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Semestre européen
Semestre européen 2016 – Les partenaires sociaux et le gouvernement ont eu l’occasion d’un deuxième échange de vues sous l’égide de CES, notamment sur le rapport de la Commission sur le Luxembourg – La position de l’UEL
23-03-2016


ces-semestre-europeen-uelLors de la deuxième manche du dialogue mené le 23 mars 2016 à la Chambre de Commerce dans le cadre du cycle annuel 2016 de concertation régulière entre le Gouvernement et les partenaires sociaux représentatifs sur le plan national sur le Semestre européen, le président de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL), Michel Wurth, a souhaité que cet échange aille au-delà de la présentation des positions respectives.

Pour l’UEL, le rapport de la Commission européenne du 26 février 2016 contient des observations que la fédération patronale partage largement, dans la mesure où il souligne la fragilité des résultats de croissance économique, met en relief les progrès limités du Luxembourg dans la mise en œuvre des 3 recommandations du Conseil de 2015 sur l’assiette fiscale, les frais liés au vieillissement et notamment au système de pensions et au mode de fixation des salaires, énumère les défis à relever par les pouvoirs publics et confirme les messages des organisations patronales.

L’UEL partage aussi l’analyse de la Commission sur le contexte économique international : que l’économie européenne connaît une légère reprise, mais que les risques extérieurs s’intensifient, que le contexte géopolitique est devenu très mouvant et les marchés financiers volatils, avec la politique monétaire de la BCE et les menaces de Brexit voire de "Schengxit". Pèsent également le ralentissement de l’économie chinoise et l’endettement d’Etats membres comme la France, l’Italie ou la Belgique dont les finances publiques sont à la merci d’une hausse des taux de refinancement. Bref, la reprise dans l’UE reste lente et fragile, de sorte que l’UEL, comme la Commission, prône la nécessité d’accélérer les réformes structurelles, d’encourager l’investissement et de renforcer la compétitivité de l’économie.

Au niveau national, l’UEL critique l’augmentation d’ici 2060 des dépenses liées au vieillissement de la population, qui devrait augmenter de 6 % du PIB, donc l’équivalent de 3 milliards d’euros, cela sur le fond d’une augmentation de la population d’un peu moins de 600 000 actuellement à 1,1 million d’habitants, ce qui supposerait aussi  une forte augmentation des travailleurs frontaliers qui occupent d’ores et déjà plus d’un tiers des emplois, pour que le modèle économique et social puisse encore être financé. Michel Wurth, qui estime que ces chiffres ne sont "pas très réalistes", a mis en exergue l’ampleur des investissements nécessaires et l’impact sur l’aménagement du territoire. Il a également pointé l’évolution du coût salarial unitaire (CSU), nettement supérieur à celui des voisins et la question de l’envolée réelle des prix du logement au Luxembourg, et que la Commission a elle aussi soulevée dans son rapport du 26 février 2016. La question du CSU fait régulièrement l’objet de polémiques entre les organisations patronales et les syndicats, Chambre des salariés incluse.

Pour l’UEL, le Luxembourg est un "petit pays ouvert" qui a besoin de comptes publics solides et soutenables, de structures économiques sur-performantes pour financer sa politique sociale, d’un niveau élevé d’investissements pour conserver des perspectives de croissance, mais aussi d’un environnement économique favorable à la création et au développement d’entreprises. L’UEL met également en avant la nécessité d’une politique d’emploi efficace et d’un système d’éducation performant, de logements accessibles et d’une politique énergétique et climatique compétitive.

Le premier défi est pour l’UEL d’assurer la soutenabilité des finances publiques. Elle est d’avis que  les recettes sont fort concentrées du point de vue sectoriel et donc fragiles. Ainsi, le fait que 28 % des impôts directs sur les sociétés soient issus des SOPARFIs souligne la forte concentration de ce type d’impôts. Une fragilité similaire marque l’impôt sur le revenu des personnes physiques, où 5 % des ménages contribuent à raison de 50 % des recettes, et 10 % de ces ménages à 75 % de ces recettes, dans un contexte de croissance de l’emploi non-marchand. L’impôt sur la fortune et les impôts indirects (TVA et accises) sont également considérés comme fragiles, et finalement la volatilité de la taxe d’abonnement est soulignée.

Du côté des dépenses, l’UEL les juge "élevées et en forte progression", notamment tout ce qui a à voir avec les dépenses liées au vieillissement de la population et les dépenses courantes de l’Etat central, "bien plus élevées que dans la zone euro". L’UEL estime que les dépenses publiques doivent donc être d’autant mieux maîtrisées que le Luxembourg se trouve en période de forte conjoncture. Il s’agit de définir des plafonds de dépenses et de mettre en place des normes de dépenses publiques opérationnelles, de procéder à une revue systématique des dépenses selon le principe "faire autant ou même mieux avec moins" et d’éviter tout automatisme en matière de dépenses, notamment en déconnectant les dépenses des recettes vulnérables et en rétablissant durablement la soutenabilité à terme des comptes sociaux. Par ailleurs, l’UEL recommande d’évaluer les projets d’investissement de manière plus complète et transparente à tous les stades.

Le deuxième défi est pour l’UEL d’investir dans l’avenir. Trois principes devraient être respectés : "maintenir une fiscalité compétitive pour conforter la croissance et inciter les investissements étrangers ; réduire progressivement la charge fiscale des entreprises à un niveau de taux all-in se situant dans la 1ère moitié du classement de l'OCDE et qui s'adaptera en fonction de celui en vigueur chez nos principaux concurrents (UK, Irlande, Suisse....), donc aller vers un taux d’imposition autour de 12 % au lieu des 26 % actuels ; établir une veille annuelle quant aux effets de BEPS pour neutraliser l'élargissement de la base par une baisse des taux."

Pour soutenir l’investissement, l‘UEL propose que soit instaurée une réserve immunisée d’impôt pour les PME, que la bonification pour investissement soit augmentée, que des réductions d’impôt pour les investissements  dans le capital des start-ups et PME soient prévues, et qu’une déduction fiscale soit envisagée en cas pour les investissements en fonds propres. 

Citant le rapport de la Commission, pour qui "la forte dépendance vis-à-vis du secteur financier, qui est une caractéristique structurelle de l’économie luxembourgeoise, représente un facteur de risque", l’UEL prône une double approche : diversifier l’économie  et donc promouvoir l’entrepreneuriat. Il faudrait selon l’UEL stimuler l’esprit d’entrepreneuriat à l’école, rendre le financement plus accessible aux PME, supprimer les freins inutiles à la création et au développement de nouvelles entreprises ; créer un écosystème favorable aux entreprises innovatrices ; promouvoir une réglementation intelligente (Think small first) ; simplifier les démarches administratives (guichet unique), mettre en œuvre une politique volontariste vers un e-Gouvernement et une e-Administration et mettre en œuvre le 4e Plan d’action national en faveur des PME.

La Commission ayant jugé les investissements dans la R&D, et notamment les investissements insuffisants, l’UEL propose des mesures pour promouvoir la R&D et l’innovation : assurer une utilisation optimale des instruments soutenant la RDI au niveau des entreprises ; définir les axes prioritaires de recherche pouvant affecter positivement l’économie nationale ; faciliter l’accès aux programmes européens en simplifiant les procédures administratives ; aménager le régime d’exonération de la propriété intellectuelle ; soutenir les actions de Luxinnovation en faveur des entreprises luxembourgeoises afin de les aider à répondre aux défis de la nouvelle révolution industrielle.

En conclusion, l’UEL prône la nécessité d’un modèle de croissance différent tenant compte de la 3e/4e révolution industrielle qui s’opère, de la mise en œuvre des conclusions de la COP21 de Paris et des conclusions du World Economic Forum 2016. "Qui veut ‘faire du Rifkin’, doit arrêter de ‘faire du Ponzi’" et qui dit "productivité" dit "efficacité", a lancé Michel Wurth. Il a ainsi fait référence d’un côté à l’étude intitulée "The Third Industrial Revolution Strategy", pilotée conjointement par le Ministère de l’Économie, la Chambre de commerce et IMS Luxembourg, en collaboration étroite avec l’économiste américain Jeremy Rifkin et son équipe d’experts, qui est considérée comme un projet pionnier, et de l’autre côté au système de Ponzi, qui est un montage financier frauduleux qui consiste à rémunérer les investissements des clients essentiellement par les fonds procurés par les nouveaux entrants.  Bref, pour l’UEL, le Luxembourg doit « se détourner d’un modèle quantitatif pour rechercher le progrès qualitatif », et s’inspirer des initiatives de l’INDR, Institut National pour le Développement Durable et la Responsabilité Sociale des Entreprises.