Le Parlement européen réuni en plénière a adopté le 16 février 2017 trois résolutions clarifiant son positionnement sur l’avenir de l’Europe dans la perspective du 60e anniversaire du traité de Rome. Pour les eurodéputés, si l’UE veut faire face aux défis politiques majeurs à venir, améliorer sa capacité à agir, restaurer la confiance des citoyens et faire en sorte que la zone euro soit plus résistante aux chocs extérieurs, elle doit tout d’abord utiliser pleinement les dispositions du traité de Lisbonne. Cependant, pour aller plus loin, elle doit se réformer plus en profondeur et envisager une réforme ambitieuse des traités. C’est ce qui ressort des trois rapports adoptés après un débat qui s’est tenu le 14 février 2017.
La première résolution, rédigée par Mercedes Bresso (S&D) et Elmar Brok (PPE), se concentre sur ce qui pourrait être fait pour tirer tout le parti de l’actuel traité de Lisbonne.
Elle propose notamment:
"L’Union européenne n’a pas besoin d’une révolution populiste. Elle a besoin de paix et de s’adapter aux besoins de notre époque. Cela signifie relever les défis démocratiques, fournir aux citoyens une protection sociale, fiscale et écologique, défendre leur droit à la sécurité dans un contexte international morose et répondre à nos obligations morales envers nos voisins", a déclaré Mercedes Bresso.
"Les citoyens attendent des solutions de la part de l’Europe et ils sont en colère car ils ne voient pas les réponses venir. C’est une évidence à une époque où les défis sont légion, mais il y a de nombreux problèmes qui ne peuvent être résolus qu’ensemble. Le traité de Lisbonne offre un éventail de possibilités pour rendre l’UE plus efficace, plus responsable et plus transparente, et ces possibilités n’ont pas encore été exploitées", a affirmé Elmar Brok.
La résolution a été adoptée par 329 voix pour, 223 voix contre et 83 abstentions. L’ensemble des eurodéputés luxembourgeois ont voté en faveur de cette résolution, à l’exception de Claude Turmes, qui s’est abstenu. Dans un communiqué de presse diffusé à l’issue du débat, l’eurodéputé écologiste a insisté sur les attentes des citoyens en termes d’améliorations concrètes de l’Union européenne. Il a aussi appelé à un retour aux processus de décision démocratiques de la méthode communautaire, sans qu’un Etat membre puisse bloquer à lui seul le processus législatif et en veillant à ce que le Parlement européen ait toute sa place, ce qui explique son soutien à l’idée de renforcer les droits du Parlement européen et à celle de faire du Conseil des ministres une seconde chambre législative. Claude Turmes y critique aussi vivement la Commission pour l’agenda néolibéral qu’elle applique.
Charles Goerens, qui était rapporteur fictif pour le groupe ADLE pour ce texte, est intervenu dans le débat en plénière pour souligner notamment que si "nous voulons que la politique extérieure de l'Union ait un visage, alors acceptons l'autorité de Madame Mogherini plutôt que de prévoir pour chaque négociation un format différent dans lequel elle n’a pas la place qui lui revient". "C'est la Haute Représentante qui devrait donner le la dans toutes ces initiatives : on peut déjà le faire sans changer le Traité", a-t-il insisté.
La deuxième résolution, rédigée par Guy Verhofstadt (ADLE), analyse la possibilité d’aller au-delà des outils actuellement disponibles, et étudie l’éventualité d’une réforme en profondeur du traité de Lisbonne, dans des domaines tels que la gouvernance, la politique étrangère, les droits fondamentaux et la transparence. Par exemple:
"Ces rapports, ce sont des projets détaillés de ce à quoi une Union plus parfaite devrait ressembler. Ils ne proposent pas d’intégration européenne comme une fin en soi. Dès l’adoption de ces rapports, la question suivante se posera: quelle est la voie à suivre? Je sais que nous pouvons avoir une Union européenne forte, puissante, respectée tout en ayant des démocraties locales et nationales prospères. En fait, je suis convaincu que l’un n’est pas possible sans l’autre", a expliqué Guy Verhofstadt.
La résolution a été adoptée par 283 voix pour, 269 voix contre et 83 abstentions. Tous les eurodéputés luxembourgeois ont voté en faveur de ce texte.
La troisième résolution, rédigée par Reimer Böge (PPE) et Pervenche Berès (S&DR), propose de rapprocher davantage les économies de la zone euro et de les rendre plus résistantes aux chocs extérieurs. Le texte se penche sur une stratégie de convergence dont les fonds proviendraient d’un budget spécifique de la zone euro, qui serait financé par les États membres et disponible sous des conditions précises. Parmi les propositions clés figurent:
"Stabiliser la zone euro serait dans l’intérêt de l’Union européenne dans son ensemble. Par conséquent, nos propositions posent les jalons de toute négociation future avec les autres institutions européennes. Les experts du Fonds monétaire international ont également répondu de façon positive, montrant un grand intérêt pour nos idées ", a souligné Reimer Böge.
"Soixante ans après la signature du traité de Rome, l’esprit des pères fondateurs de l’Union européenne doit être ravivé. Créer un budget pour la zone euro serait un grand pas en avant pour atteindre cet objectif, à une époque où la nécessité de préserver l’intégrité de l’euro n’a jamais été plus pressante. En faisant preuve de solidarité envers les États membres confrontés à une crise exceptionnelle, en absorbant les chocs macroéconomiques qui peuvent toucher la zone euro dans son ensemble et en encourageant la convergence vers le haut, un tel outil pourrait exploiter pleinement la monnaie, tout en contribuant à parvenir au plein emploi au sein de l’Union", a commenté Pervenche Berès.
La résolution a été adoptée par 304 voix pour, 255 voix contre et 68 abstentions. Au cours du débat, Charles Goerens a souligné que rien ne sert de se lamenter sur le déficit démocratique dans la zone Euro tant que l’on continue à s’opposer à un véritable contrôle par le Parlement européen, ce qui requiert un changement de Traité, ainsi qu’il n’a pas manqué de le souligner.