Les ministres de l’Environnement de l’UE se sont réunis le 28 février 2017 pour un Conseil Environnement qui a été notamment marqué par un accord sur la position que va défendre le Conseil dans les négociations sur la réforme du système d’échange de quotas d’émission (SEQE ou EU ETS) pour la période 2021-2030.
C’est à l’issue d’une longue journée de négociations qu’un compromis a pu être trouvé sur ce projet législatif présenté par la Commission le 15 juillet 2015 sur la base des lignes directrices arrêtées dans les conclusions du Conseil européen d’octobre 2014. Les négociations avec le Parlement européen, qui vient tout juste d’arrêter non sans de vifs débats sa position en plénière, vont ainsi pouvoir débuter.
Le système d'échange de quotas d'émission, lancé en 2005, consiste à limiter le total des émissions des centrales électriques et des secteurs industriels à taux d'émissions élevé en imposant un plafond. Dans la limite de ce plafond, qui est abaissé chaque année, les entreprises peuvent acheter et vendre des quotas d'émission. Chaque quota leur donne le droit d'émettre une tonne de CO2, le principal gaz à effet de serre, ou une quantité équivalente d'un autre gaz à effet de serre. Cette approche contribue à inciter les entreprises à réduire leurs émissions efficacement et au moindre coût.
Bien que la mise aux enchères constitue la méthode par défaut en ce qui concerne l'attribution de quotas d'émission aux entreprises, certains secteurs industriels reçoivent gratuitement une part de quotas. L'allocation à titre gratuit s'effectue sur la base de référentiels relatifs à la performance, qui récompensent les meilleures pratiques en matière de production à faibles émissions.
Le SEQE est l'un des principaux outils pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le réexamen contribuera à l'objectif de l'UE consistant à réduire ses émissions d'au moins 40 % d'ici 2030, comme celle-ci s'y est engagée dans le cadre de l'accord de Paris sur le changement climatique.
La réforme a comme objectif de rendre plus efficace le principal instrument de marché dont dispose l’E pour atteindre ses objectifs climatiques pour l’horizon 2030, tout en protégeant les secteurs industriels les plus exposés au risque de fuites de carbone et à la concurrence internationale, moyennant une augmentation conditionnée du pourcentage de quotas alloués gratuitement.
"Cela est important pour nous, pour notre planète et pour les générations futures. L'accord de Paris a été un événement historique, mais nous devons passer de la parole aux actes. Un meilleur fonctionnement du SEQE permettra de réduire davantage les émissions. L'UE tient ses promesses, parce qu'elle est attachée à la perspective d'un avenir meilleur pour tous.", s’est félicité Jose A. Herrera, ministre maltais de l'environnement, qui présidait cette réunion du Conseil.
C’est à la majorité qualifiée que le texte de compromis a pu être adopté, un certain nombre de délégations refusant toujours de soutenir le texte à l’issue des difficiles tractations qui ont eu lieu.
Le Luxembourg, qui faisait partie des pays en faveur d’un accord ambitieux, était représenté par sa ministre Carole Dieschbourg, qui attache une grande importance à la mise en œuvre de l’accord de Paris. "Nous nous trouvons aujourd’hui face à un système qui de toute évidence ne fonctionne pas. Les surplus de quotas sont extraordinaires, les prix des quotas sont à un niveau dérisoire. Nous avons besoin d’un système crédible, qui fournit des incitations pour des investissements durables, qui encourage les mesures d’efficacité énergétique et le recours aux sources d’énergie renouvelables", a souligné la ministre lors du débat.
La ministre luxembourgeoise a plaidé pour un système SEQE crédible, qui protège les industries véritablement exposées à la concurrence internationale grâce à un système d’allocations gratuites bien plus ciblé qu’aujourd’hui, et grâce à des incitations à des investissements durables, à l’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables.
A ce stade des négociations, le souci premier de la ministre luxembourgeoise était de s’attaquer au surplus qui étouffe le système, et de veiller à ce que mécanisme de solidarité ne puisse servir qu’à financer des technologies propres et sûres.
Carole Dieschbourg a ainsi invité ses collègues à inclure dans le texte qui était sur la table une proposition d’amendement faite par le Luxembourg, la France, les Pays-Bas et la Suède, de façon à renforcer la réserve de stabilité du marché (MSR). Le compromis final prévoir ainsi que le taux d'alimentation de la MSR sera multiplié par deux et que la taille de la MSR sera limitée, une partie des quotas excédentaires étant définitivement retirée du système à partir de 2024 sur une base annuelle. Des mesures contribueront à renforcer le prix du carbone.
Dans un communiqué de presse, Carole Dieschbourg a finalement salué "un petit pas dans la bonne direction".
Les ministres ont également débattu de la façon de mettre en pratique le programme de développement durable à l'horizon 2030, en accordant une attention particulière à ce qu'il implique pour la politique environnementale de l'UE. Par exemple, ils ont examiné les moyens de renforcer la participation des citoyens et du secteur privé. Ce débat permettra de préparer les conclusions du Conseil de juin.
Dans ce contexte, Carole Dieschbourg a demandé que les instruments de planifications européens à l’horizon 2020 (7e programme d’action pour l’environnement, la stratégie de la biodiversité) prennent en compte l’Agenda 2030 pour un développement durable adopté par les Nations unies, tout comme le cadre financier pluriannuel avec les Fonds structurels, notamment le Programme de développement rural et la PAC.
A ministre luxembourgeoise a insisté sur la nécessité "d’un programme européen pour 2030, qualitatif, quantitatif mesurable et ambitieux, suivi d’un monitoring régulier". "L’UE doit montrer plus d’ambition dans la mise en œuvre de l’Agenda 2030. Il nous faut aussi un cadre pluriannuel de financement et également effectuer un screening des modèles financiers quant à leur impact sur les Objectifs de développement durable. C’est dans ce sens que les conclusions lors du Conseil du 20 juin 2017 doivent être adoptées", a plaidé Carole Dieschbourg.
Dans le cadre du processus du Semestre européen, les ministres ont eu un échange de vues sur l'examen annuel de la croissance 2017 et sur le rôle du développement durable et de l'environnement. Ils ont également discuté de l'examen de la mise en œuvre de la politique environnementale, un nouvel outil permettant de combler les lacunes que présente la mise en œuvre de la politique et de la législation en matière d'environnement. Une initiative née pendant la présidence luxembourgeoise du Conseil, ainsi que l’a rappelé Carole Dieschbourg avant de proposer que "l’examen de la mise en œuvre de la politique environnementale joue un rôle majeur de monitoring pour les États membres et soit élargi aux volets climat et produits chimiques". Elle a également estimé que ces rapports mettent clairement en évidence les défis auxquels les pays doivent faire face et devraient être discutés avec d’autres ministères, afin de pouvoir adresser ces défis ensemble dans la logique d’une cohérence des politiques. Elle a salué le principe d’une coopération régionale et des échanges d’expériences et de bonnes pratiques, cela en associant les différents acteurs.