La politique énergétique prendra une place de choix dans les discussions des chefs d’Etat et de gouvernement qui vont se réunir à l’occasion du Conseil européen du 4 février 2011.
Si le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, insiste bien dans l’invitation qu’il a adressée aux participants à ce sommet sur son désir de mettre l’accent sur la question de la sécurité énergétique, la question de la lutte contre le changement climatique devrait surgir elle aussi en filigrane.
La Commission européenne a en effet présenté en amont du Conseil une communication visant à promouvoir les énergies renouvelables que Claude Turmes n’a pas manqué de saluer au nom du groupe des Verts/ALE au Parlement européen. Ce dernier a par ailleurs livré ces jours-ci un scénario démontrant comment l'UE peut atteindre un objectif de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 80-95 % d'ici à 2050. "Nous en avons la capacité technique", résume Claude Turmes, mais "les décisions politique doivent êtres prises maintenant ".
Les attentes sont donc grandes à l’approche imminente du sommet du 4 février. Mais les inquiétudes aussi. Car une initiative franco-tchèque tente de placer aux côtés des énergies renouvelables les énergies "faiblement carbonées", parmi lesquelles le nucléaire, dans la déclaration finale du Conseil européen. Une tentative à laquelle s’est opposé Jean Asselborn lors du Conseil Affaires générales du 31 janvier et que dénoncent plusieurs eurodéputés, Claude Turmes en tête.
La Commission européenne avait présenté en début de semaine, le 31 janvier, une communication relative aux progrès accomplis par l'UE pour promouvoir les énergies renouvelables. Elle y montrait que les objectifs de la politique en matière d'énergies renouvelables fixés pour 2020 seront probablement atteints, voire dépassés, si les États membres mettent totalement en œuvre leurs plans d'action nationaux en la matière et si les instruments de financement sont améliorés. Les Etats membres étaient donc appelés à multiplier par deux les investissements annuels en capital dans les énergies renouvelables, afin qu'ils passent de 35 milliards d'euros par an à 70 milliards d'euros par an.
La Commission soulignait aussi la nécessité de renforcer la coopération entre les États membres et de mieux intégrer l'énergie produite à partir de sources renouvelables dans le marché unique européen. Selon les estimations présentées par la Commission, ces mesures pourraient permettre de réaliser 10 milliards d'euros d'économies par an.
Une communication saluée par les Verts au Parlement européen qui ont toutefois appelé à faire plus encore pour placer les énergies renouvelables au cœur de la stratégie énergétique de l’UE.
L’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes, qui est porte-parole des Verts sur les questions énergétiques, a ainsi soutenu la Commission, rappelant que les régimes d’aide nationaux combinés aux mécanismes de coopération mis en place par l’UE sont pour lui la meilleure façon d’augmenter la part des énergies renouvelables. Claude Turmes a donc émis l’espoir que cette approche serait approuvée au Conseil européen du 4 février.
Le seul regret exprimé par l’eurodéputé écologiste luxembourgeois concerne les bio-carburants. Pour Claude Turmes, la Commission doit introduire des règles pour prendre en compte leur impact indirect en termes de conversion de terre, une exigence mise en avant par de nombreuses ONG.
Le groupe des Verts / ALE au Parlement européen a présenté par ailleurs une semaine avant ce Conseil les résultats d’une étude menée par l'Öko-Institut de Berlin présentant de façon détaillée un scénario énergétique pour l'Europe d'ici à 2050.
Intitulée "Vision 2050", cette étude est le premier scénario démontrant comment l'UE peut atteindre un objectif de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 80-95 % d'ici à 2050 (par rapport aux niveaux de 1990), en précisant les enjeux et les conséquences pour chaque secteur économique. Elle met également en avant les bénéfices considérables que cela représenterait pour la sécurité énergétique de l'UE, notamment par la réduction drastique de sa dépendance énergétique.
Selon Claude Turmes, cette étude confirme que "nous avons la capacité technique de respecter les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre que nous impose l'urgence climatique" et que "nous pouvons en tirer de grands bénéfices" en termes d’emplois ou encore de sécurité énergétique.
Cependant le message délivré par ce scénario est, ainsi que le formule l’eurodéputé, que "les décisions politiques doivent être prises maintenant". "Nous sommes à un moment crucial pour l'avenir climatique et énergétique de l'Europe", affirme Claude Turmes qui ajoute que "les investissements des dix prochaines années seront décisifs pour déterminer le futur du secteur énergétique européen".
"Les économies d'énergie, les énergies renouvelables, et la modernisation des réseaux d'électricité doivent devenir des priorités européennes", plaide l’eurodéputé luxembourgeois, annonçant au nom de son groupe parlementaire que "c'est le messag" attendu "de la part des chefs d'Etat lors du Sommet Energie du 4 février".
A l’avant-veille du Conseil, le 2 février 2011, Claude Turmes est cependant monté au créneau avec d’autres eurodéputés pour dénoncer un projet franco-tchèque visant à faire de l’énergie nucléaire un moyen de lutte contre le changement climatique.
L’Agence France Presse (AFP) relate en effet dans une dépêche que, selon les textes qu’elle a pu voir, la France souhaite faire figurer les énergies "faiblement carbonées" aux côtés des énergies renouvelables dans la déclaration finale du sommet du 4 février. Elle a proposé notamment que l'UE et ses Etats s'engagent à promouvoir l'investissement dans "les énergies renouvelables et les énergies faiblement carbonées" et souhaite rappeler que Bruxelles a récemment "indiqué qu'une proportion de 2/3 pour la production d'électricité faiblement carbonée devrait être atteinte d'ici 2020".
Selon Claude Turmes, un tel objectif de deux tiers compromettrait clairement les chances de développement du secteur des énergies renouvelables. L’eurodéputé luxembourgeois craint que, si ce texte devait être adopté, il ne marque "une percée décisive en faveur de l'énergie nucléaire, qui aurait pour conséquence d'affaiblir indirectement les énergies renouvelables".
L’eurodéputé écologiste n’est pas le seul dans l’hémicycle à dénoncer cette tentative, la libérale démocrate Corinne Lepage ayant elle évoqué à ce sujet "une forfaiture en regard des conventions internationales sur le climat, signées depuis Rio par la France, puisque l'ensemble des négociateurs ont toujours été attentifs à ce que le nucléaire ne profite pas des mesures destinées à réduire le CO2 et autres gaz à effets de serre". "Par cette mesure non seulement la France `pomperait´ les subventions européennes destinées aux énergies alternatives, mais elle poursuivrait sa politique de sabotage quant au développement des filières", a dénoncé l’eurodéputée française et ancienne ministre de l’Environnement.
Le texte a rencontré cependant une résistance ferme au Conseil Affaires générales du 31 janvier 2011, notamment de la part du Luxembourg qui y était représenté par Jean Asselborn. Ainsi, la référence aux énergies faiblement carbonées ne serait pas reprise, selon l’AFP, dans le projet de déclaration finale du sommet.
Une déclaration commune a cependant été adoptée dans ce sens par les ministres français et tchèque en marge du Conseil Affaires générales.
Dans leur déclaration, Laurent Wauquiez et Karol Schwarzenberg expriment ainsi explicitement "leur soutien aux énergies sobres en carbone" et ils "rappellent que l’énergie nucléaire représente une source d’énergie décarbonée répondant à la fois à la rationalité économique et aux objectifs de lutte contre le changement climatique".