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Claude Turmes a présenté les priorités des Verts dans le nouveau Parlement européen
08-07-2014


07.08.turmes"Bouger l’Europe" ! C’est le titre que l’eurodéputé Déi Gréng, Claude Turmes, a choisi pour présenter le 8 juillet 2014, ses priorités et celles de son groupe Verts-EFA pour la législature. Elu depuis 1999, Claude Turmes reste membre de la Commission Industrie, Recherche et Energie (ITRE) et membre suppléant de la Commission pour l’environnement, la santé publique et la sécurité des aliments (ENVI).

Six domaines d’action prioritaires

Les Verts ont défini six domaines d’action prioritaires.

Le premier consiste à doter l’Union européenne d’objectifs "ambitieux et progressifs" en matière de lutte contre le changement climatique. En la matière, Claude Turmes sait qu’il faudra faire face à un "énorme travail des lobbys" des énergies traditionnelles qui ont à perdre dans la transition énergétique. Selon les écologistes, les objectifs à l’horizon 2030 devraient être contraignants et s’appliquer aussi bien au plan européen qu’au plan national. Selon eux, ils devraient s’élever à une part de 45 % d’énergies renouvelables, de 40 % d’efficacité énergétique et de 60 % de réduction des émissions de CO2. L’eurodéputé signale l’importance de bien préparer la conférence de Paris qui se déroulera sous présidence luxembourgeoise de l’UE à la fin de l’année 2015. Ce sera la ministre verte de l’Environnement, Carole Dieschbourg, qui représentera à ce moment le Conseil de l’UE.

Claude Turmes confie par ailleurs qu’il était important pour lui de continuer à appartenir à la commission ITRE alors que la question de l’énergie, en plus d’être une question également sanitaire, sociale et climatique, est désormais aussi une question géopolitique, suite au conflit entre l’UE et la Russie au sujet de l’Ukraine.

"Poutine essaie de diviser l’UE", constate Claude Turmes qui pense que le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique sont les meilleurs moyens d’atteindre "l’indépendance géopolitique". En 2013, les Etats membres de l’UE ont dépensé 163 milliards d’euros pour l’importation de gaz et de pétrole russes. "S’accrocher aux vieilles structures énergétiques n’est pas seulement dangereux pour notre environnement, notre santé et notre porte-monnaie mais nous affaiblit également géopolitiquement", disent ainsi Déi Gréng qui veulent lutter contre le recours au charbon, au nucléaire et au gaz de schiste.

Le deuxième domaine d’action consiste dans la protection de l’environnement, de la santé et des consommateurs. Là aussi, le Parlement va devoir s’imposer vis-à-vis des lobbys, prévient Claude Turmes. La fraction des Verts entend s’employer pour empêcher l’adoption du règlement sur les semences telle qu’elle fut proposée par la Commission avant les élections européennes. Sans quoi, le monopole sur les semences détenu par les entreprises agro-chimiques telles Monsanto sera étendu et la disparition "de sortes de fruits et de légumes traditionnelles" serait à craindre.

Un autre sujet de préoccupation consiste dans le recours aux antibiotiques. La Commission européenne devrait d’ici à la fin de l’année 2014 s’occuper de la refonte du cadre légal sur l’usage des médicaments dans l’élevage, car l’emploi exagéré d’antibiotiques développe des résistances dangereuses pour l’homme et l’animal. Cet usage coûterait actuellement la vie à 250 000 personnes par an selon la Commission. Les Verts souhaitent la mise en œuvre d’une législation-cadre sur la protection des animaux qui aborde ce sujet et celui des essais sur les animaux.

Le troisième domaine d’action, "complètement sous-estimé" selon Claude Turmes, consiste dans la protection des données. "La protection des données est à l’économie digitale, ce que la protection de l’environnement est à l’économie réelle", estime-t-il. Les Verts européens entendent continuer leur travail de fond sur la question alors que dans les prochaines années, l’internet est appelé à s’introduire encore davantage dans toutes la vie privée et l’économie.

A la suite notamment des scandales de la NSA, il faudrait parachever la refonte de la directive sur la protection des données, dans les deux prochaines années. Dans cette perspective, Claude Turmes attribue un rôle important au gouvernement luxembourgeois qui dispose d’un ministre écologiste de la Justice et endossera la présidence de l’UE au deuxième semestre 2015.

Le quatrième champ d’action consiste dans la révision de la politique étrangère et de développement. Claude Turmes estime que le traitement réservé aux migrants venant par la Méditerranée constitue "une des pages les plus noires d’un espace Schengen par ailleurs bon". Claude Turmes salue le fait que la police des frontières a changé son fusil d’épaule pour aider les migrants plutôt que de compter sur une répression aveugle. Toutefois, pour le groupe Verts/EFA, la forteresse Europe doit davantage ouvrir ses portes à l’immigration légale et l’UE doit réviser le système de Dublin de toute urgence.

Claude Turmes désigne les politiques de développement et commerciale comme autres facteurs de pression migratoire. Il y aurait ainsi lieu de les réviser, afin de mettre notamment un terme à "l’hypocrisie du libre-échange avec le continent africain", qui met en danger l’avenir économique de millions d’Africains et Africaines.

Claude Turmes s’est longuement attardé sur le cinquième domaine d’action désigné, à savoir les négociations du Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP). Claude Turmes dénonce comme une "insolence" le fait que le commissaire européen à la Concurrence ignore encore les questions soulevées par la société civile, des eurodéputés et même des gouvernements. Il espère une autre manière d’agir sous la houlette du nouveau président de la Commission européenne.

L’eurodéputé juge comme une "vaste farce" la proposition de la Commission européenne d’améliorer la transparence des négociations, sur le modèle américain consistant à donner accès aux documents de négociations, à des fonctionnaires nationaux triés sur le volet, dans des salles de lecture (reading rooms) installées dans les 28 ambassades américaines de l’UE. Il ne serait pas possible d’y amener tout moyen de copier ou même prendre des notes des documents ainsi présentés. "Une telle manière d’agir serait complètement inacceptable et inconciliable avec ce que les Verts entendent par démocratie", prévient Claude Turmes.

Ce dernier a lui-même répondu à la consultation publique ouverte le 27 mars 2014 par la Commission européenne. Il a notamment attiré l’attention sur le fait que la création du mécanisme d’arbitrage des différends entre Etats et investisseurs aurait pour conséquence que "non plus seulement les représentants élus décideraient quelles mesures étatiques sont légitimes et dans l’intérêt général, mais également et avant tout les mécanismes d’arbitrage internationaux", favorables aux grandes entreprises.

C’est ainsi la souveraineté européenne qui serait remise en cause, dit Claude Turmes.  Il se réjouit ainsi que le gouvernement luxembourgeois, par la voix de son ministre des affaires étrangères, ait mentionné par écrit au commissaire son opposition à l’introduction d’un mécanisme d’arbitrage des différends entre Etats et investisseurs. "Nous sommes sur la voie d’une sortie du traité de ce mécanisme", avance Claude Turmes qui prévient que ce serait "un premier succès".

Par ailleurs, l’eurodéputé a fait savoir que les Verts sont en train d’analyser juridiquement si la Commission européenne a le droit de refuser l’accès aux documents aux eurodéputés sachant que le traité de Lisbonne leur donne leur compétence de voter sur un tel accord international. Le 3 juillet 2014, la CJUE, saisie par l’eurodéputée libérale Sophie in’t Veld, a estimé que la Commission européenne ne pouvait défendre l’accès à un avis juridique concernant les conséquences d’un traité international. Intervenant au sujet de l’accord SWIFT, les juges européens ont estimé les documents qui se rapportent au champ international ne doivent pas être systématiquement considérés comme exemptés du principe de transparence.

Enfin, les écologistes veulent s’employer au développement de la transparence dans la politique européenne. Il aurait la vertu de lutter également contre le développement de l’euroscepticisme représenté par 120 députés au Parlement européen désormais. Les politiciens européens devraient informer les citoyens mieux et plus régulièrement et leur accorder plus de possibilité de participer à l’action politique, pense Claude Turmes, en soulignant l’importance de l’instrument de l’Initiative citoyenne européenne.

Par ailleurs, les Verts veulent œuvrer à la mise en place d’un registre obligatoire des lobbys. Ils pensent que les cabinets d’avocats devraient y être inscrits dès lors qu’ils influencent le processus de décision. Ils souhaitent également que soient définies des lignes rouges claires entre activités de politiciens et de conseillers.

Alors que le Parlement européen a amélioré la transparence en donnant accès à tous les documents et en permettant de suivre en direct les réunions des commissions et les séances plénières, le Conseil et la Commission devraient selon les Verts également faire preuve de plus de transparence afin d’entraver l’action des lobbyistes.

Claude Turmes préfère Jean-Claude Juncker à José Manuel Barroso

Claude Turmes s’est aussi exprimé sur le processus en cours de la nomination de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission européenne. Il a attiré l’attention sur le fait que c’est avec le groupe politique des Verts-EFA que le candidat aura l’audition la plus longue. "Le message est très clair. M. Juncker veut trouver une plus large majorité que celle que Martin Schulz a trouvée (au Parlement européen comme président, ndlr). Nous sommes en discussions intensives", a fait savoir Claude Turmes.

Interrogé s’il apportait son soutien à Jean-Claude Juncker, il a dit qu’il avait un "préjugé positif" pour un candidat "pro-Européen". Il s’est en tout cas félicité du départ de José Manuel Barroso, qui manquait de leadership et était "trop américanophile" tandis que Jean-Claude Juncker, pour sa part, se tient "positivement à distance du modèle économique américain". Il est "la bonne personne" pour trouver un meilleur équilibre entre la politique de désendettement très dure voulue par Angela Merkel et la politique d’investissement, notamment dans la lutte contre le changement climatique, qui ouvrirait des perspectives à la jeunesse européenne.