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Politique étrangère et de défense
Conseil "Affaires étrangères" – La Syrie, l’Iraq et la lutte contre le groupe terroriste "Etat islamique" ont dominé les débats
15-12-2014


Jean Asselborn, ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier,  lors du CAE du 15 décembre 2014 à Bruxelles (source: MAEE))La situation de la Syrie et de l'Iraq, et tout particulièrement la lutte contre le groupe terroriste autoproclamé "Etat islamique en Irak et au Levant" (EIIL, Daech ou "Etat islamique") ont été les principaux dossiers au menu du Conseil "Affaires étrangères" (CAE) de l’UE qui a réuni les ministres européens de ce ressort à Bruxelles, le 15 décembre 2014.

Lors de leur rencontre, les ministres des Affaires étrangères ont par ailleurs abordé la question des Balkans occidentaux et fixé une nouvelle approche de l’UE à l'égard de la Bosnie-Herzégovine sur la voie de l'adhésion à l’Union. Le Conseil a également adopté des conclusions sur la République centrafricaine et le Soudan, et il a enfin fait le point sur la situation en Ukraine alors qu’à l’issue de la rencontre était organisée la première réunion du Conseil d'association UE-Ukraine. En sa qualité de ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn y représentait le Luxembourg.

Syrie : soutien au plan de l’Envoyé spécial des Nations unies et condamnation sans réserve des atrocités commises par le régime syrien, l’EIIL et d’autres groupes terroristes

Lors du CAE du 15 décembre, la situation de la Syrie et de l'Iraq ainsi que la lutte contre le groupe terroriste EIIL ont donc été les principaux dossiers abordés par le Conseil. La discussion se tenait notamment dans le contexte de l'élaboration d'une stratégie régionale globale de l'UE pour la Syrie et l'Iraq, ainsi que pour la menace que représente l'EIIL, telle que l’avait demandée le Conseil "Affaires étrangères" du 20 octobre 2014.

La rencontre avait été précédée la veille, le 14 décembre, par une réunion informelle des ministres des affaires étrangères de l'UE qui aura permis un échange de vues avec Staffan de Mistura, l’Envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, où le conflit en cours a fait selon les estimations des Nations unies quelque 250 000 morts en 4 ans. "En abordant notamment la situation humanitaire, le problème des réfugiés et les relations avec l’opposition syrienne modérée, les ministres ont eu un échange de vues approfondi sur les dangers posés par Daech, ainsi que sur les relations de l’UE avec le gouvernement de l’Irak et le gouvernement régional kurde", rapporte un communiqué diffusé par le Ministère luxembourgeois des Affaires étrangères.

A l’issue des discussions, les ministres européens ont apporté leur soutien au plan proposé par l’Envoyé spécial des Nations unies, qui vise entre autres à instaurer des zones de cessez-le-feu en Syrie, notamment à Alep, comme ils le précisent dans les conclusions relatives à la situation syrienne qu’ils ont adoptées. Dans celles-ci, le Conseil rappelle ainsi que "l'UE est résolue à soutenir pleinement les efforts déployés par celui-ci pour parvenir, d'un point de vue stratégique, à une désescalade de la violence, point de départ d'un processus politique plus large et durable". "Il est urgent de travailler sur un gel, en particulier à Alep, non seulement parce qu’une population importante y vit, mais car c'est un symbole important dans la région et le pays", a pour sa part appuyé la Haute Représentante de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, lors de la conférence de presse organisée à l’issue du Conseil.

Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a de son côté jugé qu’ "un tel cessez-le-feu ne peut se faire sans l'appui de la Russie, de l'Iran et de l'Arabie saoudite, et dans le cadre du Conseil de sécurité de l'ONU", rapporte un communiqué diffusé par son Ministère. "La réussite du plan de M. de Mistura, qui représente les Nations unies, est dans l’intérêt de tout le monde", a-t-il par ailleurs estimé. Cité par le quotidien luxembourgeois Tageblatt dans son édition du 16 décembre, Jean Asselborn avance d’ailleurs selon le Tageblatt qu’au-delà d’un gel des hostilités, l'Iran, la Russie et l'Arabie saoudite devraient signaler leur volonté de pacifier le pays, car si ces trois États ne sont pas parties directement à ce conflit, ils l’utiliseraient par procuration pour faire valoir leurs intérêts, de même que les États-Unis et d'autres pays occidentaux.

"Les Nations unies sont neutres. Personne ne peut accuser M. de Mistura de prendre parti. Donc, il faudrait l’écouter attentivement quand il demande à la Russie, à l'Iran et à l'Arabie saoudite de montrer leur volonté de coopérer", y dit-il. "Alep ne peut pas tomber", plaide encore le ministre Asselborn, qui souligne que si les combats y étaient gelés, cela permettrait de venir en aide aux populations. Dans ce cas, il faudrait "tout faire pour donner des aliments, des médicaments pour la population, et cela pourrait être un rôle important pour l'UE", a-t-il dit selon des propos rapportés dans le Bulletin du 16 décembre de l’Agence Europe.

Dans leurs conclusions, les ministres soulignent en outre que "l'UE cherchera des moyens pour apporter un soutien concret aux efforts [de l’Envoyé spécial] en contribuant notamment à la renaissance de la gouvernance et de l'administration locales, à la restauration des services de base et au retour à la normalité dans des zones où la violence est réduite, en particulier à Alep, quand les conditions le permettront". Une réduction de la violence ne pourra cependant pas être atteinte sans une surveillance efficace, de préférence ancrée au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, préviennent encore les ministres.

Rappelant que "l’objectif global demeure un processus dirigé par les Syriens conduisant à une transition qui réponde aux aspirations de l’ensemble du peuple syrien", sur la base notamment du communiqué de Genève du 30 juin 2012, l'UE "appelle toutes les parties syriennes à montrer leur engagement clair et concret à ce processus, et d'y assurer la participation de la société civile et des femmes", poursuivent les conclusions. Les ministres y soulignent que l'UE est prête "à s'engager avec tous les acteurs régionaux et internationaux qui ont une influence sur les parties syriennes" et qu’elle "les appelle à utiliser leur influence de manière constructive à cette fin".

Par ailleurs, le Conseil a condamné "sans réserve les atrocités et les violations des droits de l'homme et les abus perpétrés par le régime de Bachar Al Assad, par l'organisation État islamique, Jabhat al-Nusra et d'autres groupes terroristes". Cela "comprend les bombardements aveugles par les forces du régime et les atrocités commises par l’EIIL", lit-on dans les conclusions du Conseil qui rappelle que "l’UE continuera d'encourager tous les efforts pour parvenir à une solution politique reposant sur le consentement mutuel afin de maintenir l'unité, la souveraineté, l'intégrité territoriale ainsi que le caractère multi-ethnique et multi-religieux de la Syrie".

Dans ce contexte, les ministres européens des Affaires étrangères ont également abordé la question de l’Iraq, les conclusions diffusées par le Conseil rappelant que "l’UE a assuré le gouvernement du Premier ministre iraquien, M. Haider al Abadi, de son plein soutien dans les efforts que celui-ci déploie en faveur de politiques inclusives et de la réconciliation nationale" et qu’elle "s’engage à agir de manière globale contre la menace posée par le terrorisme et à s’attaquer à ses dynamiques sous-jacentes, qui ont donné pied à l’EIIL", y lit-on.

Enfin, la situation en Libye a également été abordée, en présence du Représentant spécial du Secrétaire Général de l’ONU, Bernardino León. Les ministres ont eu un échange de vues sur les possibles moyens diplomatiques que l’UE peut apporter afin de soutenir une solution politique dans le pays, rapporte le Ministère luxembourgeois des Affaires étrangères dans son communiqué, tandis que les conclusions du Conseil ne font pas mention du sujet. Selon le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, la guerre civile en Libye constitue un risque pour la sécurité de l’UE, dans la mesure où "un délitement de la Libye peut avoir des conséquences dramatiques pour le Sud de l’UE", rapporte la dpa.

Nouvelle approche de l’UE envers la Bosnie-Herzégovine

Le Conseil a par ailleurs examiné la situation dans les Balkans occidentaux, au lendemain d’une visite effectuée par la Haute Représentante, Federica Mogherini et le commissaire chargé de la politique de voisinage, Johannes Hahn, en Bosnie-Herzégovine, dont les résultats ont été présentés aux ministres. Dans ce contexte, le Conseil s’est accordé sur une nouvelle approche de l'UE à l'égard de la Bosnie-Herzégovine sur la voie de l'adhésion à l’Union qui "ne comportera pas de modification des conditions d'adhésion à l'UE" et "à travers laquelle toutes les conditions, y compris la mise en œuvre de la décision Sejdić-Finci devront être respectées".

Dans ses conclusions décrivant cette approche révisée, le Conseil, qui  "réaffirme son engagement sans équivoque à la perspective européenne de la Bosnie-Herzégovine", invite la Haute Représentante et le commissaire Hahn à dialoguer avec les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine "en vue de garantir un engagement écrit irrévocable d'entreprendre des réformes en vue d’adhérer à l’UE". Une fois que cet engagement a été accepté par la présidence de Bosnie-Herzégovine, signé par les dirigeants politiques de Bosnie-Herzégovine et approuvé par le Parlement de Bosnie-Herzégovine, le Conseil se prononcera sur l'entrée en vigueur de l'accord de stabilisation et d'association.

"Il peut y avoir un nouveau départ pour l'UE et la Bosnie-Herzégovine. Nous sommes prêts à nous engager et à rendre la pareille au moment où cet engagement sera adopté par le Parlement. Ce pourrait être un tournant sur le chemin de la Bosnie-Herzégovine vers l'Union européenne", a indiqué la Haute Représentante, Federica Mogherini.

Ukraine – De nouvelles mesures restrictives à l’étude

Le Conseil a en outre fait le point sur la situation en Ukraine, avant la tenue du premier Conseil d'association qui était organisé le même jour en vertu de l’accord d’association conclu avec ce pays et ratifié par le Parlement européen en septembre 2014. Dans ce contexte, le Conseil a confirmé son accord de principe à la proposition du Haut Représentant pour les mesures restrictives supplémentaires à l'UE en réponse à l'annexion illégale de la Crimée et de Sébastopol, notent les conclusions adoptées par les ministres européens qui précisent que "les discussions techniques sur la proposition sont en cours" sans plus d’indications. Le premier Conseil d’association UE/Ukraine a par ailleurs adopté une série de conclusions communes dans lesquelles il souligne l’engagement des deux parties dans le cadre de leur accord d’association.

Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, cité dans l’édition du 16 décembre du quotidien Tageblatt, s’est pour sa part félicité de l’engagement de son homologue ukrainien à mener les réformes urgentes le plus vite possible, avec l’objectif de réduire la corruption et de réformer l’Etat vers une plus grande décentralisation. Selon le ministre, l’un des problèmes majeurs reste le non-respect du cessez-le-feu négocié à Minsk (Biélorussie) en septembre 2014, alors que parallèlement, les difficultés économiques de l’Ukraine sont profondes.  Enfin, estime le ministre Asselborn, l’Ukraine devra convaincre la communauté internationale de sa crédibilité, ce qui passera notamment par l’identification et la poursuite des tireurs embusqués qui avaient fait feu sur la place du Maïdan, à Kiev, lors des heurts qui avaient conduits à la destitutions puis la fuite du président ukrainien alors en poste, Viktor Ianoukovitch.

Il est encore à noter que, lors de leur rencontre, les ministres des Affaires étrangères ont également adopté des conclusions sur la République centrafricaine, sur le Soudan du Sud, ainsi que sur l’initiative d’investissement du Sud de la Méditerranée (AMICI).