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Migration et asile
Transposition des directives du paquet Asile - Le Lëtzeburger Flüchtlingsrot plaide pour de meilleures conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile, un accès plus facile à l’emploi et des alternatives à la rétention
20-06-2014


Le Lëtzebuerger Flüchtlingsrot (LFR) a publié le 20 juin 2014, à l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, un avis sur la transposition dans le droit luxembourgeois des directives relatives à la refonte du "paquet asile".

Pour rappel : Le paquet Asile désigne un cadre juridique européen qui régit notamment les conditions d’évaluation d’une demande de protection internationale (directive Qualification), les conditions d’accueil des demandeurs d’asile (directive Accueil), les procédures d’octroi et de retrait de la protection internationale (directive Procédure), les mécanismes de détermination de l’État membre responsable d’une demande (Dublin III et une base de données d’empreintes digitales (Eurodac). Il a été réformé au cours du 1er semestre 2013 et devrait être transposé dans les législations nationales des Etats membres de l’UE d’ici juillet 2015.

La LFR insiste sur le fait que les États membres ont une marge de manœuvre pour transposer les directives du Paquet Asile dans leur législation, et c’est dans ce cadre que le LFR "invite le gouvernement luxembourgeois à prendre en compte ses observations concernant la refonte au moment de l’adoption des directives".

La directive Accueil

Pour le LFR, les conditions d’accueil influent fortement sur la qualité de la demande de protection, le bien-être des concernés et leur intégration dans la société d’accueil.

Les conditions matérielles d’accueil posent par exemple problème au Luxembourg depuis la baisse des allocations mensuelles attribuées aux demandeurs de protection internationale (DPI). Le LFR salue donc "l’ajout important fait à l’article 17 de la refonte de la Directive Accueil sur les règles générales relatives aux conditions matérielles d’accueil qui demande aux États Membres de fixer le montant de leurs allocations financières ou de leurs bons pour les DPI en fonction du ou des niveaux établis chez eux pour garantir un niveau de vie adéquat à ses ressortissants. En conséquence, le LFR invite le gouvernement luxembourgeois à établir les points de référence qui permettront de mieux "quantifier" l’obligation d’assurer aux DPI un niveau de vie adéquat.

Le LFR constate que la législation nationale actuelle permet aux DPI l’accès au marché du travail sous certaines conditions. Au Luxembourg, un DPI a accès au marché de l’emploi dans le cas où les autorités n’auraient pas statué sur sa demande neuf mois après le dépôt de celle-ci, ce qui est aussi conforme à la refonte de la directive Accueil.

Suite à une évaluation de cette mesure, le LFR demande néanmoins depuis 2010 un accès plus rapide des DPI au marché du travail, expliquant que cela permet de  prévenir leur exclusion de la société d’accueil, de favoriser leur autosuffisance et par ricochet de diminuer le versement de prestations sociales de la part de l’Etat. Une telle mesure permet de lutter contre le travail illégal. Le LFR invite donc le gouvernement luxembourgeois à faciliter l’accès au marché de l’emploi pour les DPI en raccourcissant, voire supprimant le délai d’attente et en révisant la procédure administrative actuelle.

La directive Procédure

La directive "Procédure" fixe les règles relatives aux procédures d’examen des demandes de protection internationale, à savoir les conditions d’accès à la procédure, les garanties procédurales, les règles relatives aux entretiens, les conditions d’accès à l’aide juridique, les conditions de recevabilité et d’accélération des demandes, la notion de pays "sûr", les réexamens, les règles relatives au droit à un recours effectif.

La directive "Procédure" doit être transposée d’ici le 20 juillet 2015, mais pourrait être pratiquée en deux temps, de sorte qu’il pourrait y avoir un délai supplémentaire de 3 ans, donc jusqu’en juillet 2018. Le LFR demande au gouvernement une application rapide de la Procédure Asile, sans délai supplémentaire.

Le LFR demande aussi à ce que les dérogations que la directive prévoit, comme par exemple l’obligation d’enregistrer trois jours ouvrables au plus tard après son dépôt une demande de DPI à laquelle il est possible de déroger et où il est possible d’étendre ce délai à 10 jours en cas d’arrivées massives de demandeurs, soient formulées de manière moins vague dans les lois nationales de transcription.

Le LFR souligne qu’il n’y aura plus de liste européenne commune de pays d’origine sûrs, mais le concept de pays d’origine sûr et la possibilité de listes nationales seront maintenus. Il s’ensuit que chaque État membre pourra établir sa propre liste. Résultat, ces listes ne seront plus les mêmes, et cette situation entraînera dans l’UE un traitement inégal des DPI selon le pays d’accueil, souligne le LFR qui estime que cela "va à l’encontre du projet d’élaboration d’un Régime d’Asile Européen Commun qui voulait réduire les disparités entre les procédures nationales" et demande " à l’Etat Luxembourgeois de demander une liste européenne commune des pays sûrs."

Mais il va plus loin. Comme une demande de protection internationale peut être considérée au Luxembourg comme irrecevable s’il existe un premier pays d’asile dans l’UE ou un pays tiers sûr, mais que ces notions peuvent être aléatoires, dans le sens où certains Etats membres de l’UE ne sont pas en mesure d’offrir des conditions d’accueil adéquates aux DPI et que certains pays considérés comme sûrs ne le sont pas forcément pour ces DPI, "le LFR demande la suppression des notions de premier pays d’asile et de pays tiers sûrs."

Le LFR demande également que les autorités luxembourgeoises revoient à la baisse les recours à des procédures accélérées.     

L’article 24 de la directive Procédure porte sur les demandeurs qui nécessitent des garanties procédurales spéciales. Les États membres doivent évaluer dans un délai raisonnable après présentation d’une demande de protection internationale si un demandeur nécessite des garanties procédurales spéciales" à savoir un soutien adéquat (victime de torture, de viol, ou d’autres formes de violences psychologiques). Le LFR constate que "la transposition de cet article oblige le Luxembourg de se doter d’une procédure permettant d’évaluer la vulnérabilité des DPI au premier stade de la procédure." Le LFR pointe dans ce contexte sur le fait que "le Luxembourg manque de personnes compétentes en la matière, c’est-à-dire psychologue, médecin psychiatre, et autres personnels soignants pour un public bien ciblé." Il demande donc à l’Etat Luxembourgeois de se doter d’un personnel médical ayant une expérience et des compétences avec les DPI.

"D’une façon générale", dit l’avis par ailleurs, "un effort reste à faire au niveau de la formation des autorités chargées d’accueillir les DPI durant toute la procédure (police, fonctionnaires intervenants dans le traitement des demandes de protection internationale, etc.)."

La rétention des demandeurs de protection internationale

Le LFR rappelle dans son avis que "les normes internationales relatives aux droits humains limitent le recours à la rétention à des fins de contrôle de l’immigration, en insistant pour qu’une telle mesure ne puisse être prise qu’en cas de nécessité et de manière proportionnelle, lorsqu’une solution moins restrictive s’avère insuffisante."  Il demande donc à ce que la rétention d’asile soit considérée comme une mesure de dernier ressort, sur la base d’une décision individuelle (ce qui exclut une mesure systématique concernant les personnes issues de certains pays tiers). Par ailleurs, il demande que le législateur luxembourgeois prévoie d’autres formes de mesures alternatives à la rétention administrative que la seule assignation à résidence telle que proposée.

Le placement en rétention devrait être soit le plus bref possible, et une durée maximale du placement en rétention devrait être fixée par la Chambre qui n‘aille pas au-delà de six mois, comme tel est le cas actuellement.

Le LFR demande finalement que les retards subis pour obtenir des pays tiers les documents nécessaires ne servent pas de motif pour prolonger de la durée en rétention, comme tel est le cas actuellement (2 fois 1 mois).

Le LFR rappelle dans son avis son opposition catégorique au placement en rétention des enfants, et plus particulièrement des mineurs non accompagnés et invite le législateur à exclure ces possibilités de la loi.