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Economie, finances et monnaie - Fiscalité
Le Comité de prévision table sur la reprise pour 2014-2018, mais il met en garde contre le risque de voir le Luxembourg faire l’objet d’une procédure d’infraction dès 2016 en raison du déficit public qui pourrait atteindre -1,6 % du PIB en 2015
09-04-2014


Le 9 avril 2014, le Comité de prévision a présenté aux députés de la Commission des Finances et du Budget sa note sur l’évolution de la situation macro-économique et des finances publiques.MM. Allegrezza, Waringo et Wirtz, membres du comité de prévision, ont présenté à la Chambre les projections macroéconomiques et les prévisions en matière de finances publiques pour la période 2014-2018 le 9 avril 2014,. Source : www.chd.lu

Organe composé d’experts ayant pour mission d’analyser les données pertinentes en matière de finances publiques mis en place en 2010, le comité de prévision est composé de représentants du ministère des Finances, de l’Administration des contributions directes, de l’Administration de l’enregistrement et des domaines, de l’Administration des douanes et accises, du ministère de l’Économie et du Commerce extérieur, du ministère de l’Intérieur et à la Grande Région, du Statec, de l’IGSS et de la CSSF.

"Un contexte économique plus favorable, mais une situation tendue dans les finances publiques et une dette qui risque encore de s’accroître", c’est ainsi que le site de la Chambre des députés résume cette note qui porte sur la situation à politique inchangée, et ne prend pas en compte, notamment, la hausse de la TVA prévue par le gouvernement.

Le comité de prévision table sur une croissance de 3,5 % en moyenne sur la période 2014-2018

Le comité de prévision envisage, après une contraction du PIB de l’ordre de 0,2 % en 2012 et une reprise de 2,2 % en 2013 une croissance qui pourrait se stabiliser en moyenne autour de 3,5 % à l’horizon 2014-2018, avec une progression allant de 3,1 % en 2014 à 3,8 % en 2018. Une croissance envisagée sur la base de l’hypothèse d’une reprise économique durable de la zone euro liée à une reprise de l’économie mondiale.

Les chiffres diffèrent nettement des prévisions de la Commission, qui table sur une croissance du PIB de 2,2 % en 2014 et 2,5 % en 2015. Un écart que la note explique principalement "par une appréciation différente de l’évolution du secteur financier". Le Comité de prévision escompte une reprise du secteur financier dès 2015, tandis que la Commission envisage une reprise plus modeste de la contribution du secteur financier à la croissance.

Selon les experts du comité de prévision, la période 2014-2018 devrait être marquée par un environnement d’inflation faible et légèrement croissante. Conséquence, à partir de 2015, date à laquelle le mécanisme d’indexation des salaires devrait fonctionner à nouveau normalement, trois tranches indiciaires pourraient être anticipées jusque fin 2018.

En termes d’emploi, le comité de prévision imagine que le chômage devrait atteindre un pic en 2014 et 2015, avec  un taux de 7,3 %, avant de passer à 6,5 % en 2018.

Le déficit public serait de 1,6 % du PIB en 2015

Le comité de prévision fait état d’un "point de départ relativement confortable en 2014", puisque, pour 2014, le solde budgétaire de l’administration publique s’améliorerait par rapport à 2013 en passant d’un solde équilibré à un excédent de 0,1 % du PIB. Une amélioration résultant d’une dynamique moins forte des dépenses (taux de croissance de 3,7 %) que des recettes (taux de croissance de 3,8 %).

Du côté des recettes, le comité de prévision relève qu’en 2014, les impôts sur la production (TVA) devraient connaître une dynamique importante (+4,7 %) ce qui est imputable à la croissance continue des recettes liées au commerce électronique (+10,6 % en 2014) mais aussi à une bonne tenue de l’évolution des recettes de la taxe d’abonnement (+5,6 %) qui sont liées au développement des marchés boursiers et l’apport quasi-continu de nouveaux fonds.

Du côté des dépenses, le comité de prévision explique le ralentissement de la croissance des dépenses par les "mesures discrétionnaires décidées par le gouvernement dans le cadre du projet de budget 2014".

En 2015 en revanche, le comité de prévision prévoit une nette détérioration du solde de l’administration publique qui passerait à – 1,6 % du PIB, une évolution due essentiellement à la perte des recettes de TVA issues du commerce électronique qui est évaluée par experts à 700 millions d’euros. Pour ce qui est des autres recettes, elles augmenteraient au contraire sous l’effet de l’amélioration continue de la conjoncture macroéconomique.

Par ailleurs, pour ce qui est des dépenses, à politique inchangée, les experts prévoient une nette accélération de la croissance des dépenses en 2015 en raison de l’accord salarial dans la fonction publique, mais aussi au démarrage de nouveaux projets d’investissement.

Pour la période 2016-2018, le comité de prévision fait état d’une persistance d’un déficit important au niveau de l’administration centrale malgré une amélioration progressive : il passerait de -0,9 % du PIB en 2016 à – 0,1 % du PIB en 2018. Une amélioration qui s’explique par une reprise progressive du taux de croissance et une trajectoire des dépenses suivant une dynamique plus modérée, autour de 4,3 % par an. La dynamique de la croissance des recettes resterait toutefois impactée par la perte des recettes liées au commerce électronique, puisque les impôts indirects passeraient de plus de 30,6 % du total des recettes en 2014 à une moyenne de 28 % à partir de 2015.

Le Luxembourg pourrait faire l’objet d’une procédure d’infraction en 2016 et les experts du comité de prévision recommandent de commencer une stratégie de consolidation dès 2015

Comme le rappellent les auteurs de cette note, qui expliquent de façon détaillées les règles budgétaires européennes, le Luxembourg a pour objectif à moyen terme (OMT), un solde structurel de l’ordre de +0,5 % du PIB.

S’il est prévu que le Luxembourg respecte son OMT en 2013 et 2014, les experts du comité de prévision observent qu’à partir de 2015, une dégradation importante du solde structurel risque de se produire à politique inchangée et que le Luxembourg sera en présence d’un écart important par rapport à son OMT. Le Luxembourg devra par conséquent prendre des mesures correctrices.

"La Commission aura la possibilité de monter la pression sur le Luxembourg, sur base ex ante, pour corriger sa trajectoire budgétaire à l’issue du semestre européen en juin 2014 ainsi qu’à l’automne 2014 lors de l’évaluation des projets de plan budgétaire des Etats", observe le comité de prévision.

Ensuite, c’est au premier semestre 2016 que le Luxembourg pourrait faire l’objet d’une procédure d’infraction et devrait entamer une stratégie de consolidation. "Toutefois, pour des raisons de minimisation des coûts budgétaires à moyen terme et afin de stabiliser l’évolution du niveau de la dette publique, il est opportun de débuter la stratégie de consolidation dès 2015 pour éviter une détérioration maximale de la situation budgétaire en 2015, indépendamment des règles prévues dans le 'volet préventif' du Pacte de Stabilité et de Croissance", préviennent les auteurs de la note.

Les experts calculent que si le Luxembourg veut atteindre son OMT en 2018, il faut qu’il fasse un ajustement nominal à hauteur d’un minimum de 1,1 milliard jusqu’en 2018 ou 1,7 % du PIB. Une trajectoire linéaire à partir de 2015 impliquerait une stratégie d’ajustement d’effort nominal annuel entre 250 et 300 millions euros, précisent les experts du comité de prévision qui soulignent que l’effet des mesures annuelles doit être structurel et que les ajustements doivent donc se cumuler d’une année sur l’autre. Ils recommandent donc d’une part de "constituer un coussin de sécurité suffisamment important (0,5 % du PIB ou 300 millions d’euros) par rapport à l’objectif de 1,1 milliards d’euros et, d’autre part, de se donner une clause de révision régulière ou à mi-chemin, par exemple fin 2016, pour faire état des progrès réalisés, pour revoir leur articulation avec les projections les plus récentes et de procéder, le cas échéant, à des réajustements ponctuels de la stratégie de consolidation afin d’assurer le respect des objectifs budgétaires visés".

La dette publique pourrait atteindre 26,6 % du PIB en 2018

Selon les projections à politique inchangée, la dette publique brute du Luxembourg serait de 11.3 milliards ou 23.3 % du PIB en 2014 et atteindrait 16,3 milliards d’euros à l’horizon 2018, soit 26,6 % du PIB.

Le comité de prévision estime que les charges d’intérêts courus par l’administration publique pour financer cette dette vont continuer à augmenter à moyen terme et atteindront quelques 330 millions d’euros en 2018, sous l’hypothèse d’un maintien de la notation souveraine AAA.

La dynamique de la dette s’explique quasi exclusivement par le recours à l’endettement pour financer les déficits affichés au niveau de l’administration centrale, relèvent les auteurs de cette note qui prévoient que l’Etat devra emprunter 1,5 milliard d’euros en 2015 et 1,3 milliard d’euros l’an en 2016, 1,2 milliard en 2017 et 1 milliard en 2018.

Variation tenant compte d’un choc négatif lié au passage à l’échange automatique d’informations

Dans leur scénario macro-économique, les experts du comité de prévision ne tiennent pas compte de l’impact de la décision sur l’échange automatique d’informations à compter de 2015. Ils ont toutefois bien en tête les travaux effectués par le STATEC et ils ont simulé l’impact que pourrait avoir un choc supplémentaire négatif lié à la fois à la décision de 2013 sur l’échange automatique d’information en matière de paiement d’intérêt et à celle de 2014 sur l’élargissement de son champ d’application.

L’hypothèse utilisée est celle d’une baisse structurelle de la valeur ajoutée brute de 5 % en 2014 et 2015 par rapport au scénario central. D’après les résultats de ces simulations, le niveau du PIB en volume diminuerait de 0,8 % en moyenne par année sur la période 2014-2018. "L’impact sur l’emploi total est moins fort mais non-négligeable : environ 0,5 % au total", observent les auteurs de la note qui explique "la détérioration contenue de l’emploi" notamment "par un ajustement vers la baisse des salaires ce qui favorise à nouveau l’emploi".

Selon ce scénario, le solde des finances publiques se dégraderait en moyenne de 0,2 % par rapport au PIB sur l’horizon 2014-2018 tandis que le chômage augmenterait d’environ 0,2 %. Sur la même période les prix à la consommation baisseraient de 0,6 % et le coût salarial moyen de 0,5 %.