Le 17 mai 2016, les ministres européens de l'Agriculture se sont réunis à Bruxelles. Ils ont débattu de la mise en place d'une plate-forme européenne sur le bien-être animal, de la situation de marché, notamment celui du lait, de la viande porcine et des fruits et légumes, ainsi que sur la prise en compte du secteur agricole dans les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'UE après 2020.
Pour nourrir le débat sur le sujet principal à l'ordre du jour qu'est le bien-être animal, la Commission a présenté les résultats de la troisième enquête Eurobaromètre sur le bien-être animal, réalisée auprès de 27 000 citoyens européens en novembre 2015. Une majorité d'Etats Membres, à savoir 17, dont le Luxembourg, ont considéré que "le bien-être animal correspond au devoir de respecter tous les animaux". Avec 62 %, les répondants luxembourgeois arrivaient d'ailleurs en deuxième position derrière les Pays-Bas (70 %). Dix 10 Etats Membres estiment au contraire que le bien-être animal correspond en premier lieu au traitement des animaux d'élevage.
Concernant les aspects liés au commerce international, 93 % des citoyens européens (86 % au Luxembourg) considèrent que les produits importés devraient respecter les mêmes normes de bien- être animal que celles appliquées dans l'Union. "Ceci est particulièrement intéressant dans le contexte actuel des négociations TTIP et MERCOSUR", souligne le communiqué de presse diffusé par le Ministère luxembourgeois de l'Agriculture, de la viticulture et de la protection des consommateurs. L'Agence Europe rapporte d'ailleurs que le Luxembourg, en compagnie de la France, l'Irlande, la Croatie, la Pologne, le Portugal et le Royaume-Uni, ont demandé que le sujet du bien-être animal dans l'élevage fasse partie des négociations commerciales avec les pays tiers, notamment avec les États-Unis et les pays du Mercosur.
"Concernant le prix des produits, les consommateurs européens sont disposés à faire un effort supplémentaire pour acheter des produits respectueux du bien-être des animaux, même si cela suppose de changer de magasin ou de débourser plus. Selon le même rapport, les citoyens estiment toutefois ne pas disposer des informations nécessaires pour pouvoir opérer un choix fondé sur des considérations relatives au bien-être animal. Il serait dès lors intéressant d'envisager un label clair permettant de guider plus facilement les consommateurs en parfaite connaissance de cause", ajoute le communiqué du Luxembourg.
Ainsi, quand sur base notamment des enseignements de cette enquête, les Etats membres étaient invités à présenter leur position au sujet de l'établissement d'une plate-forme européenne sur le bien-être animal, le Luxembourg a estimé qu'elle devrait discuter des modalités et possibilités de l'inclusion des normes de bien-être animal dans les accords internationaux, et "entamer une réflexion sur les possibilités de développement des produits respectueux du bien-être animal ainsi que de leur étiquetage spécifique tel que réclamé par nos citoyens", a déclaré Fernand Etgen, durant la session publique.
L'idée d'une plateforme européenne avait été lancée par l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et la Suède lors du Conseil Agriculture du 15 février 2016. Le Luxembourg en avait aussitôt soutenu l'idée. A l'instar du Luxembourg, un grand nombre d'Etats membres ont défendu l'idée que la plate-forme devrait servir à l'échange d'expériences entre Etats membres sur la mise en œuvre de la législation et à l'amélioration de la mise en œuvre de la législation en vigueur. L'Autriche, la Lettonie et la Pologne sont les seuls pays qui ont protesté contre la création d'une telle plateforme.
La Commission européenne a indiqué qu'elle travaillait à la mise en place de cette plateforme en soulignant que les ONG, les parties prenantes et les députés européens devaient eux aussi participer aux travaux. Martijn van Dam, ministre hollandais de l'Agriculture, dont le pays assume la présidence du Conseil de l'UE, s'est dit à ce sujet "content d'entendre que la Commission européenne prend [ce sujet] au sérieux, en établissant une plate-forme, de telle sorte que sujets problématiques existant en la matière peuvent être directement abordés par les parties prenantes et les ONG."
Pour ce qui est des thèmes à discuter par la plate-forme, les pays scandinaves ont évoqué la castration des porcelets, la coupe des becs des volailles, l'ablation de la queue des porcins et le transport des animaux sur de longues distances. D'autres pays ont soulevé la question sensible des temps de transport des animaux, dont l'Irlande, Malte, la Roumanie, l'Estonie, la Bulgarie ou l'Allemagne. La France et la Belgique ont respectivement évoqué l'élevage en plein air et l'enregistrement des chiens et chats errants.
Concernant la situation de marché, notamment celui du lait, de la viande porcine et des fruits et légumes, "la situation est loin d'être réglée", comme l'indique le communiqué du Ministère de l'Agriculture du Luxembourg. La Commission européenne a informé les ministres sur la situation courante et sur la manière dont les mesures décidées en septembre 2015 et surtout en mars 2016 ont été mises en œuvre. Néanmoins, ces mesures n'ont pas toutes eu l'effet escompté, de sorte que la plupart des ministres ont exprimé leurs préoccupations face aux difficultés qu'éprouvent les agriculteurs européens, et notamment les producteurs de lait, durement frappés par les conséquences de la surproduction après la suppression des quotas, et ont demandé "une intervention plus décisive", comme on le lit sur la page du Conseil consacrée à la réunion.
Dans son communiqué, le Ministère de l'Agriculture du Luxembourg écrit que "la Commission européenne n'étant pas disposée à procurer des fonds, des mesures nationales s'avèrent être la principale option envisageable". Et d'expliquer : "Les mesures proposées viseraient les producteurs qui sont prêts à volontairement maintenir ou baisser leur production. Ces mesures sont actuellement analysées. En ce qui concerne le Luxembourg la difficulté réside dans le fait que plus de trois quarts des entreprises laitières ont augmenté leur production depuis la fin des quotas." En effet, pour parer à l'effondrement des prix - selon le ministre Fernand Etgen au micro de 100,7, le prix du litre de lait au Luxembourg est de 28,5 cents, en-deçà du prix de revient – les producteurs ont misé sur la quantité pour rentrer dans leurs frais.
La question des marchés et des mesures pour soutenir les agriculteurs, pour Fernand Etgen un "sujet de première importance", sera reprise lors du prochain Conseil Agriculture qui se tiendra les 27 et 28 juin 2016 au Luxembourg. Selon le Ministère, la Commission prépare une analyse qui devrait y être présentée concernant les marges budgétaires disponibles sur le plan européen afin de réfléchir à un éventuel nouveau paquet de mesures. Le ministre Etgen est convaincu que des mesures supplémentaires devraient être prises. A la radio 100,7, il a indiqué que des restrictions de production volontaires qui seraient subventionnées pourraient être envisagées.
Les ministres de l'Agriculture des États membres de l'UE ont eu un débat sur la prise en compte du secteur agricole dans les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l'UE après 2020. Une proposition de la Commission est attendue le 29 juin 2016 sur le partage des efforts de réduction des gaz à effet de serre, au titre du Cadre énergie et climat 2030, et notamment "sur l'affectation des sols, changement d'affectation des sols et foresterie".
L'agriculture est appelée à réduire ses émissions, mais sans porter préjudice au potentiel de production du secteur, ont rappelé de nombreux ministres de l'Agriculture. "L'agriculture est une des causes du problème, elle est responsable de 10 % émissions de gaz à effet de serre, mais elle peut être une partie de la solution", a déclaré le ministre hollandais de l'Agriculture, Martijn van Dam, en évoquant sa contribution au stockage du carbone dans les sols et les forêts et la production de biomasse.
"Trois options sont sur la table pour prendre en compte ces émissions: maintenir l'utilisation des terres en dehors des efforts de réduction des émissions de CO2 et comptabiliser séparément celles liées à l'agriculture ; créer des objectifs européens pour l'utilisation des sols, y compris dans le secteur agricole, ce qui permettrait d'y intégrer des systèmes de gestion de l'utilisation des sols ; créer un grand "pilier" 'agriculture et utilisation des sols', dans lequel les émissions agricoles pourraient être en partie compensées par l'absorption de CO2 dans les sols pour la comptabilisation des objectifs nationaux", avait rapporté le média de veille et d'analyse des politiques agricoles, Agropresse Hebdo, dans un article du 1er avril 2016.