Le ministre s’est félicité du fait que la Commission européenne ait accepté le plan luxembourgeois de quotas d’émission sur tous le points qui avaient déclenché des critiques à l’intérieur du pays et sur deux points sur trois que la Commission avait soulevés. Mais il s’est insurgé contre la décision de la Commission qui veut que les quotas d’émission alloués à l’industrie soient réduits de 3,95 à 2,69 millions de tonnes, soit une diminution de plus de 1,25 millions de tonnes. Cette décision est "inacceptable pour le Luxembourg" et n’est pour le ministre rien d’autre que le résultat d’un "dialogue de sourds."
Pour Lucien Lux, l’industrie ne constitue pas un secteur prioritaire parce que disposant d’un haut potentiel de réduction des émissions de gaz. L’industrie luxembourgeoise a déjà réduit ses émissions de CO2 de 7,7 millions de tonnes en 1990 à 3 millions de tonnes. De ce fait, la modernisation des installations industrielles ne laisse que peu de marges à d’autres réductions. Finalement, le site industriel "Luxembourg" pourrait fortement pâtir d’une telle décision.
Ce que le ministre de l’Environnement conteste avant toute autre chose, c’est que la Commission ait basé sa décision sur une seule année de référence, l’année 2005, pour formuler sa demande de modification. D’autres petits pays de l’Union européenne ont fait de même. Dans le cas luxembourgeois, 15 installations seulement sont concernées, ce qui peut conduire à de très fortes fluctuations.
Pour illustrer son propos, le ministre a cité divers exemples. Ainsi Primorec (Arcelor) a fonctionné en 2005 avec des émissions de l’ordre de 39 900 tonnes alors que l’usine émettra 95 000 tonnes lorsqu’elle fonctionnera pleinement. Le nouveau laminoir à chaud de Belval a fonctionné en 2005 avec 33 590 tonnes d’émissions et en émettra 100 000. La centrale de cogénération du Kirchberg passera ainsi de 31 800 à 55 000 tonnes, et Twinerg dépassera le million de tonnes après 2005. Prendre 2005 comme unique année de référence conduit donc pour le ministre à exiger des réductions sur les émissions alors que les émissions actuelles, qui sont autorisées, sont déjà largement supérieures à ce que la Commission veut fixer comme nouvel objectif. Il est clair pour Lucien Lux que "si les émissions de l’industrie luxembourgeoise avaient été maximales, l’allocation pour les années suivantes aurait été plus importante."
Lucien Lux a ensuite mis en cause le système de prévisions PRIMES que la Commission utilise et qui a conduit à des prévisions erronées. Ainsi, en 2003, la méthode PRIMES a prévu que les émissions augmenteraient d’un million de tonnes, alors qu’elles ont en fait augmenté de 3,5 millions de tonnes. Idem pour une prévision que les émissions allaient atteindre un niveau en 2030 qui a déjà été atteint en 2006. Bref, pour le ministre, ce système de prévisions n’est pas approprié à des petites économies où l’impact d’une seule installation peut déjà induire de très fortes fluctuations. Au Luxembourg, il n’y a que 15 installations, une ou deux par secteur, et deux de ces installations (Twineg, Intermoselle) émettent 60% des gaz de serre du secteur industriel.
Selon le ministre, la Commission a également ignoré l’impact d’un nombre très limité d’installations dans la constitution des réserves pour d’éventuelles nouvelles installations.
Twinerg par exemple émet un tiers des émissions de tout le secteur industriel et 8% des émissions nationales. La réserve telle que le gouvernement voulait la constituer, c’est-à-dire 590 000 tonnes, équivaut à 18 % de l’allocation, mais seulement à 50 % des émissions de Twinerg.
„En clair“, a déclaré le ministre Lux, „accepter les 2,69 million de tonnes exigées par la Commission équivaut à refuser jusqu’en 2012 toute nouvelle installation, voire même fermer ou réduire la production d’un certain nombre d’installations industrielles. J’aimerais bien savoir qui pourrait exiger pareille démarche ou en assumer la responsabilité! Et cela signifie également qu’il faudra renoncer à toute nouvelle centrale de cogénération, comme le projet SudCal dans le cadre du projet Agora à Belval."
En résumé, le ministre a déclaré au nom du gouvernement : "En premier lieu, nous prenons acte de la décision de la Commission avec ses aspects positifs, mais surtout avec son unique aspect négatif, dont l’impact par contre est décisif. Ensuite, nous proposerons encore aujourd’hui à la Commission de nous entretenir avec elle sur ce point litigieux. Nous sommes prêts à mettre en question notre proposition d’allocation, mais de manière réaliste et non de manière irresponsable. Finalement, si la décision de la Commission devait être irréversible, nous nous réservons le droit d’entreprendre toutes les démarches qui s’imposent, y compris celle d’aller plaider devant la Cour de Justice des Communautés européennes."