Greenpeace et la plateforme luxembourgeoise Meng Landwirtschaft ont vivement dénoncé l’accord qui permettra aux Etats membres d’interdire les OGM sur leur territoire. Confirmé par le Parlement européen le 13 janvier 2015, cet accord trouvé en trilogue en décembre dernier prévoit que les Etats membres ne seront plus obligés de négocier avec les entreprises OGM, comme l’avait demandé le Conseil, mais qu’ils peuvent invoquer pour motifs des objectifs de politique environnementale.
Greenpeace a déploré "d’importantes lacunes" dans l’accord. "On trouve problématique que des entreprises ont le droit de négocier avec des gouvernements élus. Cela donne un rôle formel à des entreprises privées dans le processus d’interdiction des OGM" qui leur permettrait d’influencer les gouvernements, a souligné Marco Contiero, le directeur de la politique agricole européenne chez Greenpeace, dans une interview accordée à la radio Deutsche Welle. Il ajoute que dans la liste de motifs que peuvent invoquer les Etats pour interdire les OGM seraient exclus les arguments "légaux les plus forts", à savoir ceux liés à des risques et impacts environnementaux. Marco Contiero estime que l’objectif principal de cette législation est de permettre une autorisation plus rapide des OGM en Europe et qu’elle bénéficiera avant tout aux entreprises biotechnologiques. Il concède néanmoins que les Etats membres ont maintenant un instrument "plus clair", mais légalement faible, pour interdire les OGM sur leur territoire.
La plateforme d’ONG luxembourgeoise "Meng Landwirtschaft", dont font partie Greenpeace et Caritas, a dénoncé des "points faibles importants" dans la législation. "Elle donne un pouvoir injustifié aux entreprises biotechnologiques dans les négociations sur l’interdiction des OGM", a déclaré Martina Holbach, responsable de campagne chez Greenpeace Luxembourg, dans un communiqué du 12 janvier 2015. "Et il est absurde que les Etats ne puissent pas interdire les OGM en raison de leur impact sur l’environnement", a-t-elle ajouté. Meng Landwirtschaft appelle le gouvernement luxembourgeois à tout faire pour interdire les cultures d’OGM au Luxembourg et dans la Grande Région. Celui-ci avait déclaré le 13 janvier dernier que "la culture des OGM restera interdite au Luxembourg".
"Certains Etats anti-OGM vont se retrouver dans une position schizophrénique", a prévenu en outre Eric Meunier, chargé de mission pour l'association InfOGM, cité par le quotidien Le Monde. "Ils pourront interdire un OGM sur leur territoire mais, en échange, la Commission européenne attend qu'ils ne s'opposent pas à l'autorisation de cet OGM dans le reste de l'Europe."
La Confédération allemande de l’alimentation écologique (Bölw) a pour sa part mis en garde dans un communiqué contre les coûts des cultures d’OGM, en publiant un rapport sur les dégâts causés par les OGM. Selon celui-ci, les coûts pour des contaminations s’élèveraient à près de 5 milliards de dollars dans les dernières années au niveau mondial. De même, les coûts pour les herbicides ou les semences OGM auraient considérablement augmentés.
L’ONG Friends of the Earth (FOE) a appelé les Etats membres à se saisir immédiatement des nouveaux pouvoirs que leur confère la nouvelle législation. Pour Mute Schimpf, responsable de campagne, il s’agit d’un "clou supplémentaire au cercueil" des OGM. Si la nouvelle législation n’est "pas parfaite", elle permet aux gouvernements de "fermer la porte" aux semences OGM en Europe.
L'industrie OGM a déploré que le droit ait été laissé aux États de dire non "sur des bases non-scientifiques". "C'est un signal d'arrêt à l'innovation européenne", a affirmé Jeff Rowe, un représentant d'EuropaBio. Il estime que cela envoie un "mauvais signal" aux entreprises innovantes désireuses d’investir en Europe et que les agriculteurs européens ont perdu l’accès à une technologie clé qui leur permettrait de rester compétitifs.
L’entreprise OGM Monsanto Europe a dénoncé dans un communiqué un "mauvais choix" pour l’Europe qui "sape la science, affaiblit les agriculteurs et augmentera les prix pour les consommateurs européens". Monsanto estime qu’il est "triste et ironique" que l’UE refuse aux agriculteurs l’accès à une technologie agricole moderne qui aurait permis à des agriculteurs dans le monde d’enregistrer des profits records.