Le même jour, l’Allemagne présentait la nouvelle mouture de son système de vignette, fidèle à l’accord trouvé le 5 décembre 2016 à l’issue de nombreuses discussions avec la Commission européenne. Cette dernière avait lancé en juin 2015, une procédure formelle d'infraction contre l'Allemagne au sujet du projet initial.
Ce nouveau projet prévoit que toutes les voitures allemandes ne soient pas traitées de la même manière. Ainsi, les voitures les plus propres pourront voir le prix de la vignette totalement compensé par un allègement de la taxe sur les véhicules. Ainsi, les automobilistes allemands qui conduisent des voitures dont la quantité de rejets répondant aux normes Euro 6, les plus élevées, seront baissés de 100 millions d’euros supplémentaires. "Pour les automobilistes du pays, il n’y a pas de charge supplémentaire. Qui conduit un véhicule Euro6, particulièrement respectueux de l’environnement, paie même moins que jusqu’alors", a souligné le ministre allemand des Transports, Alexander Dobrindt. Le projet prévoit que, durant les deux premières années suivant le lancement de la vignette, un supplément dans la baisse de l’impôt sur les automobiles, que les propriétaires de voiture du pays au moins à hauteur de la vignette. A partir de la troisième année, ce supplément serait abaissé.
Le second aspect du nouveau projet consiste dans la réduction du prix des vignettes de courte durée par rapport au projet original. Ces vignettes, généralement achetées par des conducteurs étrangers, seront disponibles selon six, et non plus trois tarifs, dont le montant varie en fonction des émissions de la voiture. Ainsi une vignette pour dix jours pourra coûter entre 2,50 euros et 25 euros. Une vignette pour l’année pourrait coûter jusqu’à 130 euros.
"Avec cet accord, nous réussissons le changement de système d’un financement par l’impôt à un financement par l’usager“, a également Alexander Dobrindt. Jusqu’ici, les revenus fiscaux sont allés vers le budget général. Maintenant les revenus de la vignette iront dans les projets d’infrastructure. "Nous atteignons aussi plus de justice sur nos routes, avec le principe de ‘qui utilise, paie’, sans que personne ne paie deux fois". Le ministre allemand a ainsi appelé l’Autriche à "un peu plus de sang-froid", rappelant que la Commission a clairement indiqué qu’un tel système de péage était "conforme au droit européen".
Toutefois, ce nouveau projet n’a pas convaincu les opposants. "Le ministre fédéral du transport, Alexander Dobrindt, veut faire passer à la caisse les étrangers ressortissants de l’UE, pendant qu’en secret il épargne ses électeurs potentiels. Ce traitement inégal est contraire au principe fondamental de l’UE, et nous ferons tout notre possible, pour l’en empêcher", a déclaré l’eurodéputé socialiste allemand, Ismail Ertuh, à l’issue de la rencontre avec les eurodéputés. L’eurodéputé luxembourgeois PPE, Georges Bach, qui avait le 8 décembre 2016 appelé avec quarante autres eurodéputés, dont les deux autres eurodéputés PPE luxembourgeois, Viviane Reding et Frank Engel, à un débat en plénière sur le projet allemand, a participé à la réunion, sans communiquer à son issue. Durant les prochaines semaines, le Parlement européen devrait adopter une résolution contre la vignette, qui serait symbolique plus que contraignante. Les eurodéputés souhaitent également que la commissaire en charge des Transports, Violeta Bulc, explique pourquoi elle entend donner son feu vert au projet modifié de l’Allemagne.
A l’issue de la réunion entre experts venus de pays ayant une frontière commune avec l’Allemagne (Luxembourg, Pays-Bas, Belgique, Danemark, Pologne, République tchèque), mais aussi de Hongrie, Slovaquie, Slovénie et Grande-Bretagne, pour discuter de la pertinence de porter l’affaire devant la Cour de justice l’UE, le ministère autrichien des Transports a diffusé un communiqué de presse dans lequel il a résumé la situation. "Quelques pays critiquent, comme nous, le modèle allemand, d’autres ne s’en sont pas encore saisi dans le détail. Maintenant, il convient d’examiner précisément le texte législatif final. A cela s’ajoute que nous et le Luxembourg avons demandé une expertise. L’Autriche se réserve tous les moyens juridiques pertinents contre la vignette déloyale, aussi une plainte", a déclaré le ministre autrichien des Transports, Jörg Leichtfried.
Le journal luxembourgeois L’Essentiel a confirmé que le ministre des Infrastructures, François Bausch, a commandé une étude sur le projet allemand. "S'il s'avère qu'il n'est pas compatible avec le droit européen, le Luxembourg pourrait, avec d'autres pays, déposer une plainte au niveau européen", lui a expliqué une porte-parole du ministère. Lors d’une visite au Luxembourg de la chancelière allemande, Angela Merkel, le 12 janvier 2017, le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, avait fait savoir le mal qu’il pensait de cette idée, ne la considérant "pas positive pour les relations économiques dans la Grande Région", tandis qu’il soulignait que "la circulation routière fait aussi partie des libertés en Europe" et qu’elle ne doit pas faire l’objet de discriminations entre citoyens européens.
Les Etats membres réunis à Bruxelles se sont donné rendez-vous pour une réunion de suivi après le vote au Bundestag allemand, lequel devrait intervenir en mars, selon le ministère autrichien des Transports.
En Allemagne, le projet est lui aussi controversé, notamment dans les régions frontalières, jusque dans les rangs du parti (CDU) de la chancelière. Il en est ainsi de la cheffe du parti CDU en Rhénanie-Palatinat, Julia Klöckner qui a déclaré que "le long des frontières, les automobilistes doivent pouvoir rouler sans vignette", soulignant l’importance sociétal et économique de la circulation transfrontalière locale. Toutefois, Alexander Dobrindt a d’ores et déjà refusé des règles particulières, voyant déjà un compromis dans le fait que les automobilistes de l’étranger ne doivent payer de vignette uniquement pour les autoroutes.