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Politique étrangère et de défense
Conseil Affaires étrangères – "Nous avons maintenant la possibilité de montrer à M. Trump que l'Europe n'est pas seulement une communauté solidaire", mais qu'elle "prend les Affaires étrangères au sérieux", a déclaré Jean Asselborn
16-01-2017


Boris Johnson, Jean Asselborn et Frank-Walter Steinmeier lors du Conseil Affaires étrangères qui s'est tenu le 16 janvier 2017 à Bruxelles (c) Union européenne / Le Conseil de l'UELes ministres des Affaires étrangères de l’UE se sont réunis le 16 janvier 2017 à Bruxelles pour un Conseil Affaires étrangères présidé par la Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, Federica Mogherini. Il s’agissait de la première session du Conseil qui s’est déroulée dans le nouveau bâtiment Europa, qui, ce mois de janvier, est devenu le siège principal du Conseil européen et du Conseil de l'UE. Le Luxembourg était représenté par son ministre des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn.

Le principal sujet à l’ordre du jour était la situation en Syrie. Les ministres ont ainsi fait le point sur les événements survenus dans ce pays depuis le Conseil du 12 décembre. Un communiqué de presse du Ministère luxembourgeois indique que les ministres ont notamment examiné le rôle que l'UE doit jouer pour contribuer à un cessez-le-feu complet et à une véritable transition politique en Syrie sous l'égide des Nations unies, ainsi que pour garantir l'accès et la protection des organisations humanitaires dans l'ensemble du pays. Les ministres ont été informés des tout derniers efforts accomplis dans le cadre de l'initiative régionale de l'UE sur l'avenir de la Syrie.

Federica Mogherini a annoncé qu’elle espérait que l’UE puisse organiser en avril prochain une conférence de suivi de la conférence de Londres de février 2016. "Nous travaillons pour avril", a-t-elle expliqué à la presse, à l’issue du Conseil. Il s’agira de faire le point sur les engagements pris à Londres, mais ce sera avant tout "une conférence politique", a-t-elle indiqué. "Nous espérons que, quelques mois après la reprise prévue des négociations intersyriennes, cela puisse être le moment pour chacun de tourner la page et d’entamer le processus de réconciliation et de reconstruction en Syrie", a ajouté la Haute représentante. Les négociations intersyriennes sous les auspices de l’ONU devraient reprendre le 8 février à Genève.

Au cours du déjeuner, les ministres ont eu un échange de vues sur le processus de paix au Proche-Orient, suite à l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies de la résolution 2334 (2016) et de la conférence de Paris, tenue le 15 janvier 2017. Les ministres ont débattu de la voie à suivre pour parvenir à un accord de paix global, préserver la viabilité d'une solution fondée sur la coexistence de deux États et inverser les tendances négatives actuelles sur le terrain.

Le Conseil a par ailleurs réaffirmé dans ses conclusions le soutien de l'UE au processus démocratique au Liban et salué l'élection du président Michel Aoun ainsi que la formation d'un nouveau gouvernement dirigé par le Premier ministre Saad Hariri. Invitant le pays à organiser des élections législatives dans les meilleurs délais, en 2017, le Conseil a également réaffirmé combien il importe que le Liban s'en tienne à une politique de dissociation à l'égard de tous les conflits régionaux, et a salué les efforts extraordinaires consentis par ce pays pour accueillir plus de 1,1 million de réfugiés syriens.

Ce sont essentiellement les réactions aux déclarations fracassantes du futur président américain, Donald Trump, qui doit être investi dans ses nouvelles fonctions le 20 novembre prochain, qui ont été sous les feux de l’actualité. Le matin même du Conseil, le Times et le Bild publiaient en effet un entretien dans lequel le milliardaire qui a remporté l’élection américaine contre toute attente le 8 novembre dernier a jugé l’OTAN "obsolète", qualifié la politique d’Angela Merkel à l’égard des réfugiés d’erreur "catastrophique", ou encore estimé que le Royaume-Uni avait "eu bien raison" de quitter une Union européenne selon lui dominée par l'Allemagne. Il a aussi prédit que le Brexit serait un "succès" et que d'autres pays quitteraient l'UE, avant de se positionner pour un accord commercial rapide avec le Royaume-Uni, ce que Boris Johnson a accueilli comme une "très bonne nouvelle".

Donnant le ton et lançant un appel à l’unité, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a déclaré lors de son arrivée au Conseil que "la meilleure réponse à l'interview du président américain, c'est l'unité des Européens", c'est de "faire bloc".

"Je pense que l'Union européenne va rester unie, je suis à 100 % convaincue de cela", a réagi pour sa part Federica Mogherini. La Haute représentante n’a pas manqué de rappeler que, tant que le Royaume-Uni serait membre de l’Union européenne, les traités ne prévoient pas la possibilité de  "négociations de manière bilatérale sur un quelconque accord commercial avec un tiers". "L'Union européenne va continuer à œuvrer pour le respect et l'application de cet accord extrêmement important, principalement pour notre sécurité", a-t-elle par ailleurs souligné au sujet de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien, que Donald Trump a remis en question à plusieurs reprises. Federica Mogherini a aussi mis en garde contre toute "action unilatérale" visant un éventuel transfert de l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, tel que l’avait annoncé Donald Trump. "Je crois qu'il est très important pour nous tous de nous abstenir d'actions unitérales, en particulier celles qui ont des conséquences graves sur de larges secteurs de l'opinion publique dans une bonne partie du monde", a-t-elle averti à l’issue du Conseil.  "Je suis inquiète des réactions que pourraient avoir de larges parts de l'opinion publique, dans le monde arabe mais aussi en Afrique, en Asie et en partie en Europe, à une initiative qui n'est pas en accord avec le consensus international", a insisté la Haute représentante.

"Ce serait dommage que l'Amérique, en tant que plus grande démocratie au monde (...) agisse de façon destructrice", a pour sa part déclaré Jean Asselborn. "Nous avons maintenant la possibilité de montrer à M. Trump que l'Europe n'est pas seulement une communauté solidaire", mais qu'elle "prend les Affaires étrangères au sérieux et sait bien que si l'on détruit la politique étrangère, les conséquences en seront d'une très grande portée", a relevé le chef de la diplomatie luxembourgeoise.