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Aide financière pour études supérieures – Le gouvernement a présenté une nouvelle réforme qui semble mettre fin à tout principe contraire à la libre circulation des travailleurs
03-03-2014


etudiants-source-frontaliers.luLe 3 mars 2014, le ministre luxembourgeois de l’Enseignement supérieur, Claude Meisch, a présenté à la commission parlementaire de l’Enseignement supérieur, son projet de  réforme du système d’aide financière aux études supérieures. Cette réforme succède aux modifications apportées par le précédent gouvernement au système de bourses national introduit par la loi du 26 juillet 2010 qui avait été jugé, par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 20 juin 2013, contraire au principe de la libre circulation des travailleurs.

Le 3 février 2014, les grandes lignes de cette troisième réforme du système de bourse en quatre ans avaient été rendues publiques par le syndicat LCGB à l’issue d’une entrevue avec le ministre. Si l’orientation qui avait alors réjoui le syndicat est confirmée, les dispositions précises et le volume d’aides envisagées l’ont cette fois déçu. 

Le gouvernement est revenu sur les conditions d’une durée de cinq ans de travail au Luxembourg, inspirée de l’arrêt de la CJUE, et le caractère ininterrompu de ce travail, toutes deux présentes dans la réforme adoptée le 9 juillet 2013 par la Chambre des députés, pour y substituer la condition de cinq années de travail sur les sept années précédant la demande.

Comme le laisse entendre le LCGB dans un communiqué de presse diffusé à l’issue de la réunion entre le ministre et les députés, cette réforme semble écarter définitivement l’entrave à la libre circulation des travailleurs dont avaient été victimes les travailleurs frontaliers dans l’accès à une aide financière pour études supérieures à l’attention de leur enfant.

Néanmoins, à l’issue de la réunion, le vice-président de la commission parlementaire, le député Déi Gréng, Claude Adam, a fait savoir au Tageblatt, qu’il pourrait encore y avoir une adaptation au texte du projet de loi pour ce qui est du critère de mobilité, afin que la bourse n’échappe pas à un enfant de frontalier qui étudierait à Marseille alors qu’elle reviendrait à l’étudiant résident au Luxembourg et étudiant à Trêves.

Pour le LCGB, il y a toutefois également lieu de corriger certains aspects de la loi "afin d’éviter de nouvelles procédures devant les juridictions", à savoir "le fait que la loi ne concerne que les "travailleurs" et exclue les bénéficiaires d’une pension de vieillesse, de survie, d’invalidité, les salariés en reclassement professionnel, etc." ainsi que "le fait que les familles recomposées soient pénalisées suite à l’absence de lien de filiation entre le salarié et l’étudiant".

La composition des nouvelles bourses

Pour tenir de compte de l’arrêt de la CJUE, le projet de réforme prévoit que les enfants de frontaliers pourront accéder à une aide pour études supérieures dès lors que l’un de leurs parents remplit la condition d’avoir travaillé au minimum durant cinq des sept dernières années au Grand-Duché.

Le ministre Claude Meisch a expliqué aux députés que le gouvernement entendait baisser de 178 à 109 millions d’euros en 2015, le coût du système d’aide aux études supérieures. Durant l’année universitaire 2012-13, il a coûté 130 millions d’euros à l’Etat, pour 15 587 demandes. Or, durant l’année, en cours, il y a déjà eu 25 000 demandes dont 9 000 provenant d’étudiants enfants de travailleurs frontaliers.

Le projet envisage un système d’aides comprenant trois éléments. La première partie de la bourse constitue la bourse de base. Accessible à tout étudiant, elle s’élève à 2000 euros par an. La seconde partie, sociale, est définie en fonction des revenus des parents. Est pris en compte le revenu mais pas le nombre d’enfants à charge. Ainsi, cette part  sociale varierait, par tranche de 500 euros, de 0 euro pour les revenus supérieurs à 4,5 fois le salaire social minimum à 2 500 euros pour les revenus inférieurs ou égaux au salaire social minimum. La troisième partie est liée à la mobilité et est gérée en reprenant les critères ERASMUS, à savoir faire des études dans un pays étranger au sien et y payer un loyer.

Le montant de l’intervention au niveau des frais d’inscription serait toujours de 3 700 euros. Néanmoins, elle serait composée d’une aide financière directe pour la moitié de la somme et d’un prêt pour l’autre moitié. Les étudiants pourraient toujours accéder à un prêt bancaire au montant inchangé de 6500 euros.

Une clause de travail "totalement excessive" selon le LCGB

Toutefois, le syndicat chrétien LCGB mais aussi le parti Déi Lénk, qui a réagi par communiqué de presse, reprochent au projet gouvernemental de réduire le niveau d’aide financière jusque-là assurée à chaque étudiant.

Le LCGB, dans son communiqué de presse, estime encore "totalement excessive" la condition d’avoir travaillé au minimum durant cinq des sept dernières années au Grand-Duché qui est imposée aux salariés frontaliers pour pouvoir bénéficier de l’aide financière.

Le syndicat chrétien déplore par ailleurs que le projet remette en cause "le principe important de l’autonomie de l’étudiant" et prévient que "la réforme va provoquer une détérioration de la situation des étudiants et des familles". A cet égard, le LCGB estime que le montant garanti à chaque étudiant ne saurait être inférieur à 4 000 euros, soit l’équivalent du montant annuel des allocations familiales pour un enfant, qui avaient été supprimées en 2010 pour être compensées par la réforme du système d’aide financière aux études supérieures.

Déi Lénk déplore notamment que le gouvernement veuille faire une épargne de 45 millions d’euros en ne payant pas rétroactivement de bourse aux enfants de frontaliers qui n’ont pas fait de recours au rejet de leur demande entre 2010 et 2013.

Plus globalement, le parti de gauche constate que la réforme opère un "nouveau changement de paradigme", en abandonnant la considération de l’étudiant comme personne indépendante et déplore que le montant de la bourse de base soit "trop bas, pour garantir à chacun son droit aux études".

Déi Lénk souligne que la réforme ne tient pas compte du fait "que, de plus en plus souvent,  beaucoup d’étudiants, au retour de leurs études, ne gagnent pas assez, malgré la détention d’un diplôme, pour s’occuper de leur ménage et rembourser leur prêt étudiant". "Nous ne devons pas oublier que les investissements dans l’éducation ne doivent pas être considérés comme des charges ou des déficits mais doivent être valorisés en tant qu’investissements importants pour le futur", dit encore Déi Lénk, qui préconise "un impôt sur les riches" pour les financer.