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Economie, finances et monnaie
Le Parlement européen adopte sa position sur le projet de règlement encadrant les fonds monétaires, et ouvre ainsi la voie aux négociations en trilogue
29-04-2015


Les eurodéputés réunis en plénière le 29 avril 2015 ont adopté à une large majorité (487 voix pour, 155 contre et 51 abstentions) la position du Parlement européen sur le projet de règlement encadrant les fonds monétaires.

Le précédent Parlement européen n’avait pas réussi à s’entendre, et l’eurodéputée Neena Gill (S&D), rapporteure sur le dossier, s’était attachée à arracher un compromis finalement voté en commission ECON en février dernier. Le débat qui s’est tenu en plénière à la veille du vote a rappelé les principales positions défendues lors des intenses discussions qu’a suscitées le dossier en commission.L'eurodéputée Neena Gill (S&D), rapporteur sur le projet de règlement encadrant les fonds monétaires le 28 avril 2015 (c) Parlement européen

Comme l’a souligné le commissaire en charge du dossier, Jonathan Hill, l’enjeu de cette proposition qui date de septembre 2013 est de réduire les risques systémiques présentés par les fonds monétaires, tout en leur permettant de jouer leur rôle de financement à court terme. Les fonds monétaires sont en effet un pan important du système bancaire parallèle ou shadow banking, observé souvent avec inquiétude du fait qu’il est faiblement réglementé tout en jouant un rôle systémique.

Pour la rapporteure et la plupart des rapporteurs fictifs qui ont œuvré au compromis, l’enjeu était d’assurer que tous les types de fonds monétaires soient transparents, liquides et stables.

Aussi, nombreuses ont été les voix saluant un compromis qui a permis, comme l’a rappelé Neena Gill, d’aller outre la division qui existait entre partisans de deux modèles différents de fonds monétaires, à savoir les fonds à valeur liquidative constante (CNAV ou Fonds VLC), plus répandus aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, et les VANV, fonds monétaires à valeur liquidative variable beaucoup plus répandus en France notamment.

L’eurodéputé luxembourgeois Frank Engel (PPE), a déclaré en plénière faire partie de ceux qui sont satisfaits de ce qui a été atteint en termes de compromis.

La voie est désormais ouverte pour des négociations avec le Conseil qui n’a pas encore adopté sa position mais qui, aux dires de Neena Gill, a progressé ses derniers mois dans ses travaux sur un dossier qui n’est pas sans importance pour la place financière luxembourgeoise comme en témoignaient les premières réactions de l’association luxembourgeois des fonds d’investissements (ALFI) en septembre 2013. La plupart des eurodéputés se sont montrés pressés d’engager ces discussions afin que ce pan important du système financier soit enfin encadré.

La position du Parlement européen a ainsi été soutenue par les groupes PPE, S&D et ADLE, sans avoir le soutien des Verts/ALE.

Quant à ceux qui se sont opposés au compromis trouvé, au premier chef desquels les Verts/ALE, qui avaient déjà voté contre le projet en commission ECON,  ils espéraient améliorer un texte vivement critiqué en février dernier par des amendements qui n’ont finalement pas été adoptés. "Ce texte ne répond pas à nos engagements internationaux" a lancé l’eurodéputée Eva Joly en plénière en faisant référence aux engagements pris au sein du G20 pour réguler les crédits gérés en dehors du système bancaire classique. Et il ne reflète pas l’équilibre politique de notre assemblée, a-t-elle déploré en réitérant ses accusations à l’encontre de lobbies puissants qu’elle avait déjà formulées à la suite du vote en commission ECON. "La balle est maintenant dans le camp des gouvernements de l’UE" a-t-elle conclu à l’issue du vote, car le vote "doit être corrigé".

Les principaux éléments de la position adoptée par le Parlement européen

Dans la foulée du compromis trouvé en commission ECON, les eurodéputés ont retenu l’idée de prévoir des frais de liquidités et un système de verrouillage des demandes de rachat appliqués en période de tension plutôt que la réserve de fonds propres de 3 % du total des actifs que proposait la Commission pour les fonds monétaires à valeur liquidative constante (CNAV ou fonds VLC).

Le Parlement européen prévoit trois types de fonds monétaires à valeur liquidative constante, à savoir :

  •  les fonds VLC liés à la dette publique, fonds investissant une majorité de leurs actifs dans les dettes publiques, à savoir des fonds VLC qui investissent 99,5 % de leurs actifs dans des instruments de dette publique et qui, avant 2020, investiront au moins 80 % de leurs actifs dans des instruments de dette publique de l'Union ;
  • les fonds VLC pour petits investisseurs, auxquels seules les organisations caritatives, les organismes sans but lucratif, les administrations publiques, les fondations publiques et les personnes physiques pourraient souscrire ;
  • et enfin, et ce fut un des grands enjeux des discussions en commission ECON, les fonds monétaires à faible volatilité (Low volability net asset value ou LVNAV). Ces derniers pourraient maintenir une valeur nette stable comme le font les CNAV à moins que la valeur nette du portefeuille ne dévie de 20 points de base. Dans ce cas, le fonds devrait refléter la valeur réelle du portefeuille.

La position adoptée par le Parlement européen prévoit pour cette dernière catégorie une clause transitoire appelant à une conversion obligatoire après cinq ans de ces LVANV vers les VNAV. Un an avant que leur autorisation n'expire, la Commission devra procéder à un examen pour déterminer si la question de la stabilité financière et du risque systémique est traitée grâce à ces fonds LVNAV. La Commission sera obligée de présenter une proposition législative sur base de ses conclusions, y compris la possibilité d'une autorisation indéfinie. Une clause de révision jugée cruciale par les eurodéputés, comme beaucoup n’ont pas manqué de le souligner en plénière.

Le groupe des Verts/ALE avait proposé d’étendre cette clause de transition et de révision aux trois catégories de fonds monétaires créées, un amendement qui, s’il avait été adopté en plénière, aurait poussé le groupe des Verts/ALE  à voter en faveur du texte, ainsi que l’a expliqué Eva Joly au cours du débat qui a précédé le vote. Cela n’aura finalement pas été le cas.