Une semaine à peine après un Conseil européen qui a permis de trouver un accord sur un paquet global visant à la stabilité de la zone euro, le Premier ministre luxembourgeois et président de l’Eurogroupe Jean-Claude Juncker vient plaider dans numéro paru le 1er avril 2011 du Zeitschrift für Kreditwesen, bimensuel allemand spécialisé dans la politique bancaire et monétaire, la cause de la stabilité de l’euro.
Jean-Claude Juncker rappelle pour commencer que, selon lui, la crise actuelle ne concerne pas l’euro, mais les finances publiques de certains Etats membres. L’Union économique et monétaire (UEM) n’est donc aucunement remise en question selon lui. Et la crise a d’ailleurs prouvé d’après lui à quel point les Etats membres de la zone euro tiennent à leur monnaie commune. "Oui, il y a une crise dans la zone euro", admet Jean-Claude Juncker, mais "la zone euro dans son ensemble va en sortir renforcée", ajoute-t-il en soulignant "la détermination" sans précédent qu’il a pu observer au cours des derniers mois.
Cette détermination, Jean-Claude Juncker a pu la noter dans les mesures à court-terme prises au cours des douze derniers mois, par exemple pour soutenir la Grèce. Mais il l’a aussi relevée dans des mesures à moyen terme comme la mise en place de l’EFSF. L’intérêt soulevé auprès des investisseurs par les obligations émises par l’EFSF confirme d’ailleurs pour Jean-Claude Juncker la confiance fondamentale que les marchés des capitaux ont dans l’euro.
A long terme, "les jalons sont posés", estime Jean-Claude Juncker qui rappelle la décision du Conseil européen de décembre 2010 de procéder à une réforme du traité permettant la mise en place à compter de 2013 du mécanisme permanent de stabilité.
Mais au-delà de ces mécanismes d’aide d’ordre technique et financier dont s’est dotée la zone euro, Jean-Claude Juncker souligne l’importance des "connaissances fondamentales qui ont été acquises pendant la crise". Car s’il serait faux d’affirmer que l’Europe se soit lancée dans l’Union économique et monétaire "naïvement" - en témoignent la mise en place du pacte de stabilité et de croissance dès 1997, ainsi que la réforme qu’il a connue en 2005 -, il est évident pour Jean-Claude Juncker que la crise a cependant montré plus clairement que jamais que l’euro se base aussi sur une union économique. Ainsi, de l’avis du président de l’Eurogroupe, les déséquilibres macroéconomiques qui sont apparus depuis 1999 dans la zone euro n’ont pas seulement conduit à la crise, mais en aussi rendu plus difficile le chemin pour en sortir.
Pour Jean-Claude Juncker, le Pacte pour l’euro sur lequel se sont entendus, sur les principes, les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro le 11 mars 2011, sonne le début d’une nouvelle ère dans la coopération politique et économique des pays de la zone euro. "Certes, le pacte ne marque pas un changement politique dramatique, mais l’implication des chefs d’Etat et de gouvernement dans le renforcement de la coordination des politiques économiques va lui donner une nouvelle qualité", juge le Premier ministre luxembourgeois.
"La crise de la dette dans certains Etats membres aura finalement pour effet de renforcer la culture de la stabilité de l’UE dans son ensemble et de l’UEM en particulier", conclut Jean-Claude Juncker, convaincu que la zone euro a fait le nécessaire pour se doter des structures qui lui permettront d’assurer la stabilité à long terme de son économie et de sa monnaie.
A ses yeux, le pacte pour l’euro va, combiné avec la réforme du pacte de stabilité et de croissance et la stratégie Europe 2020, offrir un cadre pour un renforcement significatif de la coordination des politiques économiques et budgétaires des pays de la zone euro. Et ce d’autant plus qu’au-delà du déficit budgétaire, le niveau absolu et l’évolution de la dette globale seront désormais plus passés au crible.
A ce processus, va s’ajouter une meilleure surveillance réciproque sur des questions économiques spécifiques, comme l’évolution de la part des charges salariales dans les coûts de production et, de façon plus générale, la compétitivité. Jean-Claude Juncker souligne aussi que des questions comme le financement des systèmes de pensions, qui ont une portée à plus long terme, seront-elles aussi considérées.
Quant au mécanisme européen de stabilité (ESM), il permettra qui plus est aux pays de la zone euro de se protéger, à cour terme, des attaques de spéculateurs, mais aussi de faire face, à plus long terme, à des situations critiques et de retrouver le chemin de la stabilité.
Jean-Claude Juncker rappelle aussi que la BCE a, depuis le début de la crise financière en 2007, prouvé sa circonspection et sa crédibilité en tant que garante de la stabilité des prix. Le renforcement de la réglementation au niveau national et européen des instituts de crédit et des marchés financiers va, tout comme la création d’organes européens de supervision, contribuer aussi à éviter toute nouvelle crise.
Ainsi, la zone euro reste-t-elle fidèle à la culture de stabilité inscrite dans les traités, estime Jean-Claude Juncker. S’il reconnaît que la crise de la dette dans certains pays constitue un défi pour cette monnaie encore jeune, la crise n’aura su selon lui que renforcer l’obligation de faire de l’euro une monnaie stable.