Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie
Le Conseil de l'UE a suivi les recommandations faites par la Commission et décidé de ne pas imposer d'amendes au Portugal et à l'Espagne dans le cadre de la procédure pour déficit excessif
09-08-2016


ConseilLe 8 août 2016, le Conseil de l'UE a fait savoir qu'il suivait les recommandations faites le 27 juillet 2016 par la Commission de ne pas imposer d'amendes au  Portugal et à l'Espagne dans le cadre de la procédure pour déficit excessif d'une part, et de leur adresser une nouvelle trajectoire d'ajustement budgétaire, d'autre part.

La Commission européenne  avait invoqué la possibilité de réduire cette sanction en cas de circonstances économiques exceptionnelles ou suite à une demande motivée des Etats concernés. Elle précisait les raisons de sa décision : un environnement économique qui impose de nombreux défis, les efforts de réforme des deux pays et leurs engagements à respecter les clauses du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) aux échéances prévues.

Le Conseil n'était toutefois pas lié par ses recommandations et pouvait décider d'imposer, malgré tout, des sanctions aux deux pays pouvant aller jusqu'à 0,2 % de leur PIB – soit 358 millions d'euros pour le Portugal et 2,12 milliards d'euros pour l'Espagne. De telles sanctions eurent été une première. Pour amender ou rejeter la proposition, il eût fallu, dans les 10 jours ouvrables suivant la décision de la Commission, réunir une majorité qualifiée - la dite "majorité qualifiée inversée" - des Etats membres de la zone euro, sachant que l'Etat membre concerné n'aurait pas pu prendre part au vote. Une telle majorité n'a pu être obtenue.

Dans un communiqué de presse datée du 9 août 2016, le Commissaire européen en charge des affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, a jugé qu'il s'agissait là d'une "application intelligente du pacte de stabilité et de croissance". "En donnant plus de temps à l'Espagne et au Portugal pour amener leur déficit public sous la barre des 3 %, le Conseil pose de nouvelles trajectoires budgétaires crédibles, qui contribueront à renforcer leurs économies et la zone euro", a-t-il notamment ajouté.

Les demandes motivées du Portugal et de l'Espagne jugées recevables

Pour les deux pays, le Conseil estime qu'il n'existe pas de "circonstances économiques exceptionnelles" justifiant la levée des sanctions. Pour cause, le PIB du Portugal devrait continuer à croître à un taux de 1,5 % en 2016, et de 1,7 % en 2017, tandis que cette croissance atteindrait 2,9 % pour l'Espagne en 2016. Par contre, leurs demandes motivées ont convaincu le Conseil d'agir avec clémence.

Dans sa demande motivée, datée du 18 juillet 2016, le Portugal avait rappelé les importants efforts d'assainissement budgétaire et les réformes structurelles déjà consentis dans le cadre du programme d'ajustement économique. Il a aussi réaffirmé son ferme engagement à corriger le déficit excessif en 2016.

Il a réaffirmé sa volonté d'opérer un ajustement budgétaire en 2017 conformément à la recommandation budgétaire par pays adoptée par le Conseil le 12 juillet 2016. Le Portugal s'est aussi engagé à de nouveaux efforts de redressement budgétaire en indiquant que le prochain projet de plan budgétaire d'octobre 2016 lui permettra de respecter la recommandation budgétaire par pays, qui exige un ajustement structurel d'au moins 0,6 % du PIB. "Il s'agit d'un progrès par rapport à l'ajustement structurel de seulement 0,35 % du PIB prévu dans le programme de stabilité pour 2017, les mesures spécifiques d'ajustement restant néanmoins encore à définir", dit le Conseil dans sa décision. Le Conseil note que la demande motivée du Portugal fournit des informations supplémentaires sur la manière dont certains crédits budgétaires s'élevant à 0,2 % du PIB qu'il s'est engagé à geler, peuvent être utilisés et se félicite que sa demande motivée mentionne explicitement la nécessité de définir un programme pour réduire les prêts non performants.

Dans sa demande motivée du 13 juillet 2016, l'Espagne avait rappelé ses résultats importants dans la mise en œuvre d'un agenda de réformes, dans un contexte économique très difficile, jugées décisives dans la reprise forte de l'activité économique et de la création d'emplois. Le Conseil note à ce sujet un "changement significatif durant les dernières années", notamment grâce à des réformes "qui ont permis d'assouplir les rigidités qui existaient sur le marché du travail et les marchés des produits", ainsi que la recapitalisation des institutions financières et les réformes structurelles (restructuration du secteur bancaire, réforme de la fonction publique, réforme de l'encadrement de l'insolvabilité et la création d'un conseil budgétaire indépendant). Elle note aussi que "la reprise est accompagnée par de fortes créations d'emplois, grâce au maintien d'une modération salariale et à l'impact des réformes du marché du travail".

Le Conseil justifie également sa décision par l'annonce faite le 13 juillet, par le gouvernement intérimaire espagnol, de sa volonté de mettre en place d'autres "mesures bienvenues" de réduction du déficit : à savoir, en ce qui concerne les recettes, des modifications de la loi sur l'impôt des sociétés pour compenser la perte de recettes d'environ 0,5 % du PIB attendue en 2016 en raison des changements apportés à la réglementation du paiement fractionné de l'impôt sur les sociétés ; et, pour ce qui est des dépenses, l'avancement de la date de la clôture de l'exercice budgétaire de l'administration centrale, adopté le 14 juillet, qui pourrait contribuer à contenir la progression des dépenses au second semestre de 2016.

Le Conseil note toutefois que "d'importants défis demeurent, les hauts niveaux de dettes publique et privée reflétée dans le niveau très élevé de la dette extérieure nette, expose encore l'Espagne à des risques de turbulence des marchés, et le fort chômage freine l'ajustement économique".

De nouvelles trajectoires d'ajustement budgétaire

Le Conseil a par ailleurs mis en demeure le Portugal et l'Espagne de "prendre des mesures pour procéder à la réduction du déficit jugée nécessaire pour remédier à la situation de déficit excessif". Elle a suivi en la matière les recommandations de la Commission européenne. L'Espagne et le Portugal devraient présenter un rapport sur les efforts d'ajustement qu'il a consentis au plus tard le 15 octobre 2016, en même temps que son projet de plan budgétaire pour 2017.

Le Conseil demande au Portugal de mettre fin à son déficit public excessif en 2016, ce qui devrait être fait puisque les prévisions de printemps indiquent que son déficit public devrait atteindre 2,5 % en 2016. Mais il doit également mettre en œuvre des mesures de consolidation s'élevant à 0,25 % du PIB cette année. Grâce à des mesures prises au budget 2016, Le Portugal complète ces économies par des mesures supplémentaires de nature structurelle pour parvenir à l'effort structurel recommandé. Le Portugal, de la même manière que l'Espagne, doit se tenir prêt à adopter des mesures supplémentaires si les risques qui entourent les plans budgétaires se concrétisent.

Le Conseil a décidé d'accorder deux années supplémentaires à l'Espagne pour atteindre la barre des 3 %. "Accorder une année supplémentaire à l'Espagne pour corriger son déficit nécessiterait un ajustement structurel qui pourrait un impact trop négatif sur la croissance", se justifie-t-il. Elle considère dans sa décision sur l'Espagne qu'une "trajectoire d'ajustement crédible et durable" serait qu'elle parvienne à un déficit public de 4,6 % du PIB en 2016, de 3,1 % en 2017 et de 2,2 % en 2018, ce qui équivaut à une détérioration du solde structurel de 0,4 % du PIB en 2016 et à une amélioration de 0,5 % du PIB en 2017 ainsi qu'en 2018. "Pour atteindre ces objectifs, des mesures structurelles supplémentaires ayant un impact estimé à 0,5 % du PIB en 2017 comme en 2018 sont jugées nécessaires, dit le Conseil. Pour 2017 et 2018, des économies pourraient venir de la réduction du nombre et de l'ampleur des dépenses fiscales, notamment les taux réduits de TVA, afin de parvenir à l'effort structurel requis."

La question de la suspension des Fonds structurels sera tranchée à l'automne

La Commission, obligée en théorie de suspendre les Fonds structurels (ESI) des deux Etats membres pour 2017, avait finalement décidé de ne pas encore statuer sur cette question, mais de faire une proposition seulement après avoir entamé à ce sujet un dialogue structuré avec le Parlement européen à la rentrée parlementaire. Ces fonds ESI pourraient ne pas être suspendus, si l'Espagne et le Portugal réussissent à prendre jusqu'au 15 octobre 2016 des actions qui produisent des effets, dont un projet de budget 2017 à présenter en automne en accord avec les exigences du Pacte de stabilité et de croissance.

"Une action efficace de l'Espagne et du Portugal seront une condition nécessaire pour  lever la suspension des engagements du Fonds européen", a prévenu le vice-président de la Commission, en charge de l'euro et du dialogue social, Valdis Dombrovskis.