couper court aux transactions si la volatilité des prix devient trop grande. Les régulateurs auront désormais à autoriser les algorithmes, qui devront avoir été préalablement testés. Par ailleurs, tous les ordres et annulations d’ordre devront être enregistrés et stockés de façon à être disponibles sur demande des autorités compétentes.

Markus Ferber se félicite ainsi de voir le trading à haute fréquence freiné par plus de contrôle et de transparence, et notamment de la possibilité d’interrompre des transactions en cas de turbulences sur les marchés, une disposition qu’il considère comme un grand succès.