Pour l’ONG Friends of Earth Europe, les propositions faites par la Commission ne prennent pas en compte l’urgence à agir pour transformer le système énergétique de l’Europe et lutter contre le changement climatique.
Brook Riley, militant pour la justice climatique et l’énergie auprès de l’organisation, a estimé "frustrant" que la Commission dise vouloir lutter contre les changements climatiques mais ne s’attarde pas sur le "caractère inadapté" de ses propres mesures pour transformer le système énergétique de l’Europe.
Brook Riley estime que "l’on fait croire aux gens que l’UE est en train de prendre des mesures sérieuses contre le changement climatique". Il souligne que la Commission veut sortir des énergies fossiles alors qu’elle cherche dans le même temps à diversifier les approvisionnements en gaz de l’Europe. Il estime que si l’Europe exploitait "tout le potentiel" des économies d’énergie, davantage de réductions d’émissions seraient possibles et "nous pourrions quitter la voie de la dépendance aux énergies fossiles une fois pour toute".
En ce qui concerne la position de la Commission quant au futur accord sur le climat, l’association indique qu’il est "essentiel" que l’UE propose un objectif de réduction des émissions d’ici 2020 et au-delà "plus fort" et "en ligne avec la science", soulignant le besoin de soutien financier et technologique supplémentaire dans les pays en développement.
Qualifiant les propositions de la Commission de “patchwork de politiques”, la conseillère en politique énergétique de Greenpeace, Tara Connolly, a estimé que l’attitude de la Commission est ambivalente, car elle dit vouloir s’éloigner des énergies fossiles mais "se lance aussi à la poursuite de nouveaux approvisionnements en gaz et n’exclut pas le charbon". "L’Europe a besoin d’un plan cohérent si elle veut jouer un rôle dans la lutte contre le changement climatique et devenir le numéro un mondial dans les énergies renouvelables" a-t-elle encore indiqué.
Le WWF (World Wild Fund) a salué la vision de l’Union de l’Energie présentée par la Commission européenne, et notamment les références explicites à la sortie des combustibles fossiles, à la réorganisation des marchés de l’énergie autour des renouvelables et à la place centrale que doit tenir l’efficacité énergétique. Mais il regrette que la Commission avance en même temps la nécessité de renforcer l’approvisionnement en combustibles fossiles et revienne sur la diversification des sources d’uranium ou encore la fusion nucléaire. "Les plans sont à ce stade affaiblis par des incohérences", a indiqué Jason Anderson, responsable climat et énergie au bureau WWF des politiques européennes.
En ce qui concerne la communication de la Commission sur l’accord sur le climat, Jason Anderson a indiqué que "l’UE dépeint une belle impression du Protocole de Paris, mais avec une palette assez limitée – ses propres engagements sur le climat vers Paris sont plutôt des tons de gris". Diane Simiu, Directrices des programmes de conservation au WWF France, évoque la nécessité d’une "contribution plus ambitieuse et équitable", condition pour que l’UE réussisse à "mieux convaincre et obtenir l’adhésion d’autres pays sur sa vision de l’accord".
Le président du groupe de réflexion E3G basé à Londres, Nick Mabey, a relevé le fait que l’Union de l’énergie a mis la décarbonisation au cœur de ses priorités mais que la stratégie internationale présentée ne reflète pas cette ambition. Il insiste sur le fait que l’Europe a besoin d’un "plan clair" pour mener ce changement radical à l’échelle mondiale. Son directeur associé, Jonathan Gaventa, a lui aussi critiqué l’attitude ambivalente de la Commission. Liz Gallagher a elle commenté la communication de la sur le protocole de Paris. Elle indique que si la transition vers la décarbonisation est irréversible, la feuille de route ne reflète pas le "changement radical" prévu pour l’Europe. Pour elle, "la Commission est en train de manquer une opportunité de faire plus".
Si le World Ressource Institute (WRI) a salué la feuille de route de la Commission quant à l’accord sur le climat, parlant d’un "engagement sérieux de l’UE pour dégager une accord robuste et universel", il appelle également l’Europe à "faire plus" pour "réduire ses dépenses, créer des emplois verts et protéger l’environnement". Jennifer Morgan, directrice monde de l’institut, évoque à ce titre une étude montrant que l’Europe pourrait atteindre une réduction des émissions s’élevant à 49 %. L’organisation regrette également que la Commission soit moins "transparente" au sujet des autres actions, peut-on encore lire dans le communiqué de presse.
Pour CAN Europe (Climate Action Network Europe), la position de la Commission en vue du futur accord sur le climat nécessite plus de clarté et ne va pas assez loin. L’organisation indique notamment que la quantité de gaz à effet de serre que l'UE sera autorisée à émettre après 2020 "n'est pas claire". Selon elle, "la proposition ne coupe pas court aux échappatoires qui peuvent diluer l'objectif de l'UE jusqu'à 4,5 %". "Étant donné que les émissions devraient être réduites de 25 % en 2020, si les réductions en 2021 démarrent à -20 %, les États membres n'auront aucun effort à faire dans les premières années", a souligné Wendel Trio, directeur de l'organisation. Pour que la contribution de l’UE soit "équitable et adéquate", elle devrait viser à réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 95 % d’ici à 2020, peut-on lire dans le communiqué. L'ONG regrette en outre que la Commission n'indique pas comment l'UE pourrait faire mieux qu'une réduction de 40 % de ses émissions.
L’organisation patronale européenne Business Europe, a indiqué, dans un communiqué disponible sur son site, qu’elle soutenait "l’engagement dont fait preuve la Commission pour revitaliser la politique énergétique et renforcer la capacité de l’Europe à agir dans ce domaine". Markus J. Beyer, directeur général, a salué "l’approche holistique" proposée par la Commission, la qualifiant de "bonne base" pour équilibrer les défis énergétiques, climatiques et industriels de l’UE, tout en insistant sur le fait qu’il allait falloir "être vigilant dans les prochaines décisions" car des "compromis importants" devront être faits dans la mise en œuvre de la stratégie.
Selon la Confédération européenne des syndicats (CES), les propositions présentées par la Commission pour l’Union de l’énergie sont ambitieuses et couvrent de nombreux aspects, mais le plan d’action ne donne que peu de détails quant à la manière de les concrétiser. Le secrétaire général adjoint de l’organisation, Józef Niemiec, a indiqué que le projet "présente de nombreux avantages potentiels pour l’industrie, l’emploi, les consommateurs et le climat" et a souligné qu’il doit "inclure une transition juste pour les travailleurs". "Il y aura des gagnants et des perdants et il est donc essentiel que les travailleurs puissent profiter de nouvelles opportunités d’emploi et disposent d’alternatives quand d’autres emplois sont perdus. Les facteurs liés au marché du travail doivent faire partie de la programmation et de la mise en œuvre dès le lancement du projet", a-t-il encore indiqué.
L’UEAPME, l’association des artisans et PME (Petites et moyennes entreprises) européennes, a salué dans un communiqué les "bonnes propositions" pour le secteur de l’énergie énoncées par la Commission, mais a qualifié de "peu réalistes" les propositions concernant le secteur des transports. Si elle se félicite de l'utilisation prévue du plan d'investissement Juncker pour les investissements dans la performance des bâtiments, qui permettra aux PME de bénéficier d'un soutien financier et technique, elle met en garde contre la décarbonatation. Selon elle, le passage à l’électromobilité risque de porter préjudice à la compétitivité européenne car elle est encore trop coûteuse. Concernant les secteurs non compris dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission (ETS en anglais), l’association se dit "préoccupée" par le "manque d’implication" des organisations de PME pour la mise en place au niveau national des mesures législatives pour les secteurs hors ETS.
L’association des Chambres de commerce et d’industrie européennes Eurochambres évoque elle aussi des "sentiments mitigés" concernant les propositions mises sur la table par le Commission. Arnaldo Abruzzini, secrétaire général de l’association, a déclaré, dans un communiqué de presse, que les priorités avaient "peut-être été réorientées mais qu’aucune des stratégies présentées n’était vraiment nouvelle". L'association salue l'intention de la Commission d'avoir une approche "tolérance zéro" concernant la mise en œuvre de la législation existante pour le marché intérieur de l'énergie, mais elle lui demande également d'aller au-delà en développant des systèmes de soutien à l'échelle de l'UE pour les énergies renouvelables. Elle souhaite également que des règles européennes claires soient établies rapidement pour les mécanismes de capacité. L’association se félicite en outre de l'accent mis par la stratégie sur l'efficacité énergétique dans les secteurs des bâtiments et des transports, mais elle souligne la nécessité de mesures intersectorielles de soutien ciblant les PME. Enfin, elle indique que la "principale déficience" des propositions concerne l’absence de stratégie claire pour assurer des prix de l’énergie abordables et compétitifs.