L’Institut national de la statistique et des études économiques (STATEC) a publié le 26 mars 2015 son "flash de conjoncture" mensuel dans lequel il dresse l’état des lieux de la situation économique dans la zone euro et au Luxembourg.
Le STATEC y relève notamment une évolution récente du contexte conjoncturel globalement plus favorable aux dépenses des ménages. Selon les analystes de l’institut, la forte baisse des prix du pétrole enregistrée depuis la mi-2014, "bien que légèrement amoindrie pour les pays de la zone euro par la dépréciation simultanée de la monnaie unique, va continuer à alléger la facture énergétique des consommateurs". Début 2015, les prix de l'énergie affichent ainsi au un repli de l'ordre de plus de 10 % sur un an, et même de 20 % pour ce qui est des carburants et du mazout considérés individuellement, tandis que des effets baissiers sont à attendre sur les prix des autres sources d'énergie "avec un certain délai", dit le STATEC.
L’environnement conjoncturel dans la zone euro va également se montrer plus porteur, souline le STATEC, ce dont témoignent les révisions à la hausse des perspectives de croissance des organisations internationales déjà mentionnées dans le flash de février de l’institut. D’une manière générale, et en dépit de perturbations passagères liées au relèvement de TVA au 1er janvier 2015, les fondamentaux de la consommation tendent donc plutôt à s’améliorer, indiquent les auteurs de la note. Ainsi, au niveau national, la faiblesse de l’inflation va favoriser l’évolution des salaires exprimée en termes réels, dans un contexte où la confiance des consommateurs repart à la hausse, portée en particulier par des anticipations plus favorables concernant l’évolution du chômage depuis janvier, relèvent-ils. L’institut note néanmoins que les consommateurs du Luxembourg sont moins optimistes sur les perspectives économiques, ce qui serait "éventuellement en lien avec les incertitudes liées aux effets potentiels des mesures européennes d’harmonisation fiscale", poursuivent ses analystes.
Les auteurs de la note soulignent d’autre part que la production industrielle luxembourgeoise a enregistré une progression de presque 10 % sur un an en décembre 2014 et en janvier 2015, soit "une performance plutôt impressionnante". Les données détaillées ne révèleraient cependant pas une dynamique d'ensemble dans ce rebond, principalement lié à la sidérurgie, les bons résultats relevant donc plutôt à leurs yeux de "phénomènes isolés et passagers".
Pour ce qui est du secteur financier, le STATEC relève que les organismes de placement collectifs (OPC) "démarrent l'année en trombe". Leur patrimoine net a ainsi augmenté de 5,9 % sur un mois en janvier 2015, soit "la plus forte progression mensuelle enregistrée depuis 1999!", notent les analystes de l’institut, qui la comparent avec une performance européenne de 5,1 % le même mois. Selon le STATEC, cette hausse résulterait à 80 % d'effets de marché, à savoir principalement du lancement du programme d'assouplissement quantitatif de la Banque centrale européenne "qui a notamment soutenu le cours des actions européennes" et de la dépréciation de l'euro par rapport à l'ensemble des autres devises. L'investissement net en capital a atteint plus de 35 milliards d’euros en janvier 2015, un record depuis le début de 2006, note encore l’institut.
Toujours dans le secteur financier, le STATEC constate une hausse soutenue des dépôts des ménages. Les analystes relèvent ainsi que les dépôts des ménages de l'ensemble de la zone euro au Luxembourg ont nettement progressé en décembre 2014 et janvier 2015, de presque 4 % sur l'ensemble de ces deux mois. Si dans ce contexte, les dépôts des ménages résidents ont globalement poursuivi la tendance relativement dynamique des mois précédents, le STATEC s’étonne en revanche de constater que ceux des ménages des autres pays de la zone se sont quelque peu redressés, "d'autant plus que l'entrée dans 2015 est marquée par le passage à l'échange automatique d'informations", indiquent ses analystes.
Tout en soulignant que des données détaillées font encore défaut pour l'affirmer, le STATEC avance qu’il n'est pas à exclure selon que ce phénomène intervienne en lien avec la situation actuelle de la Grèce et l'arrivée au pouvoir du parti de gauche radicale Syriza. "Des sorties importantes de capitaux ont en effet été constatées en Grèce depuis décembre, où la baisse relevée sur les dépôts des ménages entre novembre 2014 et janvier 2015 s'élève à quelque 10 milliards d’euros", soit une baisse de 8 % environ soulignent les auteurs de la note qui jugent "possible que certains de ces capitaux aient trouvé refuge au Luxembourg", bien que "cela reste hypothétique", disent-ils.
En réponse à une question parlementaire, le 23 mars 2015, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, n’avait de son côté pas pu confirmer l’existence de telles fuites de capitaux. "Ni le Ministère des Finances ni la CSSF ne font la collecte de données concernant les mouvements de capitaux en Europe et ne sont dès lors pas les mieux placés pour apprécier s'il y a d'éventuelles fuites de capitaux à partir de la Grèce vers le Luxembourg", répondait le ministre au député Justin Turpel. Et de renvoyer aux organisations internationales telles qu’Eurostat pour trouver "des informations agrégées sur les flux de capitaux transfrontaliers".
Concernant le marché du travail, le STATEC note par ailleurs la confirmation de signaux plus positifs. Au début de 2015, le rapport entre le nombre de nouvelles offres d'emploi et les nouvelles inscriptions au chômage, reste ainsi favorablement orienté, cela en raison d’une légère tendance à la baisse du nombre des inscriptions mais surtout de la hausse soutenue du nombre de postes vacants déclarés à l'ADEM. Les auteurs de la note estiment que ce phénomène pourrait être lié à des changements structurels, comme par exemple la mise en place du service employeurs à l'ADEM, mais ils soulignent que la baisse du chômage sur les derniers mois et l'accélération progressive des créations d'emploi "montrent que des tendances conjoncturelles plus favorables se mettent en place".
Dans la zone euro, l'emploi a continué à progresser et le chômage à diminuer au cours des derniers mois, note le STATEC, mais les tendances sont toutefois "moins réjouissantes" que sur les trimestres précédents. L’emploi tend en effet à ralentir, avec une hausse de seulement 0,1 % au quatrième trimestre 2014, après avoir augmenté de respectivement 0,2 % et 0,3 % sur les deux trimestres précédents. Selon les analystes de l’institut, cette évolution s'explique surtout par des baisses importantes dans certains pays du Sud (Portugal, Italie et Grèce) tandis qu’à l'inverse, l'Espagne, l'Allemagne et les Pays-Bas contribuent toujours positivement à la création d'emplois. Le taux de chômage s’est de son côté établi à 11,2 % en janvier 2015 dans la zone euro, après un pic à 12,1 % en mai 2013 soulignent encore le STATEC, l’Allemagne et l'Espagne ayant pesé le plus (à hauteur de trois quarts) sur le repli du chômage dans la zone euro à la fin de 2014.
Enfin le STATEC constate un redressement du taux d’inflation au Luxembourg (+0,1 % sur un an en février 2015) "sous l’impulsion" de la moindre baisse de l’indice des produits pétroliers (-14 % sur un an en février contre -17,3 % en janvier), alors que le même phénomène s’observe en zone euro : l’inflation y remonte pour la première fois depuis octobre 2014, mais se situe toujours dans le négatif avec -0,3 % sur un an. Cette tendance à la hausse serait liée à l’évolution des prix des services, qui "avait déjà accéléré en janvier sous l'effet de la hausse de la TVA", mais en février ce sont surtout les loyers d’appartement qui contribuent à la hausse des prix des services (+1,3 % sur un an, contre +0,8 % en janvier), conclut le STATEC.