Le 10 février 2010, le ministère de la Famille et de l’Intégration a procédé au lancement officiel de l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale qui aura lieu en 2010 dans toute l’UE. Ce thème avait été proposé par la Commission européenne il y a de cela plusieurs années afin de réaffirmer et de renforcer l’engagement politique initial pris par l’UE lors du lancement de la stratégie de Lisbonne, dans le but de donner "un élan décisif à l’élimination de la pauvreté". En pleine crise économique, ce sujet apparaît d’autant plus pertinent, comme n’a pas manqué de le souligner Ernst Moutschen, chef de la représentation de la Commission européenne au Luxembourg.
Car en effet, si l’UE et les systèmes de protection sociale européens comptent parmi les plus développés au monde, trop d’Européens vivent encore aujourd’hui dans la pauvreté. Ernst Moutschen s’est attaché à décrire, chiffres à l’appui, un phénomène qui revêt des formes complexes. Ainsi, 79 millions de personnes vivent en deçà du seuil de pauvreté (seuil fixé à 60 % du revenu médian de leur pays). Ce qui représente 1 % de la population européenne. Par ailleurs, un Européen sur dix vit au sein d’un ménage où personne ne travaille. Pour autant, le travail ne prémunit pas toujours contre le risque de pauvreté puisque pour 8 % des Européens, l'emploi ne suffit pas à sortir de la pauvreté.
Les chiffres publiés fin janvier 2010 par Eurostat révélaient par ailleurs que pour l’année 2008 le taux de risque de pauvreté atteignait 17 % dans l’UE, un phénomène qui frappe encore plus les enfants puisque pour eux il atteignait 20 %. Le phénomène ne manque d’ailleurs pas de susciter l’inquiétude comme l’ont montré les résultats de l’enquête Eurobaromètre sur la pauvreté et l’exclusion sociale.
L’objectif, de cette année qui a pour vocation une sensibilisation mais aussi la promotion d’échanges de bonnes pratiques, c’est, au niveau de l’UE :
Au niveau européen, une Commission de supervision se charge de coordonner les activités menées dans toute l’UE grâce à l’implication de la société civile, des organisations défendant les intérêts des personnes en situation de pauvreté, des partenaires sociaux et des autorités locales et régionales. A l’échelle de l’UE il y aura ainsi des campagnes d’information, des conférences ou encore un concours de journalisme. Un site Internet spécial, www.2010againstpoverty.eu a été lancé et il permet de voir tout ce qui se passe en Europe dans le cadre de cette année que l’UE finance à hauteur de 17 millions d’euros.
Au niveau national, un organisme d’exécution est chargé de la coordination des activités menées en lien étroit avec les acteurs de la société civile. Au Luxembourg, c’est le Ministère de la Famille et de l’Intégration qui va assumer ce rôle.
Pour Marie-Josée Jacobs, ministre de la Famille et de l’Intégration, il revient aux responsables politiques de sensibiliser le grand public aux questions de pauvreté et de lever les tabous au sujet de questions comme la pauvreté mais aussi contre l’exclusion sociale, qu’il convient de ne pas oublier dans les moyens mis en œuvre pour lutter contre la pauvreté. Un aspect que les mesures annoncées dans le programme de gouvernement s’efforcent de prendre en compte ainsi que l’a souligné la ministre.
Le Ministère, qui a déjà pour mission de coordonner le plan d’action national Inclusion (PAN-Inclusion), a donc élaboré un programme national, en concertation avec la société civile et lancé, en juillet 2009, un appel à propositions. Quatre priorités avaient été définies, à savoir :
Quatre grands projets s’inscrivant dans ces priorités seront donc financés au Luxembourg dans le cadre d’une Année européenne qui reste cependant ouverte à la participation d’autres acteurs. Il est en effet possible de faire labelliser des actions menées courant 2010, dans la mesure bien entendu où elles répondent aux objectifs de l’Année européenne.
Caritas se charge ainsi de mener un projet touchant à la pauvreté des enfants et à l’éducation. Partant du constat que les enfants sont souvent les plus frappés par la pauvreté, Marco Deepen, qui coordonne le projet, a expliqué que son organisation entendait sensibiliser et éduquer sur ces questions.
Dans un premier temps, un atelier destiné à toutes les personnes travaillant avec les enfants leur permettra d’échanger leurs pratiques mais aussi d’être mieux sensibilisés aux problèmes spécifiques liés à la pauvreté et à l’exclusion sociale.
Ensuite, les enfants eux-mêmes vont être amenés, par le biais d’ateliers sur le thème de la pauvreté dans les pays en voie de développement, à s’interroger sur ce que peut signifier une situation de pauvreté. Une façon de les amener, sans confrontation directe et sans risque de stigmatisation, à être mieux sensibilisés à ce que pourrait impliquer une situation similaire au Luxembourg. Une mallette pédagogique sera réalisée à cet effet et mise à disposition des maisons-relais qui participent à l’opération.
Une exposition, qui sera nourrie par les fruits des ateliers qui auront eu lieu auparavant, sera ensuite réalisée et présentée dans les maisons relais participantes. Destinée à voyager, l’exposition sera accompagnée d’une brochure.
L’Université de Luxembourg va, pour sa part, mener un projet qui, sous le titre INPRO-APPEX, a pour objectif de rendre visible les activités d’insertion menées sur le terrain depuis ces quinze dernières années. Cette période a en effet été marquée par un développement important du champ de l’insertion socio-professionnelle au Luxembourg et les porteurs de projet, Claude Haas et Charel Schmit, entendent maintenant mutualiser l’expérience institutionnelle existant notamment en matière d’insertion professionnelles des jeunes et des personnes âgées. Il s’agit ainsi d’identifier les pratiques, d’analyser celles qui peuvent être qualifiées de "bonnes pratiques", et ce selon des critères que les acteurs de terrain vont aider à définir, pour les diffuser à l’occasion d’un séminaire national qui aura lieu à l’automne 2010. A plus long terme, c’est tout un réseau qui pourrait se constituer dans l’élan donné par ce projet.
Les communes de la région Clervaux-Vianden, qui avait réalisé une étude sociale dans le cadre du projet RESONORD I cofinancé par le programme LEADER+, ont développé pour la période 2008-2013 un plan de développement social qui a notamment pour objectif de prévenir l’exclusion sociale de certains groupes vulnérables de la population et d’accroître l’accessibilité des services sociaux pour la population.
Dans cette perspective, un guichet unique social qui aura pour nom "Service social intercommunal – RESONORD" va être mis en place et devrait jouer un rôle important dans la mise en œuvre des politiques européennes en matière de cohésion sociale.
Pendant l’année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, il s’agira, selon Thierry Lutgen, de jouer auprès des publics concernés par la pauvreté et l’exclusion sociale un rôle de "helpdesk" en les conseillant et en les assistant. Par ailleurs, il s’agira de veiller à constituer, grâce à des contacts qui vont être pris avec l’ensemble des prestataires et acteurs du réseau social de la région, une sorte de plateforme d’échanges et d’information. L’objectif ? Faciliter l’accessibilité et la circulation des informations.
Créée en septembre 2009 à l’initiative du gouvernement, l’Agence immobilière sociale (AIS) est un instrument de lutte contre l’exclusion sociale par le logement. Ainsi, la mission principale de l’AIS est-elle de rechercher et de mettre à disposition des logements, adéquats et adaptés à la composition du ménage, à des personnes à revenus modestes souffrant également d'une problématique liée au logement. L'AIS met ainsi en place des projets d'inclusion sociale par le logement d'une durée maximale de trois ans. Dans ce cadre, l'AIS collabore avec les Offices sociaux et Services sociaux du pays.
Pendant l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, l’AIS va donc mener, ainsi que l'a expliqué Gilles Hempel, une campagne de sensibilisation pour mieux faire connaître les avantages dont les propriétaires peuvent bénéficier en collaborant avec l’AIS, à savoir la garantie que le loyer sera payé sans faute tous les mois ainsi que le contrôle et l’entretien régulier du bien par les équipes techniques de l’AIS qui se chargent aussi de la remise en état avant la première occupation. Par ailleurs, les locataires sont encadrés par une équipe de professionnels du domaine social, qui les accompagne tout au long de la durée du contrat et qui intervient en cas de besoin.