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Semestre européen
La Commission européenne publie son 4e rapport sur le mécanisme d’alerte et estime nécessaire des bilans approfondis pour seize Etats membres
28-11-2014


Une infographie illustrant le rapport sur le mécanisme d’alerte publié le 28 novembre 2014 (Source : Commission)La Commission européenne a présenté le 28 novembre 2014 son examen annuel de croissance (EAC), lançant ainsi le semestre européen 2015. Pour la quatrième année consécutive, l’examen annuel de croissance est accompagné du rapport sur le mécanisme d’alerte(RMA), qui fait partie de l’exercice de surveillance régulière au titre de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM) et vise à recenser et à corriger les déséquilibres qui peuvent entraver les performances des économies nationales, de la zone euro ou de l’UE dans son ensemble.

La surveillance des déséquilibres macroéconomiques a été introduite par le six-pack, entré en vigueur en décembre 2011. Cette procédure vise à déceler les déséquilibres qui entravent le bon fonctionnement des économies des États membres, de la zone euro ou de l'Union européenne dans son ensemble – ainsi qu'à encourager l'adoption des mesures appropriées. Le RMA identifie les États membres qui sont susceptibles d’être touchés par des déséquilibres nécessitant l'adoption de mesures et qui devraient faire l'objet de bilans approfondis. Le RMA est donc un instrument de détection des déséquilibres économiques publié au début de chaque cycle annuel de coordination des politiques économiques. Il est fondé sur un tableau de bord d’indicateurs assortis de seuils indicatifs, auquel s'ajoute une série d’indicateurs auxiliaires.

Des indicateurs en matière sociale et d’emploi sont en cours d’introduction dans la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques et devraient servir à mieux comprendre l’évolution et les risques sur le marché du travail et dans le domaine social.

La Commission note d’importants progrès dans la correction de certains déséquilibres macroéconomiques mais reste préoccupée

Il ressort de ce rapport que, bien que les États membres de l’UE aient progressé dans la correction de certains de leurs déséquilibres et que la compétitivité se soit améliorée dans plusieurs économies, les déséquilibres macroéconomiques et leurs grandes conséquences sociales demeurent une préoccupation majeure.

Les déficits considérables et insoutenables des comptes courants ont largement fondu, voire ont disparu ou cédé la place à des excédents, et le processus de redressement des bilans est en cours dans tous les secteurs dans la plupart des pays. En outre, l’amélioration de la compétitivité, qui résulte d'ajustements et de réformes, est encourageante, mais le maintien de la compétitivité demeure une préoccupation majeure, en particulier pour les États membres qui accusent des déséquilibres extérieurs importants. Le niveau élevé de la dette publique et privée dans la plupart des pays, ainsi que celui des passifs extérieurs dans nombre d'entre eux, restent autant de points de grande fragilité pour la croissance, l’emploi et la stabilité financière. Le chômage et les autres indicateurs sociaux sont toujours très préoccupants dans plusieurs pays, et la croissance économique n’a pas été suffisante pour entraîner une amélioration sensible des données dans le domaine social et du travail.

La lenteur de la reprise et le très faible taux d’inflation ont fait obstacle à une réduction plus prononcée des déséquilibres et des risques macroéconomiques liés, relève encore la Commission. Les données parues durant l’été ainsi que les prévisions économiques d'automne font état d'un certain essoufflement de l’activité économique et d'un renforcement des tendances désinflationnistes dans la plupart des pays de l’UE. En 2014 et 2015, la croissance de l’activité économique dans l’UE, après un taux nul en 2013, devrait s'élever respectivement à 1,3 % et 1,5 %.

Les conclusions du RMA soulignent ainsi que promouvoir l'investissement efficient pour rétablir la croissance potentielle est une priorité clé. Sur les sept à huit années écoulées depuis le début de la crise, le potentiel de croissance dans l'UE s'est considérablement réduit. Selon les estimations les plus récentes, la croissance annuelle de la production potentielle de l’UE a chuté d’un peu plus de 2 % il y a dix ans à moins de 1 % actuellement.

La Commission note aussi que le rééquilibrage des comptes courants reste asymétrique.

Bien que les déficits aient été réduits dans un certain nombre de pays, le processus a en grande partie été induit par une chute de la demande et, plus particulièrement, par un recul des investissements. Ce phénomène, s’il n’est pas corrigé, pourrait avoir des conséquences négatives pour le potentiel de croissance à moyen terme, craint la Commission.

Dans l’intervalle, l’Allemagne et les Pays-Bas ont continué à enregistrer des excédents très élevés de leur balance courante, qui s’expliquent par la faiblesse de la demande et des investissements intérieurs, relève aussi la Commission. Dans le cas de l’Allemagne, la Commission note que l'excédent de la balance courante a augmenté vis-à-vis du reste du monde alors qu'il a reculé par rapport à la zone euro, principalement en raison d'une réduction des exportations vers le reste de la zone euro, plutôt que d'une hausse des importations de l'Allemagne. Bien que les excédents de la balance courante n'entraînent pas les mêmes difficultés que des déficits insoutenables et soient en partie justifiés, l'existence d'excédents importants sur une période prolongée peut être le résultat d'inefficiences économiques, accompagnées d'un faible niveau de l'investissement et de la demande intérieurs, ce qui, à moyen terme, entraîne une perte en production potentielle au niveau national et des répercussions négatives pour les partenaires de la zone euro, souligne la Commission.

La Commission estime que des bilans approfondis sont nécessaires pour 16 Etas membres

Sur la base de la lecture économique du tableau de bord de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (PDM), la Commission estime que des bilans approfondis sont nécessaires pour 16 États membres afin d'analyser plus en détail l’accumulation et la correction des déséquilibres ainsi que les risques liés.

Pour plusieurs pays, les bilans approfondis s'appuieront sur les conclusions du cycle de surveillance précédent, tandis que pour d'autres, la Commission établira un bilan approfondi pour la première fois. C’est notamment le cas pour les États membres qui ont récemment achevé, ou sont sur le point d’achever, leurs programmes d’ajustement économique ayant bénéficié d'une assistance financière.

Dans le cas de la Croatie, de l’Italie et de la Slovénie, les bilans approfondis examineront si les déséquilibres excessifs précédemment constatés s'atténuent, persistent ou bien s'accentuent, tout en prêtant dûment attention à la contribution des mesures mises en œuvre par ces États membres pour corriger ces déséquilibres;

Pour l'Irlande, l'Espagne, la France et la Hongrie, c'est-à-dire les États membres qui enregistrent des déséquilibres nécessitant l’adoption de mesures décisives, les bilans viseront à évaluer les risques liés à la persistance de déséquilibres.

Quant aux autres États membres dans lesquels l'existence de déséquilibres avait été constatée précédemment (Belgique, Bulgarie, Allemagne, Pays-Bas, Finlande, Suède et Royaume-Uni), les bilans permettront de déterminer ceux dans lesquels des déséquilibres persistent et ceux dans lesquels ils ont été au contraire corrigés.

Pour la première fois, des bilans approfondis seront aussi réalisés pour le Portugal et la Roumanie. Ayant achevé de mettre en œuvre son programme d’ajustement économique à la mi-2014, le Portugal rejoint le groupe des pays soumis aux procédures de surveillance ordinaires. En ce qui concerne la Roumanie, la surveillance des déséquilibres et le suivi des politiques mises en œuvre ont eu lieu dans le cadre du programme d’ajustement, qui est soutenu par une assistance financière accordée à titre de précaution. Bien que ce dispositif soit toujours en cours, les retards pris dans la réalisation des réexamens bisannuels font que la Roumanie devrait réintégrer le champ de la surveillance effectuée au titre de la PDM.

Dans le cas des États membres qui bénéficient d’une assistance financière, la surveillance des déséquilibres et le suivi des mesures correctives prises ont lieu dans le cadre de leur programme. La Grèce et Chypre sont concernées. Toutefois, la situation de la Grèce sera évaluée dans le cadre de la PDM à la fin de l’assistance financière en cours, qui devrait intervenir d’ici à la fin de 2014, selon les accords qui seront éventuellement conclus.

Pour les autres États membres, parmi lesquels le Luxembourg, la Commission n’entend pas à ce stade approfondir l’analyse dans le cadre de la PDM. Sur la base de la lecture économique du tableau de bord, la Commission estime que les défis macroéconomiques auxquels la République tchèque, le Danemark, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, l’Autriche, la Pologne et la Slovaquie sont confrontés ne représentent pas des déséquilibres au sens de la PDM. Pour tous les États membres, l’exercice continu d’une surveillance étroite et d’une coordination des politiques reste toutefois nécessaire pour la détection des nouveaux risques et la mise en œuvre de politiques propres à favoriser la croissance et l’emploi.

Le Luxembourg ne nécessite pas d’analyse approfondie, selon la Commission

En 2013, la Commission avait estimé qu’un bilan approfondi des déséquilibres macroéconomiques du Luxembourg était nécessaire. En mars 2014, la Commission avait toutefois conclu que les défis macroéconomiques du Luxembourg ne constituaient pas des risques macroéconomiques assez importants pour pouvoir être qualifiés de déséquilibres au sens de la PDM.

Dans le tableau de bord actualisé, quelques indicateurs – les coûts salariaux unitaires, la croissance du crédit au secteur privé et la dette du secteur privé – se situent au-dessus des seuils indicatifs, relève la Commission.

La taille importante du secteur financier continue de faire peser des risques sur la stabilité financière du pays, mais ceux-ci sont relativement circonscrits grâce à la diversification et à la spécialisation du secteur, estime la Commission qui souligne que "les banques nationales affichent d'ailleurs des ratios de fonds propres et de liquidité sains".

Le compte des opérations courantes recense toutes les transactions intervenant entre les entités résidentes et non résidentes se rapportant au commerce international des biens et des services, aux revenus et aux transferts courants. L'indicateur du tableau de bord, le solde des opérations courantes en pourcentage du PIB, est exprimé comme la moyenne des trois dernières années. La valeur de référence choisie se situe entre + 6 et – 4 % du PIB.

Pour cet indicateur, le Luxembourg affiche sur les trois dernières années un solde des opérations courantes qui atteint 5,5 %. "L'excédent substantiel du compte des opérations courantes s'est encore réduit en 2013, en raison non seulement du dynamisme des importations mais aussi d'une chute de l'investissement, de sorte que l'indicateur moyen sur trois ans est maintenant inférieur au seuil indicatif", observe à ce sujet la Commission européenne.

Les statistiques sur la position extérieure nette enregistrent la position financière nette (passifs moins actifs) d'un pays par rapport au reste du monde. Les données couvrent les stocks d'investissements directs et de portefeuille, de produits financiers dérivés et des autres types d'investissements, ainsi que les avoirs de réserve. L'indicateur est exprimé en pourcentage du PIB, et il doit être supérieur à - 35 % du PIB.

Pour cet indicateur, le Luxembourg se démarque nettement en affichant, du fait de l’importance de sa place financière, une position extérieure nette de 216,4 % du PIB, un chiffre qui est en progression par rapport au précédent rapport.

La part de marché dans les exportations mondiales mesure la part des exportations de biens et de services d'un pays dans le total des exportations mondiales. L'indicateur est exprimé en taux de variation sur cinq ans, et le seuil minimal a été fixé à - 6 %.

Pour cet indicateur, qui avait suscité des inquiétudes en 2013, le Luxembourg affiche désormais 2,2 % de variation sur cinq ans, un chiffre qui est revenu au-dessus du seuil, grâce à une réduction des pertes cumulées de parts de marché à l’exportation, "l'économie luxembourgeoise ayant regagné un grand nombre de parts de marché en 2013", ainsi que le relève la Commission.

Le coût salarial unitaire nominal compare la rémunération (salaire et contribution sociale par salarié) et la productivité (PIB par personne ayant un emploi y compris les travailleurs indépendants) pour montrer comment la rémunération des salariés est liée à la productivité de leur travail. Cet indicateur est exprimé en taux de variation sur trois ans, le seuil ayant été fixé à + 9 % pour la zone euro et + 12 % pour le reste de l’UE.

Pour cet indicateur, le Luxembourg affiche un taux de variation de 10,5 % sur trois ans, ce qui explique pourquoi la Commission juge que "les coûts salariaux unitaires restent relativement élevés, en dépit de leur croissance modérée en 2013" (ils n’ont augmenté que de 3,6 % en 2013).

La dette du secteur privé correspond au stock des dettes, sous forme d'emprunts et de titres autre que des actions, des secteurs des sociétés non financières, des ménages et des institutions sans but lucratif au service des ménages. L'indicateur est exprimé en pourcentage du PIB, et il n’est pas censé dépasser 133 % du PIB.

Sur cet indicateur, le Luxembourg affiche une dette privée record de 356,2 % du PIB. "Le fort endettement du secteur privé, principalement des entreprises non financières, correspond, pour l'essentiel, à d'importants prêts transfrontières intragroupe, compensés par des actifs considérables", commente toutefois la Commission, qui ne semble pas s’en inquiéter outre mesure.

La dette publique est définie dans le Traité de Maastricht comme la dette consolidée brute des administrations publiques en valeur nominale comptabilisée en fin d'année. Le secteur des administrations publiques comprend l'administration centrale, l'Etat, les administrations locales et les organismes de sécurité sociale. L'indicateur est exprimé en pourcentage du PIB, le seuil de référence à ne pas dépasser étant de 60 % du PIB.

Sur cet indicateur, le Luxembourg affiche une dette des administrations publiques de 23,6 % du PIB. "Si le niveau actuel de la dette des administrations publiques est actuellement satisfaisant, il pourrait devenir insoutenable à plus long terme en raison de l'accroissement des passifs liés au vieillissement de la population", observe toutefois la Commission.

Pour ce qui est de l'évolution des prix du marché de l'immobilier par rapport à l'évolution du prix du panier de la consommation finale totale, l'indice des prix de l'immobilier prend en compte les variations de prix de toutes les résidences immobilières neuves et anciennes achetées par les ménages (appartements, maisons individuelles, maisons mitoyennes, etc.), indépendamment de leur destination finale et de leur propriétaire précédent. L'indicateur est exprimé en taux de variation annuelle, et il n’est pas censé dépasser 6 %.

Au Luxembourg, la hausse des prix de l’immobilier par rapport au prix du panier de la consommation finale totale a augmenté de 4,9 % sur un an. "Le dynamisme des prix de l'immobilier est préoccupant", observe à ce sujet la Commission européenne. "Si une forte correction des prix semble peu probable, il existe des inquiétudes du côté de l'offre, et l'investissement dans la construction de logements recule", notent les auteurs du RMA.